Note: Ce dossier a été réalisé par le quotidien Mutations sous forme de plusieurs articles que la rédaction, a compilés ici.
Albert Yondo Mandengué : Black-out total
Ceux qui pensent que Me Yondo Black se serait remis de la présidentielle d’octobre 2004 se trompent sur toute la ligne. L’ancien bâtonnier au barreau du Cameroun, celui que d’aucuns, à tort ou à raison, appellent le "pionnier de la démocratie au Cameroun" et qui prenait pour la première fois part à une élection présidentielle s’en prend à tout le monde. Au pouvoir, à l’opposition, au peuple et surtout aux journalistes. "L’objet de votre enquête est sans intérêt. Pour une presse, c’est un débat de bas étage. Vous ferez mieux de parler des problèmes d’intérêt national, apprendre aux Camerounais à revendiquer leurs droits et aux députés à travailler pour la nation et non pour un seul homme", lance-t-il furieux au reporter du quotidien Mutations. "Inutile d’insister, je ne réponds pas", tranche-t-il.
Depuis la dernière présidentielle donc, Me Yondo Black, fondateur et président du Mouvement social pour la nouvelle démocratie (Msnd) se fait discret. En dehors de quelques contributions à caractère politique dans la presse, c’est pratiquement le black-out. Aucun débat sur la scène politique. Aucun meeting, aucune déclaration sur les crises qui agitent le Cameroun. Classé 6e lors du scrutin du 11 octobre 2004, Me Yondo a obtenu 0, 36% des suffrages valablement exprimés. Et pourtant, le candidat du "refus du Renouveau" avait élaboré et énoncé un programme accrocheur par endroits: régime parlementaire dualiste avec un premier ministre responsable devant le parlement, une décentralisation avec un véritable pouvoir régional, une conférence nationale pour réconcilier les Camerounais, un vote obligatoire à l’âge de 18 ans, un scrutin à deux tours, la nullité de toute élection qui n’aurait pas connu une participation de plus de 50% d’inscrits et un taux de participation de même niveau.
Dippah Kayessé
Anicet Ekane : Cela dépend toujours de vous
Elles étaient 50, les mesures urgentes que se proposait de prendre le candidat du Manidem à la dernière élection présidentielle, s'il parvenait à Etoudi. Ce tout s'articulait autour de quatre orientations que sont : la consolidation de la démocratie, la promotion de l'unité et de la souveraineté du Cameroun, et d'une économie cohérente au service de la nation et de la sous-région, et l'élevation du niveau de vie des classes moyennes et populaires. En plus d'un slogan "Tout dépend de vous".
"Nos propositions sont plus que jamais urgentes pour redresser la situation, et l'actualité nous donne d'ailleurs raison. Le fossé entre nantis et démunis ne cesse de se creuser, les parents ne parviennent pas à envoyer leur progéniture à l'école, la pression fiscale combinée à la récession économique rend les entreprises incapables de répondre à la demande en emplois. Tout cela sur fond de mouvements sociaux", prétend Anicet Ekane.
Si on lui fait la remarque de n'avoir pas profité de cette vague de revendications sociales pour promouvoir les idées de son parti, et de s'être laissé amadouer par les subsides de la campagne, le président du Manidem contre-attaque aussitôt en rappelant que ses camarades ont soutenu le dernier mouvement estudiantin. "D'ailleurs, la campagne nous a coûté deux fois plus cher et nous n'avons jamais reçu la deuxième partie des financements publics", soutient-il.
Le candidat du Manidem n'y pense plus d'ailleurs, véritablement. "Quand on regarde ce qui se passe : grèves, manifestations des épargnants de la Campost, des instituteurs vacataires, etc., on voit bien qu'il est incontournable d'appliquer notre programme, qui n'était, en réalité, qu'un résumé du Programme économique et financier du Manidem".
