Rechercher
Rechercher :
Sur bonaberi.com   Google Sur le web Newsletter
S'inscrire à la newsletter :
Bonaberi.com
Accueil > News > Société
Ngaoundéré, une autre ville poubelle
(05/02/2007)
La cité ploie sous les ordures. Entre le maire et ses citadins, le divorce est consommé.
Par Georges Alain Boyomo

“ Nous vivons dans des poubelles voilà bientôt trois ans. C’est à se demander s’il y a encore un maire dans cette ville. ”, déplore un enseignant. Derrière la quincaillerie Fokou, où s’étalent à perte de vue des ordures, des odeurs nauséabondes se répandent. Les mouches en profitent pour se déployer en véritables flottilles. Une fois à la hauteur de cette plaine d’immondices, les passants pressent vigoureusement le pas.

Les riverains, quant à eux, subissent, la mort dans l’âme, ces odeurs pestilentielles. “ J’ai déjà été dans plusieurs villes du Cameroun. J’ai très rarement vu des poubelles comme ici à Ngaoundéré. Pour que je m’installe à cet endroit, j’ai payé plus de 20.000 Fcfa à des gars du quartier pour qu’il me dégage les tas d’ordures qu’il y avait ici. A ma grande surprise, des agents de la commune sont venus dernièrement m’exiger le paiement des taxes. Nous sommes obligés d’être ici parce que nous cherchons notre pain quotidien ”, raconte Jean-Pierre, un ferrailleur.

Dans l’environnement immédiat de cette poubelle, l’on retrouve aussi le siège local de l’Eglise évangélique luthérienne du Cameroun, la délégation provinciale du Ministère des petites et moyennes entreprises, de l’économie sociale et de l’artisanat ainsi que des établissements scolaires et hôteliers. “ Le responsable de Relais hôtel s’est plus d’une fois aperçu de l’influence néfaste de ce dépotoir sur sa clientèle, rien n’y a fait.

Les enfants qui fréquentent les établissements ici ingurgitent toutes ces odeurs. Si ces ordures étaient tout au moins hors du centre ville, ç’aurait été acceptable. ”, fulmine “ Mami Thérèse ”, une commerçante.

Entre les quartiers Baladji 1 et 2, une immense poubelle a envahi la voie publique. Chaque jour, elle grandit au nez et à la barbe des riverains. “ Vous constatez vous-même qu’il y a déjà un mur de Berlin d’ordures entre les deux quartiers. Pour aller de l’autre côté, il faut le contourner. ”, révèle Jacques, un voisin du dépotoir. Autre lieu, autre désastre. Quartier Sabongari, à quelques mètres de l’Ecole franco-arabe, de l’Ecole publique locale et du service d’hygiène et d’assainissement de la Commune urbaine, une gigantesque montagne d’immondices pourrit l’atmosphère. L’on se demande où les résidents fourrent leurs nez pour ne pas étouffer. Dans la même zone, des restaurants fonctionnent devant des bacs submergés d’ordures au mépris des risques de maladies.

Ainsi, dans la cité capitale de l’Adamaoua, il est plus que difficile de faire l’arithmétique des poubelles tant elles pullulent. Les habitants sont contraints d’incendier ces silos d’ordures faute de voir les services de collecte et de ramassage se déployer.

Inertie et amitiés avec Marafa Hamidou Yaya

De sources concordantes, c’est depuis 2004 que la ville de Ngaoundéré vit le calvaire des ordures abandonnées dans des espaces publics. “ Au début de son mandat, le maire El Hadj Yaya Djidji faisait un effort dans le sens de l’enlèvement des ordures. Bien après, il a sombré dans une inertie inqualifiable et surtout un enrichissement suspect ”, confie une source. Au cours d’une réunion de remobilisation de militants Rdpc de la Section Vina Sud tenue la semaine dernière en vue des prochaines consultations électorales, Yaya Djidji par ailleurs président de la section sus-évoquée, a reconnu que l’hygiène et la salubrité publiques sont de lointains souvenirs pour la ville.

“ Les engins de la Commune sont en panne. Nous attendons le soutien du gouvernement et nous comptons signer une convention avec la société Hysacam. ”, a-t-il argué.

