Ils sont deux jeunes Camerounais à qui un Allemand d’origine camerounaise vivant en Allemagne avait promis contre de fortes sommes, un test de recrutement dans une équipe d’élite à München en Allemagne. Depuis lors, ces deux Camerounais sont devenus des clandestins en Allemagne. L’enquête de Camer.be.
Ce mercredi 5 décembre, il est précisément 11 heures quand nous arrivons à la rue Heiliggeitstraße à München. Nous nous dirigeons directement au numéro de l’appartement reçu d’une source qui a requis l’anonymat. Sur la sonnette de cet appartement, il n’ya pas de nom mais nous essayons tout de même d’appuyer sur l’une d’elle et nous tombons par surprise sur deux Camerounais, venus en Allemagne dans le but de poursuivre leur carrière de footballeur.
Ils occupent une chambre de moins de 10m2. Elle n’en est que de nom. Si on enlève le vieux matelas gracieusement offerte par la gestionnaire d’une maison de pensionnaires de la rue, il ne restera que des planchers dénaturés par endroit. L’on découvre ici et là dans la même pièce deux couettes leur servant de couverture en cette période hivernale. Il ya là aussi une fenêtre, heureusement fait en double vitrage qui ne se ferme pas à fond. Sinon, cette chambre ne répond pas aux critères requis pour être utilisée comme lieu d’habitation. Dans cette pièce, les vêtements et le matelas se disputent de la place, sans oublier la présence de leurs occupants.
Partis de Douala depuis le mois de février 2005 et abandonnés à München ces deux Camerounais vivent là depuis leur arrivée en Allemagne. C’est après plusieurs mois que le propriétaire de l’immeuble, retraité de son état était venu récupérer le loyer au Camerounais qui occupait la pièce pour le stockage de ses vêtements de friperie. Mais à sa surprise, arrivé sur le lieu il a plutôt rencontré deux personnes qui squattaient dans cette chambre. Coincés, les deux squatteurs étaient ainsi obligés d’exposer à ce retraité Allemand le calvaire qu’ils vivent depuis des mois.
C’est que Jonathan K et Etienne A, étaient avec d’autres jeunes élèves en formation dans un centre de formation en football de Douala. Ils y rêvaient de devenir, des footballeurs professionnels. Un jour de Novembre 2004, ils sont contactés par un certain Monsieur P. Edwin, homme d’affaire, propriétaire d’un grand magasin de friperie dans un marché de Douala disait-il. En autre activité que cet homme d’affaire annonçait, il était secrétaire d’une équipe d’amateurs en Allemagne. Ce qui se révélera n’être en réalité qu’un titre nécessaire à ce dernier pour escroquer ses clients au niveau du Cameroun.
Le prix d’inscription dans son équipe est de 3000 € (+ou – 2 millions de franc CFA). L’offre est vraiment alléchante et suscite un grand engouement de la part des parents des jeunes qui rêvent d’une carrière de football professionnelle de leur progéniture. : «En Allemagne, vous allez rencontrer plusieurs footballeurs Camerounais. Vous aurez aussi l’occasion de rencontrer en Espagne Eto’o Fils, Idriss Carlos Kameni, etc.», leur dit-il en substance.
Au pays de Roger Milla, l’évocation du nom des jeunes stars évoluant dans les championnats européens fait fortement effet. Les jeunes enfants informeront leurs parents qui sont dès lors prêts à tout, pour envoyer leurs rejetons en Allemagne.
Les parents contactés avaient fait des pieds et des mains à Douala pour rassembler les millions exigés cash un mois avant toute négociation. Le papa de Jonathan a pu vendre sa palmeraie située à Maleké, localité proche de Souza pour réunir la somme requise.
Ce sont les parents d’Etienne et de Jonathan qui réuniront à temps le sésame. En bon «frappeur», M. Edwin ne souhaitant pas mettre longtemps à Douala pour attendre que les autres réunissent les sommes exigées, prendra dès le 3 décembre 2004, les passeports de ces deux jeunes. Monsieur Edwin avec la complicité de son épouse en Allemagne vont s’activer à constituer les dossiers de demande de visa de ces deux « chanceux ». En janvier 2005, il ira à l’ambassade de l’Allemagne et trois semaines plus tard, ces deux jeunes vont obtenir leur visa d’entrée en Allemagne
Les deux jeunes partiront du Cameroun le 15 février 2005 après avoir organisés respectivement une grande fête au niveau de leurs familles respectives.
Arrivés en Allemagne, Edwin ira en compagnie de son épouse les loger à München qu’il présente comme étant la chambre dans laquelle il loge les nouveaux joueurs en attendant qu’ils soient intégrés dans son équipe.
Les jeunes ne verront jamais la couleur des gradins, ni d’une pelouse, ni pendant le premier mois qu’ils passeront à München, ni pendant tout leur séjour jusqu’à leur rencontre fortuite dans un supermarché du coin avec un jeune Camerounais, étudiant installé à München depuis des années. Ils perdront par la suite les traces de cet étudiant.
Leur calvaire ne s’arrête pas là.
Au mois de mars 2005, Edwin reviendra dire aux deux jeunes que son équipe ne recrute que les jeunes de 14 à 15 ans. Or les jeunes venus fraîchement du Cameroun avaient à leur arrivée en moyenne 17 ans chacun. Poursuivant à abuser de la naïveté des enfants, il leur annonce qu’il va affilier lui-même son équipe en division d’amateurs.
M. Edwin qui avait pourtant donné les assurances aux parents de ces mineurs au départ du Cameroun qu’il veillera bien sur leurs enfants ne les a jamais recontactés pour au moins les informer de la mésaventure de leurs rejetons sources de l’aboutissement de leurs rêves. Il a préféré, curieusement pour un escroc, les garder jusqu’au jour où le propriétaire de la chambre qu’ils occupaient à München soit mis au parfum de l’arnaque.
Au moment où nous allions sous presse, nous avons appris par notre source en Allemagne que les deux jeunes projettent de quitter l’Allemagne avant la fin de ce mois pour un autre pays européen.
Selon l’enquête de Camer.be Monsieur Edwin n’est pas à la première tentative d’escroquerie. Il a également bénéficié de nombreuses complicités, aussi bien actives notamment en Allemagne qu’au Cameroun. Comment expliquer le fait que ce dernier puisse obtenir aussi facilement des autorités consulaires allemandes des visas d’entrée à des mineurs sans s’être assurés de l’authenticité des documents fondant l’objet du voyage en Allemagne ? Comment expliquer le fait que les parents soient floués en un laps de temps, surtout que nous savons que l’argent devient de plus en plus rare au Cameroun ? Que pense Monsieur Edwin de l’avenir de ces jeunes abandonnés dans la nature moyennant des sommes trébuchantes et sonnantes ? Quant aux parents au niveau du Cameroun et même ailleurs, nous ne pouvons que leur conseiller de garder la tête haute face à ce nouveau coup bas et surtout, souvent remuer mille fois ses méninges avant de s’engager dans toute initiative.
Source : Camer.be
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