Jean Baptiste Ketchateng
Fritz Ngo : L’écolo est vert de colère
"Je viens de rédiger une lettre à l’attention du ministre de l’Economie et des Finances. Car ce qui se passe est tout simplement inadmissible. L’Etat camerounais avait débloqué un milliard de Fcfa pour l’élection présidentielle du 11 octobre 2004. Depuis la première tranche donnée le 4 octobre 2004, rien n’a suivi jusqu’ici. Quand sera-t-on enfin sérieux dans ce pays?" A travers cette interrogation indignée, Fritz Ngo, président du Mouvement des écologistes camerounais (Mec), exprime également son regret par rapport au mauvais résultat obtenu lors de l’élection présidentielle de 2004. Avec 0,34%, il n’aura occupé que le 8e rang sur les 16 présidentiables du départ.
Son plan d’action s’articulait autour de la consolidation de la démocratie avec l’installation d’un système électoral équitable et transparent, l’assainissement des finances publiques, la revalorisation des indices salariales, l’amélioration des infrastructures pour une meilleure couverture sanitaire et de l’éducation. Autre préoccupations de ce candidat : insertion sociale et l’emploi des jeunes, ainsi que la protection de l’environnement et la gestion durable des ressources naturelles.
Pour Fritz Ngo, "le bilan de la première année du pouvoir en place est chaotique. Aucune amélioration, au contraire depuis le début de 2005, le mouvement social est à son comble. D’autant plus que le point d’achèvement est devenu un programme. Personne ne pense à travailler pour l’intérêt national. Ceux qui sont aux commandes amassent chacun, de toutes ses forces, son trésor de guerre pour préparer l’après Biya, oubliant même la possibilité d’une vraie alternance politique dans ce pays. Il reste six ans à ce gouvernement, qu’il permette aux Camerounais de vivre décemment et que la ménagère puisse reprendre son panier qu’elle a rangé depuis des années dans un coin de la cuisine". Occupé à ses petites affaires au quartier Akwa à Douala, il dit devoir renouveler l’expérience de la présidentielle d’octobre 2004.
M.O.
Djeukam Tchameni : Un pèlerin déboussolé
# Le siège du Mouvement pour la démocratie et l’interdépendance (Mdi) au quartier Bonassama à Douala paraît bien calme ce vendredi 7 octobre 2005. La secrétaire présente se montre peu loquace sur les activités du président de ce parti politique, M. Djeukam Tchameni. "Le président n’est pas en place, il se trouve hors du pays", lance-t-elle, avant d’ajouter : "pour le reste, je ne peux rien vous dire". Même la salle des conférences dans laquelle le Réseau des organisations de la société civile (Roc), association militant en faveur de la démocratisation à travers le développement de la société civile, tient généralement ses sessions de formation, se trouve être vide. Preuve que ses activités sont quelque peu en berne.
Difficile donc de savoir, en son absence, ce que M. Djeukam Tchameni pense de la gouvernance actuelle. Mais en octobre 2004 encore, il s’est montré très amer sur cette question, surtout lorsqu’il évoquait la santé économique du Cameroun. Il dénonçait alors les relations entre le Cameroun et les institutions de Bretton Woods, les privatisations et une décentralisation non réfléchie. Il estimait que la politique ayant conduit à la privatisation de la gestion de l’énergie électrique au Cameroun n’était que maladroite, et que le système éducatif était à refaire dans son entièreté.
Le président du Mdi proposait alors, entre autres solutions l’élimination des vestiges de la domination étrangère sur l’Etat. Il devait s’atteler au démantèlement de l’Etat néocolonial, dictatorial et corrompu, en envoyant tous les anciens fonctionnaires à la retraite, et comptait aussi mutualiser les soins de santé. Seulement, après l’élection présidentielle, le candidat du Mdi n’avait pu engranger que 0,28% des suffrages, se classant ainsi 12ème sur les 16 présidentiables.
Pascal E. Dang
Adamou Ndam Njoya : Entre vie politique et vie privée
# La dernière sortie publique de Adamou Ndam Njoya date de jeudi dernier. C'était au cours d'une conférence de presse sur le thème : "Les partis politiques, les médias et la société civile : quelles missions et comment l'assumer pour la paix, la démocratie et le développement en Afrique. " A cette occasion-là, le président de l'Union démocratique camerounaise (Udc), candidat de la Coalition pour le reconstruction et la réconciliation nationale, lors de la présidentielle d'octobre 2004, s'adressait à la presse, en tant que président de l'Ecole africaine d'éthique (Eae).
