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Portrait d'un homme intègre: Thomas Sankara (1949-1987)
(05/02/2006)
Retour sur la vie de Thomas Sankara, révolutionnaire et président modeste proche de ses administrés, qui a perdu la vie beaucoup trop tôt.
Par Hervé Mbouguen
Les premières années

Le Capitaine Thomas Sankara, encore surnommé "Tom Sank"
Le Capitaine Thomas Sankara, encore surnommé "Tom Sank"
Thomas Sankara est né le 21 Décembre 1947 dans une famille de la bourgeoisie moyenne, et très chrétienne, qui souhaitait d'ailleurs qu'il devienne un prêtre. Il ne l'est pas devenu, mais sa foi chrétienne ne le quittera pas, même lorsqu'il deviendra un marxiste convaincu.

Sa carrière militaire commence à 19 ans, avant qu'il ne soit envoyé poursuivre sa formation à Madagascar. Il aura donc l'occasion d'observer de ses propres yeux les soulèvements populaires contre la néo-colonisation en 1971/1972. Il retourne en Haute-Volta en 1972, et participera à la guerre contre le Mali de 1974. Il va ensuite en France, puis au Maroc où il rencontre en 1976 Blaise Compaoré. Les deux hommes deviendront rapidement très proches, se considérant comme des "frères".

Les deux hommes formeront avec Henri Zongo et Jean-Baptiste Boukary Lingani le ROC ou Rassemblement d'Officiers Communistes qui sera un rassemblement de jeunes officiers, durant la présidence de Henri Zerbo.

Thomas Sankara est nommé Secrétaire d'Etat à l'Information en Septembre 1981, et fera sensation en se rendant à vélo à sa première réunion de cabinet. Il démissionnera avec fracas le 21 Avril 1982 pour marquer sa protestation, en s'écriant "malheur à ceux qui veulent baillonner le peuple".

Le 07 Novembre 1982, un coup d'état place Jean-Baptiste Ouedraogo au pouvoir. Thomas Sankara sera nommé Premier Ministre en Janvier 1983. Après une visite du conseiller aux affaires africaines français, Jean-Christophe Mitterrand, le fils du président français, Thomas Sankara sera placé en résidence surveillée.

Son ami Blaise Compaoré organise un coup d'état le 04 Août 1983, et le place au pouvoir.


Thomas Sankara au pouvoir

 Thomas Sankara arbitrant un match entre membres de son gouvernement. Derrière lui, Blaise Compaoré.
Thomas Sankara arbitrant un match entre membres de son gouvernement. Derrière lui, Blaise Compaoré.
"Tom Sank" comme certains l'appelaient voulait être un président différent, et incarnait un certain enthousiasme. Il a commencé par prendre quelques mesures spectaculaires comme vendre les voitures de luxe des membres du gouvernement, et se déplaçait lui-même en Renault 5, une voiture équivalente à une Renault Twingo d'aujourd'hui. Il n'a pas hésité à reprendre à son compte certaines thèses panafricanistes de Patrice Lumumba ou Nkwame Nkrumah.


Il a engagé une lutte contre la corruption, qui s'est traduite par des procès retransmis à la radio, mais sans condamnation à mort. Il a également entrepris une campagne de reboisement du Sahel pour stopper l'avancée du désert.

Dans un pays où l'espérance de vie atteignait à peine 40 ans, et qui avait le record mondial de décès chez les enfants de moins de cinq ans, il a développé une vaste campagne de vaccination des enfants, et de construction d'hôpitaux. Il a montré une conception moderne de la condition féminine, en condamnant la polygamie, en interdisant l'excision, et en nommant plusieurs femmes dans son gouvernement.

Au premier anniversaire de la Révolution, le 04 Août 1984, il change le nom de son pays de Haute-Volta (hérité de la colonisation) en "Burkina Faso", ce qui signifie "Le Pays des Hommes Intègres".

Proche de l'URSS et marxiste convaincu, il décréte la gratuité des loyers durant toute l'année 1985, et entame un programme de construction de logements.

Sa vision ne le limitera pas au seul Burkina-Faso puisqu'il sera très actif à dénoncer la néo-colonisation, sera un vif pourfendeur de l'apartheid, et fera sensation en s'opposant au paiement de la dette par les africains. Lors d'un sommet de l'OUA à Addis-Abeba, il s'écriera "Je dis que les Africains ne doivent pas payer la dette. Celui qui n’est pas d’accord peut sortir tout de suite, prendre son avion et aller à la Banque mondiale pour payer".


Comme tout homme, Sankara fera aussi ses erreurs. Dans l'enthousiasme de la révolution, il remplace par exemple 2.600 instituteurs par des révolutionnaires peu qualifiés. Pour faire contre-poids à l'armée, il encouragera la création de sortes de milices qui finiront par créer de l'insécurité. Il musèlera également la presse, et mettra en prison quelques uns de ses opposants. Un conflit frontalier conduira à des affrontements avec le Mali, durant lesquels près de 100 personnes perdront la vie.

Lors du 4è anniversaire de la révolution, Sankara reconnaîtra quelques erreurs, et décidera d'infléchir certains aspects de la révolution. On lui prête notamment la phrase: "Je préfère faire un pas avec le peuple, que cent sans le peuple".

L'attitude de Sankara, et la grande popularité dont il jouira au sein de la jeunesse africaine finiront par lui attirer la méfiance de ses voisins, et de certains pays occidentaux, dont la France.
Mais comme souvent, l'ennemi ne viendra pas de bien loin.

Des rumeurs de complot bruissent au Burkina-Faso ce pays qui, comme on l'a vu, a souvent été agité par des coups d'état. Sankara, comme tous, les entend, et on lui prête les propos suivants, difficiles à vérifier, mais qui auront contribué à augmenter sa légende après sa mort: "On peut tuer un homme, mais on ne peut pas tuer ses idées", ou commentant l'attitude de Blaise Compaoré "Le jour que vous entendrez que Blaise Compaoré prépare un coup d’État contre moi, ce n’est pas la peine de me prévenir. Car, ce serait trop tard ".

Thomas Sankara
Thomas Sankara
Ce qui est certain, c'est que Compaoré ignore les recommandations de Sankara, et vit dans le luxe. Il a également épousé un membre de la famille d'Houphoüet-Boigny, le président de la Côte d'Ivoire. Côte d'Ivoire qui voit Sankara d'un mauvais oeil, et qui est très proche de la France, qui digère mal les discours de Sankara, et qui craint qu'il fasse tache d'huile en Afrique.

Le 15 Octobre 1987, Thomas Sankara est en réunion avec des conseillers quand des bruits d'armes automatiques résonnent. Il aurait dit à ses conseillers "Restez, c'est à moi qu'ils en veulent". Il sort du palais, en short, les mains en l'air, mais visiblement les mutins n'avaient pas pour consigne de l'arrêter, mais de le tuer, et quelques rafales mettent fin à sa vie, ainsi qu'à celle de douze de ses conseillers.

Comme pour tuer le symbole une seconde fois, il sera enterré à la va-vite, et de façon quasi-anonyme.

L'onde de choc provoquée par son décès, dans les jeunes africaines et notamment burkinabé, a poussé le régime à lui donner une sépulture plus convenable.

Son "ami" de longue date Blaise Compaoré prendra le pouvoir après sa mort, et prétendra avoir agi ainsi parce que Sankara projettait de l'assassiner, mais ses propos n'ont pas convaincu grand monde.
16 ans après, il est toujours au pouvoir.






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