Ce qui n’apaise pas le ras-le-bol des citadins. Ils ne comprennent pas le contraste entre le goût immodéré du maire pour les belles voitures ainsi que les voyages à l’étranger, et la décrépitude de leur ville. “ On aperçoit les camions de la Commune quand il faut transporter des call box ou pour des travaux privés. Jamais pour l’enlèvement des ordures. ”, s’offusque l’un d’eux. Du fait de ces manquements, le maire est tout simplement vomi par la majorité de ses concitoyens. Lors de certaines cérémonies officielles, l’édile de Ngaoundéré est souvent hué lorsqu’il prend la parole.

“ Nous ne voulons plus de lui, car il a échoué sur toute la ligne. A notre grand étonnement, il a été élu meilleur maire du Cameroun l’an dernier par l’Association des maires du Cameroun. Il a dû jouer de son amitié avec Marafa Hamidou Yaya. En tout cas, c’est une imposture qui ne nous émeut pas. ”, soutient l’un de ses irréductibles critiques.

Au service d’hygiène et d’assainissement de la Commune, on est tout simplement désœuvré et désemparé : “ Nous avions 40 bacs à ordures portatifs et 7 bacs en béton. Tous les bacs portatifs sont rouillés. Les autres ont été ensevelis par les immondices. Sur les 8 camions que nous disposions, deux seulement fonctionnent. La collecte et le ramassage des ordures sont aléatoires.

L’engin à pelle mécanique de la mairie est en panne. Lorsqu’on ajoute à cela l’incivisme des populations et l’éloignement des décharges, situées au quartier nord-cifan, c’est normal qu’on soit dépassé par les évènements. ”, souligne Alhadji Mohaman Oumaté, le chef du service.

Le dépérissement croissant de la ville pousse à regretter le règne de Mohaman Toukour, le maire Undp de Ngaoundéré entre 1997 et 2002. “ En son temps, la salubrité publique était de mise. C’est dommage que sous le Rdpc, tout se soit autant dégradé ”, lance un habitant du quartier Joli soir. Au service d’hygiène, un brin nostalgique, on avoue à mots voilés que les choses allaient bien auparavant. “ Nous consacrions trois jours pour ramasser les ordures, les autres jours pour combler les nids-de-poule dans toute la cité. Nous avions même fait un déplacement en Italie pour envisager le traitement des ordures. ”

Redoutant le vote sanction des électeurs et surtout un nouveau basculement de la Commune urbaine dans la ville-château d’eau du Cameroun, l’élite locale du Rassemblement démocratique du peuple camerounais, notamment le ministre Baba Hamadou, Hamadjoda Hadjoudji, le trésorier du Rdpc et le député Ali Bachir ont publiquement remonté les bretelles au maire le 6 novembre dernier à l’occasion des 25 ans du Renouveau. “ Les électeurs nous jugerons. ”, avaient-t-ils prédit.

Les prochaines consultations s’annoncent en réalité difficile pour le maire sortant, car en dehors de l’insalubrité, la ville connaît des problèmes d’éclairage public et de voirie urbaine. Attendue comme une pluie en saison sèche, la construction de l’hôtel de ville est renvoyée aux calendes peuhles.

Le malheur des uns …

Outre les bestioles et autres animaux qui profitent de la prolifération des poubelles pour se garnir les panses plusieurs fois au quotidien, de bonnes affaires se font autour des dépotoirs de Ngaoundéré. Des camionneurs de la Commune urbaine s’y approvisionnent régulièrement en engrais qu’ils vendent à prix d’or aux éleveurs locaux. Les riverains de ces milieux souvent pestilentiels y ramassent aussi de la nourriture pour les cochons qu’ils élèvent à proximité de leurs concessions.

A la recherche d’objets en fer, certains ferrailleurs fouillent aussi dans ces immondices. Même les écoliers riverains et les détraqués sont aussi fréquents dans le coin. Les uns à la recherche des déchets plastiques pour en faire des ballons de baudruche en toute insouciance. D’autres, leurs pitances quotidiennes.



Source: Le Messager


Partager l'article sur Facebook
 
Discussions Discussion: 0 bérinautes ont donné leur avis sur cet article
Donnez votre opinion sur l'article, ou lisez celle des autres
Sur copos Sur Copos
Les vidéo clips Les vidéos clips
Récents Récents


Accueil  |  Forum  |  Chat  |  Galeries photos © Bonaberi.com 2003 - 2025. Tous droits de reproduction réservés  |  Crédit Site