Rechercher
Rechercher :
Sur bonaberi.com   Google Sur le web Newsletter
S'inscrire à la newsletter :
Bonaberi.com
Accueil > News > Points de Vue
Le carburant à 400Fcfa; c'est possible
(18/03/2008)
Les carburants coûtent de plus en plus cher, non pas seulement à cause de la mondialisation, mais aussi et surtout pour satisfaire au désiderata du Fmi et faire rouler divers profiteurs.
Par Noé Ndjebet Massoussi
1 – La pétrodépendance

Quelle belle idée a eue le gouvernement camerounais d’augmenter le prix des carburants à la pompe en pleine coupe d’Afrique des nations (Can) de football (20 janvier – 10 février 2008 au Ghana) à laquelle participaient les Lions Indomptables ? 16 Fcfa se sont ajoutés sur les compteurs à la pompe pour chaque litre du super, faisant ainsi exploser des organisations professionnelles du secteur des transports terrestres urbains et interurbains. Elles ont accusé le gouvernement de les avoir exclues du cadre de fixation des prix querellés comme prévu.

Quatorze d’entre elles ont appelé à une grève illimitée ayant dégénéré en un mouvement populaire de revendications sociales qui a fait peur aux dirigeants. Résultats des courses : le gouvernement a consenti à une baisse symbolique de 6 Fcfa sur le litre de super et de 5 Fcfa sur le litre de gasoil et de pétrole lampant. Ainsi, le litre du super est passé de 600 Fcfa à 594 Fcfa et le litre de pétrole lampant coûte désormais 375 Fcfa au lieu de 380 Fcfa, alors que le litre de gasoil se vend à 545 Fcfa au lieu de 550 Fcfa.

Malgré cette baisse, les prix des carburants à la pompe restent élevés au Cameroun. Le gouvernement justifie cette hausse record par le renchérissement du pétrole brut dont le baril, sur le marché international, a dépassé le seuil psychologique de 100 dollars Us depuis le 21 février dernier. Forcement donc, selon le gouvernement camerounais, cette nouvelle flambée du baril du pétrole sur le marché international a des répercutions sur le marché local. L’envolée des prix des carburants et de la vie chère en général dépendrait aussi, selon le discours officiel, de l’incidence du transport maritime, de la crise sur les prix des matières premières depuis 30 ans, de la réorientation des produits à consommation humaine vers la fabrication du biocarburant. La place du carburant dans les transports fait que l’implication sur les prix des denrées est rapidement ressentie chaque fois qu’il y a une hausse, même légère. Les consommateurs, en réalité, sont “ pétro dépendants ”.

Gros prétextes

Au-delà de l’explication de l’augmentation des prix à la pompe par les simples logiques du marché, l’on remarque que la dernière hausse des carburants est intervenue à la veille d’une mission du Fmi au Cameroun. C’est en 2005, qu’une certaine Doris Ross alors chef de mission du Fmi pour le Cameroun demande pour la première fois au gouvernement camerounais de pratiquer la réalité des prix. Prudent, et pour éviter les retombées sociales d’une pareille décision, il (le gouvernement) opte pour un réajustement progressif.En février 2006 par exemple, le litre de super était vendu à la pompe à 563 Fcfa au lieu de 592,02 Fcfa, soit un écart de 29 Fcfa à rattraper. Cette politique de prix est toujours en cours.

A en croire le ministre du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, l’amplitude aurait été plus désastreuse si l’Etat ne supportait pas 100 Fcfa sur chaque litre de carburants à la pompe. D’après la Caisse de stabilisation du prix des hydrocarbures (Csph), un tel effort coûterait à l’Etat un supplément de dépenses de plusieurs milliards de Fcfa en 12 mois. Certaines sources indiquent que ce soutien de l’Etat au consommateur de carburants est en nette augmentation depuis 2005. Il serait passé de moins de 17 milliards Fcfa en 2005 à 30 milliards Fcfa en 2007, après avoir été de 24 milliards Fcfa en 2006.

