Deux chiffres ont plané avec insistance sur les débats des 400 experts, ministres, enseignants et bailleurs de fonds, réunis de lundi à vendredi à Libreville pour la 6e Biennale de l'éducation en Afrique. Sur 100 élèves, seuls 60 parviennent à terminer leur cycle primaire et surtout, à peine 30 maîtrisent réellement les apprentissages fondamentaux.
"L'Afrique a fait des efforts considérables pour élargir l'accès à l'éducation mais ce mouvement ne s'est pas accompagné des mêmes efforts en termes de qualité", résume l'ancien ministre sénégalais Mamadou Ndoye, secrétaire général de l'Association pour le développement de l'éducation en Afrique (ADEA), organisatrice de la Biennale.
Comme l'on souligné à l'envi tous les intervenants, les causes de cet échec sont multiples. Certaines sont clairement identifiées, de la mauvaise formation des enseignants au manque de matériel pédagogique, en passant par la faiblesse des ressources affectées à l'éducation par les Etats.
Certaines sont évidentes. "La pauvreté, qui ne permet pas à une large part de la population de payer les droits de scolarité, le sida, qui décime le corps enseignant, les conflits, la mauvaise gouvernance constituent des obstacles à un enseignement de qualité", rappelle Françoise Caillods de l'Unesco.
D'autres enfin sont liées à l'héritage colonial. "Beaucoup d'enfants ne découvrent la langue d'enseignement que lorsqu'ils entrent à l'école", relève la ministre namibienne déléguée à l'Education, Becky Ndjoze Ojo. "Les études montrent que les résultats des enfants sont bien meilleurs lorsque l'école est dispensée dans la langue maternelle".
Les solutions, elles aussi, sont connues. Les résultats prometteurs de nombreux projets ou expériences tentés aux quatre coins du continent ont été présentés tout au long de la Biennale de Libreville.
Au Malawi, la suppression des droits de scolarité a fait faire un grand bond aux inscriptions de nouveaux élèves, notamment parmi les plus pauvres. Au Mali et en Zambie, le taux de réussite des élèves scolarisés dans les écoles bilingues a progressé de façon spectaculaire.
Mais, de l'avis général, des efforts considérables doivent encore être accomplis pour commencer à redresser la barre, de la part des gouvernements africains comme des bailleurs de fonds.
"Nos Etats doivent s'engager plus et surtout mieux en faveur de l'éducation", estime Mamadou Ndoye. "Ils doivent déterminer ce qui est essentiel pour l'éducation. Aujourd'hui par exemple, les études le montrent, il est plus efficace d'investir dans l'achat de manuels scolaires que dans la construction de nouvelles écoles", poursuit-il.
Les partenaires au développement ont eux aussi été appelés à la mobilisation. Le volume d'aide nécessaire au développement du secteur éducatif en Afrique a été évalué à 7 milliards de dollars par an, mais seule la moitié est effectivement dépensée.
"Les bailleurs doivent comprendre qu'ils doivent s'engager à long terme pour améliorer la qualité de l'enseignement", juge M. Ndoye. "Si les enfants qui entrent à l'école primaire grâce à leurs efforts ne terminent pas leur scolarité et n'apprennent pas, ils gaspillent leurs ressources".
"J'espère que cette Biennale a été l'occasion d'une réelle prise de conscience", conclut le secrétaire exécutif de l'ADEA. "Il faut que tous les acteurs intègrent cette culture de la qualité".
|
