L’occasion pour les pays de l’Est, privés de ce fruit à l’époque soviétique puis consommateurs de bananes latino-américaines, de découvrir peut-être le goût des bananes africaines. Car le marché européen est réglementé pour protéger les producteurs communautaires (des départements français d’outre-mer, des Canaries, des Açores, de Madère et de Crète) et ceux des anciennes colonies d’Afrique de l’Ouest et des Caraïbes, face à la concurrence des latino-américains et notamment de l’Equateur, premier exportateur mondial. Le système actuel de contingents garantit 20% des parts du marché européen aux bananes communautaires qui sont aussi les moins compétitives, 25% aux ACP qui le sont un peu plus, et le reste aux latino-américains, les plus performants en terme de concurrence.
Ces quotas disparaîtront le 1er janvier 2006 à la demande de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et seront remplacés par un régime purement tarifaire. Comment dès lors préserver le fragile équilibre actuel, sachant que l’Europe a aussi le devoir de protéger ses partenaires africains en vertu de l’accord de Cotonou ? La solution, savamment calculée par Bruxelles, consisterait à accorder aux exportateurs africains un accès préférentiel au marché européen tout en soumettant les bananes latino-américaines à un droit de douane de 230 euros la tonne.
Une proposition immédiatement rejetée par l’Equateur qui a menacé de porter à nouveau plainte devant l’OMC. Les autres producteurs latino-américains ont également réagi, expliquant qu’un droit de douane supérieur à 75 euros ferait chuter leurs exportations «de façon dramatique» au profit de pays comme la Côte d’Ivoire et le Cameroun. Les pays africains, en revanche, réclamaient un tarif de 250 à 300 euros. Dans une déclaration publiée cette semaine, l’Union des producteurs indépendants de bananes africaines (Upiba) estime le compromis de Bruxelles acceptable et de nature à garantir la survie des petits producteurs africains, à condition que ceux-ci bénéficient d’un accès libre, sans droit de douane, au marché européen. Les grandes manoeuvres ne font que commencer.
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