Toujours dans un régistre non politique, le président de l'Udc, après la dernière campagne pour l'élection présidentielle, a de nouveau été propulsé au devant de la scène le 3 février dernier. C'était au cours de sa non désignation à la tête de la chefferie du groupement Njinka, localité située près de Foumban. A la suite de ce nouvel échec, après celui enregistré à l'issue de la Présidentielle du 11 octobre 2004, Adamou Ndam Njoya criera au scandale. Ce qui va occasionner une altercation entre ses partisans et ceux de Ibrahim Mombet, son rival.
La richesse de la chronique sur la vie privée de ce politicien, qui a déjà brigué la Magistrature suprême à deux reprises (1997 et 2004), tranche cependant avec le peu d'envergure qu'ont ses activités politiques depuis l'échéance du 11 octobre 2004. Depuis cette époque-là, le président de l'Udc n'a véritablement pas été présent sur la scène politique nationale. Hormis les sessions de l'Assemblée nationale où il siège, et surtout, la suspension des 1er et 2ème adjoints de la mairie de Foumban, que contrôle l'Udc. L'acte y afférent a été signé le 1er septembre dernier par Adamou Ndam Njoya, qui est l'exécutif municiapl de cette mairie.
Brice R. Mbodiam
Jean Jacques Ekindi : Rumeurs et silence radio
"Vous n’avez pas besoin de m’appeler pour savoir ce que je pense de la gouvernance actuelle". Ainsi répond sans ambages Jean Jacques Ekindi, joint au téléphone par le reporter de Mutations. Vous l’avez compris. Le leader du Mouvement Progressiste (Mp) a toujours la même verve quand il s’agit de parler du Renouveau. " Le Cameroun a la forme d’un triangle dont la base est en bas et le sommet en haut. M Biya et le Rdpc le gèrent complètement à l’envers comme un homme qu’on tiendrait les pieds en haut et la tête en bas. Dans ce cas (…) Il s’appauvrit car tout l’argent qu’il a dans ses poches tombe. Ensuite le sang lui monte à la tête, il respire mal et si cette station se poursuit, il meurt".
M. Ekindi proposait au cours de sa campagne à l’élection présidentielle d’octobre 2004, une école adaptée aux réalités d’aujourd’hui : "que sa gestion, au niveau maternel et primaire soit largement reprise par les communautés locales et régionales" disait-il.
Sur le plan de la santé, il présentait "une gestion éclatée dans les différentes instances de la société". Le rêve d’appartenir au grand parti de l’opposition l’amène à retirer sa candidature au profit du leader du Social Democratic Front (Sdf), Ni John Fru Ndi, quelques jours seulement avant la tenue du scrutin du 11 octobre 2004.
Qu’importe ! Le Minatd va lui coller un score de 0,1% de suffrages exprimées en sa faveur. Depuis lors, on n’entend rien ou presque du Mp ou de son leader, à part quelques rares articles de presse. Et pourtant, il s’affaire à l’organisation de la foire de Douala et diverses autres affaires familiales.
Dominique Bela
John Fru Ndi : Power to the Chairman
L’un des points inscrits au programme de John Fru Ndi, à la veille de l’élection présidentielle du 11 octobre 2004, portait sur la mobilisation des Camerounais afin d’établir une société juste. Parce que le Chairman du Sdf continue à penser qu’il y a une mauvaise répartition des fruits de la croissance. Et surtout que la pratique de la corruption gangrène encore l’administration publique du pays. Le Cameroun a besoin, dit-il, d’une cure pour retrouver le chemin de la modernité. Mais, Fru Ndi n’a pas eu l’occasion de mettre en oeuvre la politique que défend son parti. L’homme de Ntarinkon est encore arrivé second, comme en 1992, à l’élection du 11 octobre 2004, derrière Paul Biya.
Cette fois, John Fru Ndi a engrangé 654 066 suffrages, représentant 17,40 % de votes. S’il fait l’unanimité au sein d’une frange de l’opinion, dans sa propre famille politique, les avis sont largement partagés. De nombreux courants qui s’affrontent aujourd’hui au sein du Sdf, démontrent que le slogan du parti, " Pouvoir au peuple et égalité des chances à tous ", devient de plus en plus creux. Les observateurs pensent que ce pouvoir repose sur John Fru Ndi, l’unique, l’incontestable, l’irréprochable. Et que, 15 ans après le lancement du Sdf, quelques turpitudes ont eu raison du charisme de Fru Ndi.