Dans la structure des prix des carburants publiée le 1er mars 2008 par le directeur général de la Csph, Ibrahim Talba Malla, ce soutien de l’Etat au consommateur est de 104,33 Fcfa pour chaque litre de super, 231,54 Fcfa pour chaque litre de pétrole lampant et 142,64 Fcfa pour chaque litre de gasoil. D’après le ministre du Commerce, cet appui s’étend également sur le gaz domestique. En suivant les injonctions du Fmi et les cours mondiaux, ce produit reviendrait aux ménages camerounais à 10 346 Fcfa. Or il coûte 6 000 Fcfa parce que l’Etat y met 4 346 Fcfa.

2 – La vérité des chiffres

Le Fmi exerce une pression sur le gouvernement pour que le Cameroun pratique la réalité des prix des carburants à la pompe. Et pourtant, le Cameroun a sa logique de la politique pétrolière que la logique du Fmi semble ignorer. Les dirigeants camerounais opèrent dans le pétrole comme une souris le ferait dans un sac d’arachides. Normal. Le pétrole n’aime pas le bruit, dit-on. Sinon, le soutien que l’Etat apporte aux consommateurs vaut-il ce qu’il leur prend ?

En fin novembre 2005, selon les statistiques du ministère de l’Economie et des finances (Minefi), les recettes pétrolières ont atteint le cap de 400,9 milliards Fcfa, soit une augmentation de 104,7 milliards Fcfa par rapport à 2004. Or pendant la même période (2005), l’Etat n’a subventionné la production et la consommation des carburants qu’à hauteur de 16,6 milliards Fcfa. En même temps, la redevance au budget de l’Etat de la Société nationale des hydrocarbures (Snh) se situait à 329 milliards Fcfa, alors que l’impôt sur les sociétés pétrolières revenait à 71,12 milliards Fcfa.

En 2007, la Snh a annoncé une hausse de 54% de son chiffre d’affaires et un résultat net de 20 milliards Fcfa. Autant de bénéfices que récolte l’Etat sur le pétrole grâce aux cours mondiaux.
Par ailleurs, des questions subsistent. Pourquoi le consommateur camerounais payerait aussi cher les carburants alors que le pays en est producteur ? Le Cameroun, 7e producteur en Afrique au sud du Sahara, exploite son pétrole depuis plus de 50 ans (officiellement c’est depuis 1977). Cette exploitation est faite sur 38 champs dans le Rio del Rey et Douala/Kribi-Campo.

La production camerounaise est estimée à 95 000 barils/jour (chiffres officiels en 2004), soit 34 200 000 barils/an. Mais officiellement, la Société nationale des hydrocarbures (Snh) qui commercialise la part de la production nationale de pétrole brut revenant à l’Etat du Cameroun déclare avoir vendu à la même période 800 000, 600 000, 300 000 et 100 000 barils respectivement de kolé, lokelé, ebomé et moudi, les quatre types de pétrole produits par le Cameroun. Le Cameroun est l’un des rares pays qui vend toute sa production sur le marché international et en rachète la quantité à consommer localement. Paradoxal ! Le pétrole camerounais est très lourd et la Société nationale de raffinage (Sonara) qui a coûté près de 200 milliards aux contribuables camerounais ne peut pas le raffiner. Le consommateur camerounais devrait logiquement bénéficier positivement des caprices du marché international.

Le scandale des taxes

A défaut de bénéficier de l’explosion des prix du marché mondial, le consommateur camerounais se saigne davantage pour engraisser l’Etat et d’autres profiteurs. Car, malgré le coût élevé du pétrole sur le marché international, le litre de super ne coûte que 345,38 Fcfa, celui du pétrole lampant 284,40 Fcfa et celui du gasoil 367,92 Fcfa à la sortie de la Sonara, toutes taxes comprises. Qu’est-ce qui explique donc qu’une fois à la pompe, le même litre de super de super revienne à 700, 600 ou 594 Fcfa ; celui du pétrole lampant à 500, 400 ou 375 Fcfa et celui du gasoil à 650, 550 ou 545 Fcfa ?

La nouvelle structure des prix des carburants publiée par la Csph laisse apparaître 23 taxes entre le raffineur (Sonara) et le revendeur à la pompe (station service). Toutes ces taxes interviennent sur les 3 produits et sont supportées par le consommateur final. Elles alourdissent le prix du litre du super de 415,73 Fcfa, celui du pétrole lampant de 277,50 Fcfa et celui du gasoil de 337,39 Fcfa.

