Entre deux passages, j'ai été interpellée par une dame qui voulait s'assurer que c'est bien moi Lady Ponce. Elle m'a confié qu'à travers ma voix, elle m'imaginait un peu plus vieille". C'est vrai qu'à 25 ans, la voix rocailleuse de la chanteuse de bikutsi, qui a en ce moment le vent en poupe avec le célèbre refrain d'une de ses chansons à succès, "Le ventre et le bas ventre, et le tour est joué ! ", est quelque peu singulière, comme sortie des cavernes. Lady Ponce, de son vrai nom, Adèle Rufine Ngono, n'en est pas peu fière, et avoue que sa voix est pour elle l'une des choses les plus précieuses qui soient. Sa défunte mère était déjà animatrice des mariages et deuils...
Mais la jeune artiste n'a pas que sa voix, les traits fins et harmonieux de son visage, sa silhouette gracile et son sourire enjôleur donnent à cette chanteuse d'autres atouts. Mais Lady Ponce, mère de deux enfants (le dernier n'a que six mois) qu'elle pouponne entre deux spectacles, a choisi de chanter et envisage faire carrière dans la chanson. Depuis 2000, elle fréquente assidûment les cabarets de la ville de Yaoundé avec la claire intention d'améliorer son chant : " il y a une seule école de la musique au Cameroun, ce sont les cabarets ", soutient-elle. Et c'est dans le groupe musical "Vibrations" encadrée par Janvier Ewondo, Michel Mbarga Solo, Djam Moses… qu'elle fait ses premières armes.
En 2003, elle enregistre son premier et unique album à ce jour, intitulé, "Le ventre" et le propose au producteur Angoula Angoula. Ce dernier laisse passer trois ans avant de le mettre sur le marché. Et pour cause, " il était réticent à cause de la piraterie ", confie la chanteuse. C'est l'année dernière seulement que l'album de six titres est mis sur le marché.
Les réticences de son producteur s'avèreront justifiées et Lady Ponce, ancienne élève au Cetic de Ngoa Ekellé où elle a arrêté l'école en classe de quatrième année Industrie de l'habillement, croit savoir qu'elle est l'artiste la plus piratée au Cameroun en ce moment. Ce qui la désole profondément. Elle pense que le succès de sa chanson aurait pourtant pu lui faire gagner un peu d'argent, pour réaliser ses projets, notamment, produire un groupe qu'elle monté, spécialisé dans le folklore.
Mais elle refuse de se laisser griser par la popularité de sa chanson. Au lieu dit " carrefour Avenue Germaine " où elle a grandit à Yaoundé, elle n'hésite pas à s'arrêter pour échanger des poignées de main chaleureuse avec des gérantes de call box qu'elle présente comme ses copines. Elle relativise d'ailleurs son succès qu'elle circonscrit pour l'instant à Yaoundé et à ses environs. Son souhait est d'aller à la conquête de Douala et d'autres localités du Cameroun pour mieux faire connaître son album. Et justement, Lady Ponce tient à rappeler le sens du titre apparemment équivoque choisi : Le ventre. " J'ai ainsi nommé mon album parce que le Cameroun a faim ".
Quant au refrain " Le ventre et le bas ventre, et le tour est joué ", la chanteuse souligne qu'il s'agit simplement d'une recette efficace pour garder son homme : " L'autre de dehors ne pratique pas ! ", scande-t-elle, faisant ici allusion aux " maîtresses " souvent accusées d'envoûter des hommes mariés. Pour elle donc, l'homme c'est quoi ? " Le ventre et le bas ventre ", répond-elle avec emphase. Le philosophe, Hubert Mono Ndjana, dans un récent entretien accordé à Mutations a cette réflexion à propos de Lady Ponce : " cette femme a presque résumé l'épistémologie camerounaise. C'est sa façon de dire ce que Jean François Bayard appelle "la politique du ventre". Et c'est tellement réel ".
Source: Quotidien Mutations
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