Joseph Tchoubet et Ndoko Landa, tout sourire, peuvent respirer un grand coup. Accusé de complicité de pratiques de sorcellerie et complicité de tortures, le directeur général de la Cecic a été jugé “ non coupable et relaxé pour faits non établis. ” Il devra néanmoins payer une amende de 25 000 Fcfa pour fait de violence conformément à l’article 370 du code pénal, du fait de la gifle infligée à Emmanuel Moutombi ainsi qu’il ressort des débats. Ndoko Landa, alias Gobina, le tradi-praticien, poursuivi pour pratiques de sorcellerie et complicité de tortures a, quant à lui, été reconnu “ non coupable et relaxé pour faits non établis ” par la cour. Le verdict de la cour, sur le même plan pénal, a consacré la condamnation, à des peines inégales, des gendarmes impliqués.
Anatole Banem, l’ex-commandant du groupement de gendarmerie du Wouri, écope ainsi de 10 mois de détention militaire tandis que l’adjudant-chef Menanga Ahanda, le chef de la brigade de gendarmerie d’Akwa-Nord où Emmanuel Moutombi, la victime, a été torturé, est condamné à 6 mois d’emprisonnement ferme. Le tribunal a disqualifié le chef d’accusation qui pesait sur eux, à savoir, “ tolérance aux attentats individuels” au profit de la “ violation des consignes. ” Les plus lourdes peines infligées par le tribunal vont à l’encontre des trois autres gendarmes, convaincus des actes de tortures avec “ circonstances atténuantes ”. L’enquêteur en chef, l’adjudant major Ndomo, avec 10 ans de détention militaire ferme est le plus sévèrement puni. Minkeng Djemba, présenté tout au long des débats comme le chef du “ laboratoire de la torture ” de la brigade d’Akwa-Nord encore appelé “ Golgotha ”, écope de 9 ans de réclusion tandis que le gendarme major Mbiakop (qui n’était plus loin de la retraite) s’en sort avec 8 ans d’incarcération.
44 millions Fcfa de dommages-intérêts
Sur la question des intérêts civils, le tribunal a débouté Mme Myriam Kamtchoum et 3 enfants, présentés respectivement comme la veuve et les fils de la victime dans leur action “ pour défaut de qualité. ” On se rappelle en effet que lors de l’avant dernière audience, mercredi 15 mars, le représentant du ministère de la Défense avait produit à la cour des certificats de non-conformité contre les actes de mariage liant cette Dame et Emmanuel Moutombi et 3 des 4 actes de naissance des présumés enfants de la victime. La cour a néanmoins reconnu la qualité de partie civile au père, à la mère, à 1 des 4 fils et aux 2 sœurs de Moutombi. Le montant des intérêts civils a été fixé à 44 millions Fcfa dont 37 millions pour les “ préjudices de carrière ” du défunt aux dépens de l’Etat, jugé civilement responsable de la mort de l’ancien directeur d’agence de la Cecic. La partie civile, dans ses conclusions demandait 493 millions au titre des dommages-intérêts.
Le sentiment de Maître Prosper Ndom Batat après l’énoncé du verdict est mitigé. “ Sur le plan pénal, la mise hors de responsabilité de Ndoko Landa et Joseph Tchoubet et la disqualification des faits imputés à Menanga Ahanda et Anatole Banem me déçoit. Je crains que, pour n’avoir pas retenu leur responsabilité pour les faits de torture, la justice elle-même n’ait pas donné un signal fort contre ce mal. Mon sentiment est que la justice au travers de ce procès, n’a pas permis à la société d’exorciser ses démons pour entrer de plain-pied dans la modernité ”, a-t-il expliqué au Messager.
A contrario, Maître Paul Tchuenté, le conseil de Joseph Tchoubet, se montre globalement satisfait. “ Mon client recouvre la liberté et c’est un juste retour des choses ”, se réjouit-il tout en regrettant l’amende de 25 000 Fcfa. Les parties ont 10 jours pour faire appel de la décision. Certains, déjà, ne faisaient pas mystère de leur intention de se servir de cette voie de recours, espérant ainsi, faire mieux entendre leur cause.
Le verdict d’hier met fin (provisoirement ?) à une longue procédure qui a duré plus d’un an. Elle faisait suite à la mort, en février 2005, des suites de “ tortures ” d’Emmanuel Moutombi après un séjour à la brigade de gendarmerie d’Akwa-Nord. La victime était accusée de distraction de 13 millions Fcfa des caisses de la Cecic par Joseph Tchoubet, le directeur général de cette structure de micro-finance qui l’employait en qualité de chef d’agence.
Source : Le Messager
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