Le ministre de la communication veut bénéficier des mêmes retombées que son homologue Grégoire Owona.
Une nouvelle page du feuilleton judiciaire sur l’homosexualité au Cameroun va s’ouvrir le 28 mars au tribunal de première instance de Yaoundé (Centre administratif). En effet, une citation directe, à la requête de monsieur Pierre Moukoko Mbonjo, professeur d’université demeurant à Yaoundé, a été servie mardi dernier à monsieur Dieudonné Mveng, directeur de publication du journal La Météo. Le plaignant, par ailleurs ministre de la Communication, estime avoir été mis en cause de façon diffamatoire dans l’édition n° 99 du journal La Météo ayant en titre “ Mœurs – Homosexualité au sommet de l’Etat ”.
La partie de la citation directe objet de la demande précise dans les détails les griefs formulés par Pierre Moukoko Mbonjo. “ Qu’en effet, celui-ci (ndlr le journal La Météo sus-mentionné) en page 7, dans un encadré intitulé : Galaxie du Cameroun a fait figurer en première position le nom et la fonction du requérant (Moukoko Mbonjo)… Cette Galaxie du Cameroun constituée des noms et fonctions de plusieurs membres du gouvernement dont ceux du requérant, d’un ancien ministre, d’un directeur de société d’Etat, d’un président d’une chambre consulaire et de deux artistes apparaît précisément comme la liste des “ Homosexuels au sommet de l’Etat…
Attendu qu’en publiant ainsi les noms et fonctions du requérant sur cette liste, le journal “ La Météo ” dont le directeur de publication est Dieudonné Mveng a sans aucune équivoque traité le requérant d’homosexuel… Ces faits complètement mensongers ont sciemment été écrits et publiés dans les conditions de l’article 152 du code pénal par le journal La Météo dans le dessein de porter atteinte à l’honneur et à la considération du requérant…
Qu’en lui imputant ainsi de tels faits inexacts qui concernent sa vie privée, l’auteur de ladite publication s’est rendu coupable du délit de diffamation prévu et réprimé par les dispositions des articles 74, 152 et 305 du code pénal et 77 et suivant de la loi n° 90/052 du 19 décembre 1990 sur la liberté de communication sociale ”.
A s’en tenir à la citation directe servie au patron du journal La Météo, le requérant (ministre de la Communication) a subi un préjudice incontestable du fait de ces allégations.
Le plaignant confie à la justice le soin de fixer le montant de la réparation de ce préjudice ainsi causé. Pierre Moukoko Mbonjo se constitue également partie civile et espère que La Météo sera déclarée civilement responsable, après que le patron dudit journal a été déclaré “ atteint, convaincu et coupable des faits mis à sa charge ”. Et de finir en souhaitant que le tribunal ordonne “ la publication du jugement à intervenir conformément à l’article 84 de la loi n°90/052 du 19 décembre 1990 sur la liberté de communication sociale ”.
Sur les traces de Grégoire Owona
En attendant l’issue du procès, il y a lieu de rappeler que Pierre Moukoko Mbonjo avait déjà inséré un droit de réponse dans l’édition du 13 février dernier du journal La Météo. Dans ce numéro 102 de La Météo, le ministre de la Communication dément et récuse solennellement l’accusation d’homosexuel et toute identification de sa personne à de telles pratiques.
Dans la foulée de ce droit de réponse, le ministre de la Communication avait (selon des sources au tribunal de première instance de Yaoundé) introduit une première citation directe avant de se raviser. Il l’avait alors subrepticement retirée du circuit judiciaire. Le 7 mars dernier, le ministre est revenu à la charge. Pierre Moukoko Mbonjo a-t-il été inspiré par le ministre Grégoire Owona ? On se souvient qu’il y a une semaine jour pour jour, la justice a rétabli Grégoire Owona dans ses droits dans l’affaire en diffamation l’opposant au journal L’Anecdote.
Ce journal l’avait cité dans le top 50 des (présumés) homosexuels du Cameroun.
Au siège du journal La Météo, la citation directe servie à la requête de Pierre Moukoko Mbonjo a été accueillie sans frémissement. “ Le ministre de la communication a décidé de nous faire gratuitement de la publicité. Eh bien tant mieux. Nous serons à l’audience le 28 mars prochain.
On verra bien… ”, explique le directeur de publication du journal La Météo. Dieudonné Mveng regrette tout de même la démarche du ministre de la Communication : “ en sa qualité de ministre de tutelle de la presse, il aurait dû procéder autrement qu’en estant en justice. Il aurait pu procéder par une méthode didactique. Cela lui aurait plus rapporté en terme de prestige. Hélas ! ”.
Pour mémoire, le journal La Météo est la première publication à avoir publié un dossier global sur l’homosexualité au Cameroun et dans le monde entier.
Parmi les angles de traitement contenu dans ce dossier publié le 11 janvier dernier, il y avait notamment un article sur l’homosexualité au sommet de l’Etat. A l’occasion, le journal publiait dix noms des personnalités convaincues des pratiques homosexuelles. Les jours suivants, L’Anecdote et Nouvelles Afrique entraient dans la danse de publication des listes des présumés homosexuels. La suite, tout le monde en sait quelque chose.
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