Le grand carrefour Ekounou à Yaoundé a connu une ambiance particulière hier, mercredi 20 septembre, en matinée. Des militaires de rang, une centaine au total, conduits par un lieutenant d’armée non encore identifié ont débarqué au commissariat du 14ème Arrondissement, où ils se sont rués sur les sept policiers présents au poste. Le bilan de cette expédition punitive est lourd : cinq policiers grièvement blessés, et un préjudice énorme porté sur la dignité du corps de la police. Après cet incident, les policiers ont subi, toute la journée durant dans ce quartier chaud de la capitale, les moqueries des habitants.
Selon des sources policières, l’affaire remonte à la nuit du mardi 19 au mercredi 20 septembre. "Un taxi a été interpellé par une patrouille de police vers 22 heures. Pendant le contrôle, les éléments de la police ont constaté que le taxi transportait des objets d’origine douteuse, et ont demandé que les différentes factures soient présentées. Après quelques heures d’échanges, un homme en civil se présentant comme un sergent de l’armée de terre s’est montré et a déclaré que la cargaison était à lui. Après beaucoup de bruits, les policiers ont demandé qu’il s’en aille avec le taximan", relate un inspecteur de police rencontré au commissariat du 14ème Arrondissement.
Malgré cette volonté des policiers de libérer les objets soupçonnés, le militaire estime qu’on lui a perdu du temps ; il stationne lui même son véhicule dans l’enceinte du commissariat ; il en fait de même pour le taxi transportant ses marchandises. "Il a passé la nuit au commissariat en se couchant sur le siège de son véhicule. Très tôt le matin, il a fait appel à je ne sais qui. Et quelques heures après, alors que les policiers ayant passé la nuit au commissariat étaient déjà rentrés, un camion militaire a stationné devant le commissariat. Plus de cent militaires conduits par un lieutenant sont descendus et ont surpris les sept policiers qui étaient au poste", se souvient le policier.
Récurrence
Dans cette ambiance, des moto taximen et autres vendeurs à la sauvette ont aussitôt accouru, pour apporter leur soutien aux militaires. Les pauvres policiers, qui viennent de prendre le service, vont donc payer les pots cassés. "la bagarre n’a durée que sept minutes, une femme militaire a tellement tapé une policière qu’elle a perdu connaissance. Les policiers, devant le nombre des assaillants, ont voulu fermer le portail, mais les militaires escaladaient la barrière", se souvient un témoin. A l’heure qu’il est, les cinq policiers blessés sont internés au centre médical de la police situé dans l’enceinte de l’Ecole nationale supérieure de police de Yaoundé.
Les policiers, devant la récurrence de ce genre d’attaque, envisagent d’observer une grève dans les prochains jours. Si aucune décision d’envergure n’est prise à l’encontre des militaires à l’origine de cette agression sauvage. "Même si les autres se désolidarisent, nous allons l’engager ici, car il est inadmissible que des gens viennent nous attaquer jusqu’à notre bureau sans aucun égard. S’il y avait des armes ici, les choses ne se seraient pas passées comme cela", grogne furieux un policier du commissariat attaqué. Après cet incident, un colonel de l’armée de l’air dont le nom n’a pas été révélé se serait par la suite rendu au lieu de la rixe, pour s’enquérir de la situation.
Ce n’est pas la première fois que des attaques de ce genre ont lieu à Yaoundé. Il y a quelques semaines seulement, une escouade de militaires avait débarqué à Mvog-Mbi, molestant sérieusement un officier de police. Son crime : avoir interdit à un militaire en civil d’uriner derrière le poste de police construit en matériau provisoire. Peu avant cela, c’est le commissariat de Nkoldongo qui avait reçu la visite punitive de ces militaires déchaînés. Ils sont pratiquement devenus des loups pour les policiers qu’ils n’hésitent pas à molester à la moindre occasion. Pourtant, “ nul n’est au-dessus de la loi ”, rappelle une victime policière.
Liste des blessés
1-Talla
2-Leukoa
3-Ngouelet
4-Mbida
5-Voundi
Tous sont inspecteurs de police en service au commissariat du 14ème Arrondissement à Ekounou
Source : Le Messager
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