Il s'active, ces jours, non pas à indiquer une nouvelle stratégie pour la marche des affaires du pays, mais à contrôler l'organisation du prochain congrès du parti en mai de l'année prochaine, pour s'assurer de ne pas en perdre le contrôle et les multiples avantages. Depuis 1992, les ambitions du parti s'érodent chaque années davantage...
M.F.
Victorin Hameni Bieleu : Silence, on travaille
Aujourd'hui, en principe, Victorin Hameni Bieleu devrait procéder, à New York aux Etats-Unis d'Amérique, au renouvellement du bureau de la fédération de l'Union des forces démocratiques du Cameroun (Ufdc) d'Amérique du Nord. Le président de l'Ufdc a donc vécu l'anniversaire de la dernière élection présidentielle bien loin du théâtre de celle-ci. Victorin Hameni Bieleu, dont on a annonce le retour au Cameroun pour le mois de novembre prochain et qu'on n'a pas beaucoup entendu depuis les résultats du scrutin du 11 octobre 2004, fait ainsi savoir qu'il n'a pas cessé de travailler après la dernière élection présidentielle, même si on ne l'a pas beaucoup entendu. La dernière sortie du leader de l'Ufdc a été un avis dans les colonnes de Cameroon Tribune, en septembre dernier, à propos du 44e anniversaire de la réunification du Cameroun.
Il avait été l'un des tout premiers leaders de l'opposition à annoncer qu'il s'alignerait dans la course contre le candidat du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), Paul Biya, mettant ainsi en doute toute possibilité de candidature unique de l'opposition.
Hameni Bieleu présentait un programme libéral, favorable aux privatisations : " L'Etat doit se désengager des secteurs productifs ", disait-il, tout en précisant que le Cameroun devait respecter les conditions des institutions financières internationales. L'un des objectifs du président de l'Ufdc était de réduire le chômage en créant plusieurs nouveaux emplois. La famille, ainsi que la lutte contre la corruption et l'insécurité étaient aussi des axes de ce programme, qui n'a pas vraiment convaincu les élécteurs, si l'on s'en tient aux résultats.
Avec 11 920 suffrages exprimés en sa faveur, soit un pourcentage de 0,31%, le candidat de l'Ufdc s'est classé au dixième rang sur les seize candidats en lice. La campagne de renouvellement de ses structures de base que l'Ufdc a engagé au Cameroun (au Littoral notamment) et à l'étranger s'inscrit vraisemblablement dans le cadre de la préparation des municipales et des législatives prévues en 2007 au Cameroun. La prochaine élection présidentielle aura lieu en 2011. Victorin Hameni Bieleu aura alors 62 ans et briguera peut-être encore la présidence de la République.
Jules Romuald Nkonlak
Gustave Essaka : A la recherche de la transparence financière
Pendant la campagne électorale pour l’élection présidentielle du 11 octobre 2004, le premier triumvir de la Démocratie intégrale du Cameroun (Dic), Gustave Essaka, avait bâti sa campagne autour d’un point essentiel: la lutte contre la corruption et l’auto transparence financière. Et pour ce faire, il proposait à chaque candidat, ainsi qu’à tous les responsables de la République, conformément à la constitution, de déclarer leurs biens, comme lui. En plus de cette préoccupation, deux secteurs avaient retenu son attention. Il proposait la gratuité des soins dans les hôpitaux publics, ainsi que la gratuité de l’éducation, pour que le Cameroun devienne, affirme-t-il, "le quartier latin de l’Afrique". Pour avoir séjourné à l’hôpital Laquintinie de Douala, suite à un accident de circulation survenu le 04 juin dernier, Gustave Essaka sait aujourd’hui que ses propositions électorales ne restent que de rêves pour la majorité de Camerounais.
