L’accord signé le 12 juin 2006 à Greentree (Etat de New-York), entre le président Paul Biya du Cameroun et Olusegun Obasanjo du Nigeria, sous la médiation du secrétaire général des Nations unies Kofi Annan ouvre, enfin, la perspective d’un retrait définitif du Nigeria de la presqu’île de Bakassi. Dans l’immédiat, c'est-à-dire d’ici le 12 août et, au plus tard le 12 septembre 2006, les troupes nigérianes postées à Bakassi doivent vider les lieux. Le Cameroun, en assumant sa pleine souveraineté sur ce morceau de territoire devra y garder des effectifs militaires, non plus dans une logique de belligérance, mais dans un esprit de sauvegarde de son intégrité territoriale.
L’accord de Greentree constitue donc une “ avancée décisive ” dans le processus de résolution pacifique d’un conflit frontalier, a affirmé Kofi Annan. Paul Biya du Cameroun souligne, pour s’en féliciter que cet accord contient “ des garanties juridiques sérieuses ”. Le président nigérian Olusegun Obasanjo, à travers la poignée de main servie à Paul Biya le 12 juin sous les acclamations des représentants de certaines grandes puissances (Mme Jackie Sanders des Etats-Unis, Gunter Pleuger de l’Allemagne, Michel Duclos de la France, Karen Pierce du Royaume-Uni de Grande-Bretagne) affiche son adhésion à cet accord. Cet instrument complémentaire à l’arrêt de la Cour internationale de justice (Cij) du 10 octobre 2002 a l’avantage de porter la signature des deux chefs d’Etat. Il se révèle dès lors comme l’expression de leur volonté personnelle à vider le contentieux avant la fin de leurs derniers mandats respectifs. Olusegun Obasanjo semble particulièrement tenir à sa crédibilité internationale. Au cours de l’audience que lui a accordée le secrétaire général des Nations unies, peu avant la tripartite solennelle, Olusegun Obasanjo a indiqué à Kofi Annan que cet accord devrait “ représenter un modèle de résolution des conflits en Afrique et dans le monde ”. Sans tomber dans un “ optimisme béat ”, comme le relevait le 12 juin Paul Biya, le respect scrupuleux des engagements pris à Greentree met en jeu, aussi bien la crédibilité du Nigeria et du Cameroun que celle des Nations unies et, plus singulièrement celle de Kofi Annan qui arrive en fin de mandat en décembre prochain.
Des partenaires soucieux
“ La patience, la ténacité, la souplesse et la sagesse ”, souligne Kofi Annan, qui ont caractérisé Biya et Obasanjo tout au long des quatre dernières années ont porté des fruits. 460 km de frontières ont déjà été démarqués. Des transferts de souveraineté ont eu lieu sur une quarantaine de villages dans la zone du lac Tchad. Il reste maintenant l’ultime phase de la démarcation dont le préalable est le retrait annoncé des troupes nigérianes de la presqu’île de Bakassi. Cette mesure de confiance constitue un engagement irréversible. La communauté des bailleurs de fonds pour cette opération de démarcation entend s’assurer que les fonds investis ont effectivement produit la paix (1,8 millions de dollars du Royaume-Uni, 300 000 euros de l’Union européenne qui promet encore 4 millions de dollars, 238 000 dollars du Canada). Le Cameroun et le Nigeria ont mis chacun 3 millions de dollars dans cette cagnotte de la paix… pour marquer leur volonté politique.
L’accord de Greentree est présenté comme la “ fin du conflit frontalier entre le Cameroun et le Nigeria ”. Les deux mois qui suivent sont tout aussi longs et délicats que les douze années déjà écoulées depuis le déclenchement des hostilités en 1994. Olusegun Obasanjo aura le mérite de ne plus reculer face à une communauté internationale qui rêve d’une région du Golfe de Guinée pacifique et riche de ses 24 milliards de réserves de barils de pétrole.
Source: Le Messager
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