Comment les Chinois fragilisent l’économie camerounaise
(31/01/2007)
Un rapport d’étude de la Fondation Friedrich Ebert accuse l’Empire du milieu. Et met en évidence le manque d’intérêt des Chinois pour l’environnement du Cameroun.
Par Thierry Ndong
1- Périls sur la coopération
“ La coopération Chine-Cameroun pourrait à terme rater son objectif salutaire de réduction de la pauvreté qui fait pourtant partie d’une des motivations premières ayant incité l’établissement de cette coopération ”. Cet extrait de conclusion d’une étude d’analyse des incidences de l’ouverture du Cameroun à la Chine tire la sonnette d’alarme sur la nature de la coopération entre les deux pays. Les résultats de l’état des lieux de la coopération économique et commerciale sino-camerounaise mettent en effet en exergue un rapport de forces en défaveur du Cameroun. Illustration dans le domaine des échanges économiques et commerciaux. La valeur des importations de la Chine vers le Cameroun sont allés crescendo depuis 2001 (34 millions de Fcfa), jusqu’en 2004 (67 milliards de Fcfa), en passant par 2002 (45 milliards Fcfa). En retour, les exportations du Cameroun à destination de la Chine stagnent respectivement à près de 21 et 20 milliards en 2003 et 2004. “ Que ce soient en 2003 ou en 2004, la balance commerciale entre la Chine et le Cameroun a été largement déficitaire pour le Cameroun et bénéficiaire pour la Chine ”.
Les importations de la Chine au Cameroun portent essentiellement sur des produits finis, prêts à la consommation. A en croire l’étude, sur le marché national, les importations des produits chinois fragilisent dangereusement les secteurs d’activités économiques tels que le petit commerce : vente de la lingerie féminine, la bonneterie, la confiserie, la biscuiterie, la poterie artisanale, l’industrie de fabrication des chaussures plastiques et le commerce des motos et bicyclettes. Les exportations camerounaises par contre portent essentiellement sur les grumes. Une matière première qui fait l’objet de transformation en Chine. Ce qui est de nature à créer des emplois en Chine et partant à donner une certaine dynamique à l’économie locale chinoise.
2- Opérations financières contre-productives
Les activités commerciales des ressortissants de la Chine au Cameroun permettent, au regard de la valeur en francs Cfa des importations, une mobilisation des sommes importantes d’argent. Malheureusement, indique l’étude sus mentionnée, les sommes d’argent mobilisées par la partie chinoise sont immédiatement transférées dans les banques chinoises via les opérations de Western Union. “ Une des banques locales qui joue un rôle primordial dans ce flux monétaire est la Standard Chartered Bank. L’étude a permis de constater que les fonds très souvent déposés par la population chinoise du Cameroun ont un séjour assez court (pas plus de 6 mois) dans les banques locales. Ce qui fait que les fonds collectés par les Chinois à travers leurs opérations commerciales ne rentrent plus dans le circuit monétaire national entraînant la raréfaction de la monnaie dans le pays ”.
3- Relation à sens unique
Le rapport indexe par ailleurs l’appui de la Chine au développement du secteur privé camerounais. En effet, la création au Cameroun des entreprises en joint-venture entre le secteur privé chinois et camerounais est incriminée. Les deux projets (entreprises de rechapage des pneus et de fabrication de motoculteurs) financés à hauteur de 7 milliards de f Cfa par Exim-Bank Chine sont au plus mal. Le constat fait dans l’étude met en évidence le mauvais fonctionnement desdits projets. Les difficultés relevées sont de plusieurs ordres : le partage inéquitable des responsabilités dans l’exécution du projet ; le suivi insuffisant de l’exécution des projets par la partie camerounaise ; la mauvaise compréhension et par conséquent la mauvaise interprétation des clauses de partenariat par la partie chinoise et la partie camerounaise ; le peu de maîtrise par la partie camerounaise du fonctionnement des mécanismes de financement de ses partenaires chinois ; l’existence de nombreuses imprécisions voire des non-dits dans le contenu des accords de partenariat ; l’absence dans l’étude de faisabilité de l’analyse des facteurs essentiels à la viabilité des projets ; l’absence d’un juge neutre désigné pour l’arbitrage des éventuels conflits entre les deux parties.
Quant à la maintenance technique assurée par la Chine dans le cadre des accords de coopération, “ il ressort des entretiens sur le mode d’exécution des différents projets que la partie chinoise conduit seule les opérations de mise en place de ceux-ci. Par ailleurs, la main d’œuvre et le matériel utilisé sont majoritairement sinon totalement importés de Chine. La partie camerounaise joue simplement un rôle de supervision et de contrôle du respect des normes convenus dans les traités ”.
* Article publié dans le Messager du 25 août 2005, mais toujours d’actualité.
Sociabilité critiquée
La même étude met en exergue la condescendance démonstrative des Chinois du Cameroun envers les compatriotes de Paul Biya. Selon l’étude, les Chinois du Cameroun refusent de s’intégrer socialement et culturellement dans leur pays d’accueil. Ils y vivent presque en vase clos. Avec le mode de vie chinois. Ils habitent ensemble, généralement dans un immeuble réquisitionné pour les besoins de la cause. Il n’y admettent pas de Camerounais et ne font aucun effort pour apprendre les langues du pays. C’est dire si les Chinois du Cameroun se considèrent comme en “ bref séjour d’affaires ” au Cameroun.