Selon des informations reçues du Dr Eric Sunjio de la pharmacie française, près de 5 % de préservatif achetés dans son officine, sont des préservatifs féminins. Et c’est surtout les dames qui s’en procurent. Pour la douzaine d'autres pharmaciens interrogées également à ce sujet, la tendance est presque la même. Preuve que, malgré le tapage médiatique orchestré par le Programme de marketing sociale au Cameroun (Pmsc), le Programme national de lutte contre le Sida (Pnls) et les autres acteurs intégrés dans ce projet, l'usage des préservatifs féminins n'a pas encore vraiment intégré les moeurs camerounaises. Par conséquent, la majorité des femmes rencontrées affirment soit n'avoir jamais vu un préservatif féminin ou alors ne l'ont utilisé que par curiosité. " Lors d'une de leur campagne les agents du Pnls m'ont remis un préservatif féminin. Je l'ai essayé avec mon mari et nous avons trouvé son utilisation un peu trop compliqué en plus qu'il fait un petit bruit qui peut à certains moments gêner les moments d'intimité. Et nous nous sommes juré de ne plus jamais l'utiliser ", explique Martine A. En effet, contrairement à son frère de sexe masculin dont l'utilisation est plus aisée, son usage demande une attention particulière.
Pour placer le préservatif féminin, la femme doit être dans une position confortable (assise, couchée ou debout avec un pied posé sur un objet). En le sortant, on recommande d'éviter de le déchirer avec les ongles ou des bagues et de presser ensuite l'anneau, intérieur entre le pouce et lindex et de le l'insérer dans le vagin le plus loin possible. Il faudrait ensuite placer l'index à l’intérieur du préservatif, afin de pousser l'anneau intérieur jusqu’au fond. L'anneau externe lui, doit rester en dehors du vagin. En revanche, lors du rapport sexuel, il faut juste vérifier que le pénis entre bien dans le préservatif. Pour le retirer, il faut également tourner l'anneau extérieur afin de le fermer (pour empêcher le sperme de couler). Il suffit alors de tirer doucement pour enlever le préservatif. Norbert Fongang Fandjo et Djoti Yayaka du Centre médical d'arrondissement d'Elig-Essono, pensent que la réticence des populations s’explique aussi par son coût un peu trop élevé et par sa faible diffusion. " Contrairement au préservatif masculin qui revient au moins à 25 fcfa la pièce, le préservatif féminin lui, coûte un peu trop cher. Il faut compter au moins 100 fcfa. Et puis, il n'est pas disponible partout. Donc il faut comprendre que les gens aux conditions de vie modestes ne sont pas prêt à dépenser cette modique somme pour quelques minutes de plaisir ", expliquent -ils.
Par ailleurs, la taille même de cet objet serait aussi une autre cause de son décollage raté. Impossible de le glisser discrètement dans la poche, En dépit de tous ces problèmes, il y a une partie de la population, qui lui trouve tout de même des avantages. Les mêmes qu'avancent d'ailleurs les fabricants. A ce titre, il pensent que le préservatif féminin offre notamment aux femmes une meilleure maîtrise des moyens de prévention, dans la mesure où la protection ne fait plus forcément intervenir le partenaire masculin. D'un point de vue plus pratique, il procurerait une sensation de propreté, le sperme restant à l'intérieur. L'anneau extérieur, par son frottement sur le clitoris, permettrait d'atteindre l'orgasme plus rapidement. " Le préservatif féminin est plus solide que le préservatif masculin, ce dernier est donc moins sujet aux déchirures éventuelles ; Il peut être mis en place longtemps avant le rapport (jusqu'à plusieurs heures), ce qui n'interrompt pas les préliminaires ; Il prolonge l’intimité, puisqu’il n'est pas nécessaire de le retirer aussitôt après éjaculation ; Il ne comprime pas le sexe masculin ; Il permet une meilleure sensation tactile et il est bon conducteur de chaleur ; N'étant pas en latex, il ne provoque pas d’allergie ; Il est possible d'ajouter tout type de lubrifiant (pas uniquement les lubrifiants aqueux), même s'il est déjà lubrifié ", témoigne Mme Afana Afana.
Pour comprendre
Depuis de longues années, des scientifiques se sont attelés à trouver un dispositif de protection intra vaginal. Mais le déclic se ferra par le Physicien Lassy Hesset qui, sur les conseils de sa femme, invente un objet composé d'une membrane imperméable en polyuréthane de 17 cm de long, fermée à une extrémité et munie de deux anneaux souples à chaque bout. La plus petite bague à l'extrémité fermée est utilisée pour insérer le préservatif et le loger dans le vagin; tandis que, la bague extérieure à l'extrémité ouverte du préservatif reste en dehors du vagin pendant le rapport. M. Lassy Hesset présente le fruit de ses quatre années de travail au Congrès de la Société européenne de contraception, en avril 1990 à Paris. Le premier préservatif féminin du nom de Fémidon est alors montré au grand public. Il attire la curiosité car on assiste parallèlement au développement de Vih/Sida. Mais dans la mesure où on estime que cette maladie touche essentiellement la population homosexuelle masculine, la priorité fera presque oublier l'existence même de cet outil.
Mais face au constat récent d'une féminisation des nouvelles contaminations par le Vih, l'outil fera surface pour être distribué à partir de 1992 dans une trentaine de pays, et vers les années 2000 au Cameroun où il a toujours du mal à entrer dans les moeurs. Dès lors, des gens ce sont mis dans la fabrication des préservatifs féminins. C'est le cas de cet Américain qui en novembre dernier, lance sa marque, le V-Amour. Il s'agit de la première innovation du genre depuis l'invention du Fémidom. A la différence de son aîné, il consiste en une pochette de latex souple reliée à une charpente flexible en forme de V. Le tout se ferme sur un petit renflement dans lequel se trouve une éponge en polyuréthane. Le produit a obtenu le label de qualité CE. Pour l'une et l'autre des inventions, les avantages revendiqués par rapport au préservatif masculin sont qu'il est contrôlé par la femme; le polyuréthane est plus résistant que le latex; il peut être inséré un certain temps avant le rapport; l'utilisation ne dépend pas de l'érection totale du pénis; on n'a pas besoin de le retirer immédiatement après l'éjaculation ; il couvre plus de zone génitale et donc permet une plus grande protection contre les maladies sexuellement transmissibles et les grossesses indésirées.
Par Cathy Yobo, Quotidien Mutations
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