Sur la base de ces chiffres, l’Etat et d’autres profiteurs (compagnies pétrolières, cadres camerounais) gagnent sur chaque litre de super vendu à la pompe 311,40 Fcfa ; 45,96 Fcfa sur celui du pétrole lampant et 194,75 Fcfa sur celui du gasoil. Du fait que certaines des 23 taxes sont trop élevées ou purement fantaisistes et arbitraires.

Les carburants étant des produits de grande consommation, ils constituent une source de revenus sûre pour l’Etat dans le cadre de sa politique budgétaire. A défaut de s’en priver totalement, l’on peut se demander à quoi servent des taxes sur l’ajustement économique, le réaménagement de Nsam, la péréquation de transport, la taxe spéciale (fonds routier), le fonds de lutte contre la fraude, l’amortissement et l’entretien.

Par ailleurs, la nouvelle structure des prix des carburants impose à chaque consommateur final à la pompe 6 fois la taxe sur la valeur ajoutée (Tva) sur chaque litre de produit acheté. Soit la Tva à la Sonara, la Tva sur le cabotage, la Tva sur redevances portuaires, la Tva sur dépôt, la Tva sur distribution, la Tva sur livraison en ville. Le consommateur à la pompe débourse sur chaque litre de super 70,67 Fcfa de Tva contre 37,31 Fcfa en 1999 ; 78,24 Fcfa sur celui du pétrole lampant contre 3,17 Fcfa en 1999 et 77,74 Fcfa sur celui du gasoil contre 30,22 Fcfa en 1999.

Question de volonté politique

Certaines taxes pourraient être valablement supprimées. Le consommateur final continue de payer la taxe sur le réaménagement de Nsam 10 ans après la catastrophe pour aider la Société camerounaise de dépôt pétrolier (Scdp) de se faire davantage de profits en sus de la taxe sur le dépôt imposée à la pompe. La taxe sur le fonds de lutte contre la fraude devrait plutôt être imposée aux sociétés d’exploitation et aux marqueteurs susceptibles de frauder ou d’en être victimes.

A travers la taxe sur l’amortissement et l’entretien, le consommateur final sur chaque litre de carburants acheté à la pompe participe à l’amortissement des dettes de l’Etat vis-à-vis de la Sonara qui était évaluée environ 16 milliards Fcfa en 1999 dont une partie (près de 6 milliards Fcfa) revenait au ministère de la Défense. Quant à la taxe spéciale qui grève le litre de super de 120 Fcfa et du gasoil de 65 Fcfa, outre, selon certaines sources 20 Fcfa et 45 Fcfa respectivement par litre de super et de gasoil représenteraient la redevance routière, où vont les 100 Fcfa et 20 Fcfa respectivement par litre de super et de gasoil vendu ? Tous calculs faits, si l’argent de la taxe spéciale était utilisé à bon escient, le Cameroun construirait chaque année une autoroute de près de 300 km.

Au finish, la flambée des prix des carburants à la pompe au Cameroun n’est qu’une escroquerie publique sur le consommateur final sous le voile d’un discours officiel qui s’appuie sur la mondialisation. En supprimant des taxes farfelues et en réduisant celles jugées excessives, l’Etat a les moyens de revoir davantage le prix des carburants à la pompe. C’est une question de volonté politique.



Source: Le Messager

A voir aussi sur le sujet du carburant :
Le gouvernement prend ses responsabilites
Carburant : pourquoi les prix grimpent
Carburant : le gouvernement a bout d'imagination ?





Partager l'article sur Facebook
 
Classement de l'article par mots clés Cet article a été classé parmi les mots-clé suivants :
points de vue  prix essence  carburant  vie chere  
(cliquez sur un mot-clé pour voir la liste des articles associés)
Discussions Discussion: 2 bérinautes ont donné leur avis sur cet article
Donnez votre opinion sur l'article, ou lisez celle des autres
Sur copos Sur Copos
Les vidéo clips Les vidéos clips
Récents Récents


Accueil  |  Forum  |  Chat  |  Galeries photos © Bonaberi.com 2003 - 2025. Tous droits de reproduction réservés  |  Crédit Site