La célébration de la Journée internationale de la tuberculose vendredi dernier, a permis de constater que les patients sont souvent abandonnés à eux-mêmes.
De la célébration qui a eu lieu vendredi dernier à l’hôpital Jamot de Yaoundé, il ne reste plus aucune trace. Les alentours des pavillons ont été nettoyés et les malades ont retrouvé leur quotidien ponctué de longues journées, couchés sur des lits, entre prise de médicaments, quintes de toux régulières et rires gras. " La visite du ministre nous a rendu le sourire car on a eu le sentiment qu’on ne nous avait pas oublié ", déclare Martin Essama, interné au sein de l’institution hospitalière depuis quatre mois déjà. C’est en effet à l’occasion de la 13e Journée mondiale de la tuberculose que le ministre de la Santé publique, Urbain Olanguena Awono, s’est rendu à l’hôpital Jamot.
Le thème cette année au Cameroun était " halte à la tuberculose ". Occasion pour le Minsanté de visiter le nouveau pavillon haut-standing pour les malades et d’inviter chacun " à mettre la main à la pâte pour l’élimination de la maladie au Cameroun ". Il s’agit aussi d’éviter l’isolement des malades, qui touche une partie des patients internés. C’est le cas de Mireille G., 27 ans, internée depuis trois mois. D’une pâleur à faire peur, elle se balance doucement sur son lit, comme si elle se berçait. " Je n’ai pas eu de visites depuis des semaines. Ma famille m’a abandonné depuis que j’ai été internée et mon ami vient rarement. Mes proches me traitent comme si j’étais une pestiférée ", se lamente la jeune femme.
" Je développais la maladie sans le savoir. J’avais de fortes fièvres et je toussais fréquemment, avec parfois des douleurs à la poitrine. Je me sentais tout le temps lasse et j’ai perdu 5 kg en un mois. On m’a conseillé d’aller voir un médecin et on a détecté la maladie après un frottis ", poursuit Mireille G. d’une voix grasse, avant d’ajouter qu’elle meurt de faim, tout en se jetant sur les restes de nourriture de la veille, fruit des dons que les malades reçoivent chaque lundi et vendredi.
Lambert Noussi, a pour sa part eu plus de chance. Il est pratiquement guéri après sept mois d’hospitalisation et surtout, il peut pouvoir compter sur sa famille. " Ils ont toujours été là et n’avaient pas peur d’être contaminés. Bien sûr, ils prennent des précautions. En fait, les malades sont de moins en moins isolés, même si on ne les accepte pas encore vraiment", raconte-t-il. Son seul souci, comme pour beaucoup d’autres patients, est d’ordre financier. En effet, si on peut lire sur les portes des pavillons que " Les médicaments de la tuberculose sont gratuits ", le coût de l’hospitalisation semble trop cher pour certains. " L’internement ne coûte pas plus de 15.000 Fcfa pour deux mois. Je ne travaille pas et ma femme se " débrouille ". Ce n’est donc pas toujours facile de trouver l’argent nécessaire, surtout qu’il y a des examens à faire ", se plaint Martin Essama.
Selon les statistiques publiées par le Programme national de lutte contre la tuberculose (PNLT), on estime à 1,1% la progression annuelle de la maladie au Cameroun. Il existe, selon le Minsanté, 1500 nouveaux cas de malades chaque année alors que 50% de ces personnes décèdent 5 ans après la contamination. Au nombre des insuffisances dans la guerre contre la pathologie, on compte, outre la stigmatisation des malades, le retard dans le dépistage, la faible implication de la société civile, les difficultés des patients à respecter la durée du traitement. " Les perdus de vue constituent un talon d'Achille dans la lutte contre la tuberculose. Comme le traitement dure 8 mois, au bout de deux, quand certains patients vont mieux, ils fondent dans la nature. Ce qui peut causer des complications, comme la résistance aux médicaments ", explique le Dr Patrice Eloundou. Or, en cas de résistance, le traitement deviendrait mille fois plus coûteux, toxique et aléatoire.
Source : Cameroon Tribune
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