La démarche est réputée officielle. Ce qui en accroît l’intérêt et l’enjeu. En langage diplomatique, on parle d’une “note diplomatique ”. Dans le cas d’espèce, le document est estampillé “British High Commission Yaoundé ” et porte le numéro 013/06. Il date du 8 février 2006, et a été réceptionné au ministère des Relations extérieures, le 9 courant, selon nos informations.
Il est riche des civilités classiques: il formule des “compliments au ministre des Relations extérieures”, et ne manque pas de saisir “cette opportunité pour renouveler au ministre des Relations extérieures de la République du Cameroun les assurances de la très haute considération” du Haut commissariat de Grande Bretagne au Cameroun.
Il décline son objectif: requérir les conseils du ministre au sujet des relations entre personnes de même sexe. Il rappelle que le Civil Partnership Act de 2004 autorise les consulats britanniques à l’étranger à reconnaître, au nom de la loi, ce “ partenariat ” entre individus de même sexe.
Puis, l’essentiel. Le bouquet. “Le ministère des Affaires étrangères et du Commonwealth serait reconnaissant de savoir si le gouvernement de la République du Cameroun aurait quelque objection à ce que le Haut commissariat de Grande Bretagne célèbre un mariage civil entre personnes de même sexe ; qu’il s’agisse de deux citoyens britanniques, d’un citoyen britannique et d’un citoyen camerounais, ou d’un citoyen britannique et d’un citoyen de toute autre nationalité ”. Traduction libre.
Mais tout est dit, du moins à en croire le document, des intentions des diplomates anglais en poste à Yaoundé, à vouloir célébrer sur le sol camerounais des mariages homosexuels. Jusqu’au 12 février au soir, seuls des diplomates camerounais confirmaient l’existence de cette “ note diplomatique ”, et s’accordaient sur sa traduction.
Coïncidence troublante
Informé le week-end, La Nouvelle Expression n’était pas parvenue à faire réagir officiellement un diplomate britannique sur le sujet. Tout au plus une source, qui se défendait, dimanche après-midi, de parler officiellement au nom de cette représentation diplomatique où elle officie, affirmait-elle n’être pas au courant d’un tel document, recommandant formellement à La Nouvelle Expression de “contacter le Haut commissariat lundi, jour ouvrable ”. Jusqu’au moment d’aller sous presse, nous n’étions pas informés de la réaction officielle du gouvernement camerounais à la démarche britannique dont tout concourt à établir qu’il serait étonnant qu’elle ne fût pas authentique.
Des diplomates camerounais n’ont cependant pas manqué de s’émouvoir de la “requête” britannique. En toile de fond : une sourde indignation largement nourrie par la loi camerounaise dont on sait qu’elle est sans équivoque sur les pratiques homosexuelles. L’article 347 bis du Code pénal dispose clairement : “ Est puni d’un emprisonnement de six mois à cinq ans et d’une amende de 20 000 à 200 000 francs toute personne qui a des rapports sexuels avec une personne de son sexe ”.
En attendant d’en savoir davantage sur la réaction gouvernementale, beaucoup en sont à s’étonner de cette coïncidence pour le moins troublante : la démarche des diplomates britanniques est entreprise dans un contexte trouble marqué par le feuilleton trépident et controversé des listes d’homosexuels présumés. “Pourquoi avoir attendu cette conjoncture, alors que le texte de loi invoqué par le Haut commissariat de Grande-Bretagne date de … 2004”, s’interroge-t-on dans des milieux suspicieux. Et déjà, certains se demandent si les récentes “ révélations ” de certains titres de la presse, ne vont pas servir à alimenter au Cameroun un débat, qui , sous l’impulsion des forces de l’ombre, va s’intensifier et, peut-être ne pas s’arrêter aux seuls articles de presse.
A l’évidence, il s’agit d’un dossier à suivre avec d’autant plus d’intérêt que selon toute vraisemblance, le consulat d’un pays européen a aussi saisi le gouvernement camerounais entre temps, aux fins de se faire tenir une liste de personnes reconnues comme homosexuelles. Pas moins !
Source : La Nouvelle Expression
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