La bonne gouvernance également reste une question délicate. "Les jeux sont brouillés. Le contexte est caractérisé par une tendance générale à l’enrichissement illicite", affirme t-il. Après trois tentatives malheureuses à l’élection présidentielle (1992, 1997 et 2004), le premier triumvir de la Dic ne pense pas encore à se retirer de la scène politique. A 70 ans, il clame que "l’âge n’est pas un argument politique". Il poursuit que "tant que Dieu me prête vie, je serai toujours candidat. Car je considère que je n’ai pas échoué à une compétition honnête".
Mais en attendant la prochaine élection, il sollicite l’intervention du chef de l’Etat pour une nomination comme 3e adjoint au Délégué du gouvernement auprès de la Communauté urbaine de Douala où il fait officie d’adjoint au chef service de la Cellule des Marchés.
L.K.
Hubert Kamgang : Un repère nommé "Opango bar"
Au rond-point Nlongkak à Yaoundé, non loin de l'ancienne pharmacie Belek, sa réputation est toute faite. Hubert Kamgang, l'un des candidats malheureux à la dernière élection présidentielle avec un score de 0,19% n'y est pas méconnu. Avant et pendant la campagne électorale, il y réunissait son état-major à l'arrière boutique d'un point de vente de pièces détachées, faisant office de quartier général.
Depuis, Hubert Kamgang a levé le siège. La boutique a renoué avec ses activités normales. Le propriétaire des lieux, membre du bureau national de l'Union des populations africaines (Upa), avoue avoir perdu le numéro de téléphone du "président". C'est vers un bistrot situé non loin de là qu'il oriente le reporter, en précisant : "C'est le bar de son frère". En fait, "Opango bar", cadre modeste et lieu de rencontre des jeunes, est l'un des repères du "panafricaniste".
"Le président vient souvent passer du temps ici avec nous, c'est un homme humble", souffle un client du bar. Hubert Kamgang a ses habitudes à cet endroit. "Il n'est pas encore tard [10heures], le président va arriver. Il prend souvent son plat de bouillon ici le matin", renchérit une jeune fille, assise derrière des marmites qu'elle surveille du regard. En fait, le président de l'Upa, qui a finalement été repéré non loin de son domicile au quartier Bastos, affirme qu'il consacre son temps à la "conscientisation" des jeunes pour la "dénéocolonisation". Son projet immédiat est la réédition de Monnaie servitude et liberté, de Tchundjang Pouémi, quitte à provoquer un incident avec Jeune Afrique, l'éditeur du livre.
La réputation de cet ingénieur statisticien économiste, cadre retraité de l'Union douanière et économique de l'Afrique centrale (Udeac), a débordé les limites de Nlongkak. A la faveur des tribunes que lui ont offertes les élections présidentielles de 1997 et 2004, il a pu dévoiler, dans spectre plus large, quelques articulations de son "projet" pour le Cameroun et ... l'Afrique. On retient l'idée d'une construction des "Etats-Unis d'Afrique et d'une monnaie africaine". Un projet qui passe par le retrait du Cameroun de la zone Cemac et de la Beac, "préalable au parachèvement de la décolonisation", confiait-il récemment dans les colonnes de Mutations.
Claude Tadjon
Boniface Forbin : Retour à la case départ
Joint au téléphone pour un rendez-vous en vue d'un entretien sur ses activités politiques, un an après la dernière élection présidentielle à laquelle il a été candidat, Boniface Forbin à d'abord éclaté de rire. Après un petit moment d'hésitation, le candidat du Justice and Developpement Party (Jdp) à la Présidentielle d'octobre 2004, a répondu au reporter de Mutations qu'il "n'avait vraiment rien à dire" sur le sujet.
C'est que depuis la fin de la campagne électorale au cours de laquelle il a tout de même réussi à retenir l'attention de nombre de Camerounais, surtout par ses sorties télévisées à la fois comiques et originales, Boniface Forbin a de nouveau fondu dans l'anonymat. Après l'effervescence de la campagne, ce journaliste semble avoir choisi, en attendant un autre grand rendez-vous politique, de se consacrer à The Heralt, le trihebdomadaire de langue anglaise dont il est directeur de la publication depuis 1992.
Son parti politique, non plus ne fait pas parler de lui ces derniers temps. Les meetings populaires du Jdp dont on se souvient, remontent à l'année dernière. Pourtant, les occasions n'ont pas manqué pour que cette formation politique fasse parler d'elle. Fervent défenseur de la "décentralisation intégrale", selon les propos de son président, le Jdp est aussi, toujours de l'avis de Boniface Forbin, un porte flambeau de la cause anglophone, qui se démarque cependant de toute entreprise sécessionniste.
