L’interview accordée à Rfi par la championne olympique du triple saut dimanche dernier mérite qu’on s’y attarde.
On est en effet un peu gêné par les propos de Françoise Mbango. Certes, on ne peut pas ignorer qu’elle a passé des moments insoutenables avant et pendant les Jeux olympiques d’Athènes où, presque miraculeusement, elle a décroché la médaille d’or dans sa discipline. Abandonnée à elle-même, elle n’a pas eu l’opportunité de s’entraîner dans les conditions optimales, se contentant du coup de main de sa petite sœur Essepo Hélène et de l'ex-entraîneuse nationale des sauts du Cameroun, Ariane Bissick. En son temps, nous avons dénoncé la façon calamiteuse avec laquelle le gouvernement avait préparé cet évènement grandiose. Nous l’avons soutenue dans la galère qu’elle a vécue, célébrant au passage sa bravoure.
Peut-on aujourd’hui dire, qu’aucune reconnaissance n’a été manifestée à son égard après cet exploit qui a permis aux couleurs du pays de flotter dans le ciel d’Athènes le 23 août 2004 ? En confiant sa colère à Rfi, elle indique clairement que rien n’a été fait pour récompenser ses efforts. La jeune femme de 30 ans est amère : “ on m’a promis beaucoup de choses ouvertement […]. Eux-mêmes savent ce qu’il en est aujourd’hui […]. Il y a malheureusement certaines vérités qui ne sont pas toujours très bien à mettre au grand jour, parce que ça risque non seulement décevoir, mais décourager beaucoup de jeunes […]. J’ai été beaucoup désolée ”, affirme-t-elle, restant muette sur la mobilisation et l’attention dont elle a été l’objet de la part des autorités. Pour avoir suivi cette athlète capricieuse qui nous a séduit par son talent et son abnégation pendant cette période en or, nous sommes en mesure de dire qu’elle fait preuve de mauvaise foi dans son entretien avec Rfi.
Pluie de millions…
Au-delà du pactole perçu (1,5 million Fcfa) pour refaire sa garde robe dans la perspective de la cérémonie de décoration par le chef de l’Etat, Françoise Mbango, qui a été accueillie en fanfare à son arrivée à Yaoundé en septembre 2004, ne peut pas nier avoir déchargé 25 millions Fcfa le 8 décembre 2004 auprès du directeur des Affaires générales du ministère des Sports, au titre des frais accordés par le Premier ministre pour la médaille d’or des J.O d’Athènes. L’honnêteté commande qu’elle reconnaisse également avoir été logée dans une suite au Mont Fébé du 8 septembre 2004 au 11 février 2005 par l’Etat. Sa sœur cadette a eu droit à une chambre simple. De sources proches de cet établissement hôtelier, elles y ont laissé une ardoise de 24. 521 880 Fcfa et 13. 738 950 Fcfa respectivement (soit au total 38 260 830 Fcfa), dont plus de 13 millions de frais de téléphone ! Cette facture fait d’ailleurs encore l’objet d’un contentieux entre le Mont Fébé et le Minsep, régulièrement sommé de la régler. Pendant la même période, l’Etat devait faire face à une ardoise de 26 millions Fcfa pour la location de la Mercedes de la championne olympique, en attendant l’achat de la Prado promise par le président de la République. Ce véhicule luxueux lui avait été remis au cours d’une cérémonie officielle au Minsep. Devant les caméras des télévisions nationales. Au vu et au su de tous…Françoise Mbango, selon des sources crédibles, a bénéficié d'autres largesses officielles dont celles du président Biya, connu comme un spécialiste de la récupération politique des résultats positifs de nos sportifs. Point besoin de revenir sur l'appui financier des sponsors et mécènes camerounais.
Prime spéciale à problèmes
Le nerf de la frustration semble être la difficulté pour Françoise Mbango d’entrer en possession de la prime olympique de 80 millions Fcfa également décidée par le chef de l’Etat. Cette somme devrait lui permettre de se préparer pour les Jeux olympiques de 2008 à Pékin, à raison de 20 millions Fcfa par an. Ses propos laissent entendre que cet argent aurait pris des destinations floues. Difficile en tout cas de comprendre les blocages qui l’empêchent d’en jouir, alors que les 80 millions en question ont été inscrits au budget du Minsep. De sources crédibles ici confirment que l’athlète n’a jamais touché un centime de cette prime spéciale. Elles précisent toutefois que l’argent est à disposition, la bénéficiaire devant simplement se soumettre à certaines conditionnalités. On croit en effet savoir que la bourse ne devait pas être remise en mains propres comme se font la plupart des paiements dans le milieu. Il lui avait été demandé de donner les informations complètes sur son domicile et son lieu d’entraînement, afin de faciliter les procédures de virement utiles à sa prise en charge effective dans le cadre de la préparation des prochaines olympiades.
L’interview de Françoise Mbango à Rfi survient au moment où le Minsep et la Fédération camerounaise d’athlétisme étaient sans nouvelles de la star depuis plusieurs mois. Ces deux structures gagneraient à renforcer leur politique de communication, pour favoriser une meilleure circulation de l’information et anticiper sur ce type d’événement. Si elle décide en définitive de se lancer dans les études en communication ou marketing comme elle le dit, Françoise Mbango, qui attendrait un bébé (Cf. Mutations du 10 mars 2006), pourrait sans doute leur être utile…Nous ne désespérons pas d'entrer en contact avec la triple sauteuse pour avoir quelques détails sur la philosophie qu'elle développe et, éventuellement ses réponses à ces chiffres qui semblent trahir son discours.
Source : Le Messager
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