Plus de 50 % des prisonniers qui surpeuplent les geôles camerounaises le sont à titre préventif. Un élément qui pèse lourd dans la dégradation des conditions de détention. C’est ce que révèle un rapport de l’International center for prison studies (Icps), relayé par la Croix, le quotidien catholique français.
Avec un taux de densité carcérale de 296 % et un taux de détention de 129 pour 100.000 habitants, le Cameroun est avec la Barbade (dans les Petites Antilles), le pays où les conditions de détention sont les plus inhumaines. C’est ce que révèle une étude de l’International center for prison studies (Icps) sur la situation carcérale dans 201 pays d’Afrique, d’Amérique, d’Europe et d’Asie.
D’une manière générale, le tableau est plutôt sombre et les perspectives peu reluisantes : “l’année dernière, 8.974.998 personnes étaient privées de liberté dans le monde”, selon l’Icps, détenues dans des conditions qui bafouent honteusement la dignité humaine. Et contrairement à une idée généralement répandue, les pays occidentaux n’échappent pas à cette déshumanisation. “Trois personnes, voire plus enfermées dans 9 mètres carrés, 22 heures sur 24. Deux lits superposés et un matelas posé à même le sol”, s’indigne François Cartier de l’Observatoire international des prisons (Oip), lorsqu’il évoque la prison de Loos les Lille dans le Nord de la France.
Et si en Europe, la densité carcérale (nombre de prisonniers par rapport au nombre de places dans les prisons à un moment donné) est en moyenne de 97 % (selon le Conseil d’Europe), elle est de 118 % en France, donc supérieure à la densité moyenne européenne ! Quant au Cameroun, la situation est catastrophique.
L’inflation carcérale et les alternatives
A la mi-2002, selon les chiffres de l’Icps, le Cameroun ne disposait que de 67 établissements pénitentiaires pour une population carcérale totale de 20 mille. Des chiffres qui font froid dans le dos et qui permettent de mieux comprendre pourquoi des familles et proches de détenus parlent de “mouroir” quand ils rapportent ce que leur disent ceux des leurs qui croupissent derrière les barreaux. “Ici, raconte un ancien prisonnier qui vient de passer 4 ans à la prison de New-Bell à Douala, il est fréquent de trouver une centaine de détenus dans une cellule d’à peine 40 mètres carrés.”
Cette inflation carcérale qui est l’une des causes de la situation explosive des prisons dans le monde, rejoint deux autres explications : “la banalisation de la détention provisoire et l’augmentation de la durée des peines prononcées”, souligne le rapport de l’Icps. Du coup, plusieurs pays ont tenté de trouver des alternatives avec des fortunes diverses. L’Allemagne a ainsi opté pour une baisse sans précédent du nombre des détenus, alors que la France, il y a quelques années, a préféré construire de nouveaux établissements pénitentiaires. Dans le premier cas, il n’y a pas eu de recrudescence de la criminalité. Dans le cas de France, l’objectif visé par la construction de nouvelles prisons pour désengorger les plus anciennes est un échec incontestable. Puisqu’elles ont fini par être aussi surpeuplées que les précédentes.
Reste la solution pour le moins contestable adoptée par le gouvernement camerounais, début juillet 2004, et mis en service par le ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation : créer une prison principale à Yaoundé, la capitale du Cameroun, pour décongestionner les 10 prisons centrales que compte le pays. Car, il ne suffira probablement pas de déplacer quelques dizaines de prisonniers du centre vers les régions périphériques pour trouver, comme par miracle, la solution au casse-tête que représente la question des prisons dans le pays. Casse-tête qui relève aussi du fait que la justice prononce les peines et c’est l’administration pénitentiaire qui gère les prisons. On n’est pas très éloigné du système des lois d’exception du début des années 60.
Chiffres sur le Cameroun
Population totale incarcérée (mi-2002) 20.000
Taux de détention (31-12-93) 49,2%
Nombre total d’établissements pénitentiaires (mi-2002) 67
Taux de densité carcérale 296,3%
Sources : Icps
par le messager
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