Selon nos sources, face à l'envoyé spécial de son homologue Obiang Nguema Mbazogo, le chef de l'Etat est littéralement sorti de la réserve qu'on lui connaît pour marquer son indignation suite aux récentes expulsions de centaines de Camerounais de ce pays depuis le lancement, le 06 mars dernier, d'une opération de contrôle des clandestins à relents xénophobes.
Si l'on s'en tient aux propos qu'il a lui-même tenus sur les antennes de la radio et de la télévision publiques à la sortie de cette audience d'une heure, paradoxalement, " l'expulsion des ressortissants camerounais " n'était même pas le but de la visite au Cameroun du ministre équato-guinéen.
Alors que plus d'un millier de nos compatriotes sont déjà revenus au pays, expulsés après avoir subi des actes de violence et de racket de la part des forces de l'ordre de son pays, l'envoyé spécial, Pastor Micha Ondo Bilé, a plutôt indiqué:" Je suis venu informer le numéro 1 camerounais sur la tentative de putsch intervenue la semaine dernière. Cette tentative peut déstabiliser non seulement la Guinée Equatoriale, mais aussi toute la sous-région d'Afrique centrale".
Un déclaration culottée lorsque l'on se souvient que, par rapport justement à cette soi-disant tentative de putsch, en même temps qu'un organe de presse sud africain, les autorités équato-guinéennes n'ont pas hésité à accuser le gouvernement camerounais d'entretenir des bases de mercenaires sur son territoire pour les déstabiliser.
Au nom du gouvernement, cette information avait d'ailleurs été démentie avec véhémence par le ministre de la Communication Jacques Fame Ndongo, en début de semaine dernière, au même moment que le président Biya décidait de rappeler en consultation John Akum, son ambassadeur à Malabo.
Du fait de cette crise, le trafic de marchandises vivrières en direction de la Guinée Équatoriale se trouve considérablement ralenti, voire même stopper. Le prolongement de la tension constituerait une véritable menace pour le régime de Teodoro Obiang Nguema Mbazogo, étant entendu que, à l'instar d'autres pays de la sous-région, les populations de son pays survivent grâce aux productions agricoles camerounaises.
Et ce n'est sans doute pas un hasard si l'on annonce sa probable arrivée dans les prochains jours au Cameroun, afin de venir en personne essayer de calmer la tension qui règne entre les deux pays depuis quelque temps déjà.
Il n'est pas inutile de rappeler que, depuis la découverte d'importants gisements d'hydrocarbures au large des côtes de la Guinée Équatoriale, les autorités de ce pays sont devenues particulièrement suffisantes et arrogantes à l'égard du Cameroun, au point d'oublier les simples règles de courtoisie.
Grâce à l'argent du pétrole, le temps où la présidence équato-guinéenne venait quémander l'avion ou les véhicules présidentiels camerounais est révolu. Non content de s'émanciper (ce qui n'est pas en soi une mauvaise chose), le régime de Malabo a progressivement viré vers une politique belliqueuse envers celui de Yaoundé au point de devenir désagréable.
Avant ces récentes expulsions, on a pu l'observer lors du conflit sur la presqu'île de Bakassi, lorsqu'il a pris fait et cause pour le Nigeria, sous prétexte de défendre ses intérêts. Même si, à sa sortie d'audience au palais de l'Unité, l'émissaire équato-guinéen a tenté de minimiser ces expulsions en déclarant que «Le Cameroun n'était pas le seul pays touché», il n'en demeure pas moins que son pays a franchi une autre étape psychologique qui devrait être sérieusement examinée par le pouvoir de Yaoundé.
source: Quotidienmutations, Thierry Ngogang
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