De ce fait, l'on se serait, par exemple, attendu à une déclaration du parti de Boniface Forbin, réaffirmant cette position le 1er octobre dernier, date anniversaire de la réunification du Cameroun. Qui, depuis des années, est devenue une occasion au cours de laquelle le Southern Cameroon national council (Scnc) manifeste ses velléités sécessionnistes.
Brice R. Mbodiam
Garga Haman Adji : Ainsi demeurera notre pays
Que proposait le candidat de l'Alliance pour la démocratie et le développement (Add) pour sauver le Cameroun de "l'inertie" ? C'est presque irréfléchi de le lui demander, estime-t-il. "Tout est dans mon livre Ainsi pourrait devenir notre pays ; vous auriez dû le lire et dire si je fais de la démagogie", répond le ministre qui s'est rendu célèbre en démissionnant en août 1992 du gouvernement de Paul Biya, contre lequel il s'est présenté à la dernière élection présidentielle.
Le livre-programme de M. Garga suggérait, entre autres, l'institution d'une vice-présidence, une décentralisation politique et administrative, complétée par une séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, un Conseil d'Etat et deux autorités dédiées aux chefferies traditionnelles et au monde de l'information. Le projet de société économique du candidat Garga prônait quant à lui l'instauration, "d'une économie humaniste [conçue] pour contrôler et corriger le capitalisme sauvage et le libéralisme à l'état pur".
Comment est-il possible au président de la République actuel d'appliquer les solutions de l'Add ? "L'élection a eu lieu, il y a un candidat qui a été déclaré élu. C'est à lui de prévenir et de régler les problèmes qui se posent, sous peine de montrer aux Camerounais son incapacité à gérer le Cameroun", déclare Garga Haman Adji. S'il reconnaît que le front social est fortement agité, il assure observer et soutenir tous les fronts sociaux dirigés contre ce gouvernement là. Rien de plus.
On peut penser qu'en deux sorties médiatiques sur la scène publique, le président de l'Add a tout dit sur la position de son parti sur les grands sujets d'actualité. Après avoir relancé la traque aux corrompus dans la Fonction publique, à travers l'Ong Bonne Conscience, et avoir déclaré dans les colonnes de votre journal que la défunte Caisse d'épargne postale ne pourra pas se relever de sa mauvaise gestion, l’Etat ayant pris l’argent des épargnants, il prépare les prochaines échéances électorales.
Jean Baptiste Ketchateng
Justin Mouafo : Animateur dans la vision
Le leader du Nationalisme des pacifistes du Cameroun pour le bien-être et l’unité réelle contre les souffrances des humains (Npc/Bush), Justin Mouafo, peut se targuer, après la présidentielle 2004 au Cameroun, d’être la 5ème force politique du pays. Il le dit d’ailleurs publiquement. En fait, Justin Mouafo, 68 ans, a récolté 14 915 voix à l’issue de ladite consultation populaire. Soit 0,39 % de suffrages exprimés en sa faveur. Un rang qui, selon lui, traduit l’adhésion des électeurs au programme qu’il a présenté, et qui était axé sur le social : aménagement de la situation des enseignants et du personnel de la santé, développement de la sécurité sociale…
Quand l’actualité politique est en veilleuse, le président fondateur du Npc/Bush, parti créé en 1991, anime des débats publics à Bafoussam, le siège de sa formation. C’est ainsi qu’il entretient les populations sur des thèmes divers, tels que la démocratie au Cameroun, la colonisation ou décolonisation en Afrique, l’histoire du Cameroun, le patrimoine culturel de l’Ouest, etc. Proche de la majorité présidentielle, l’ancien chef du Centre provincial de la culture et du patrimoine culturel à l’Ouest a néanmoins des regrets quant à la gestion de la chose publique au Cameroun : " J’avoue qu’il y a une déception. Des efforts sont faits, mais pas dans la cohésion. Dans la vie, lorsque les gens vont chacun de son côté, il y a égarement ", affirme Justin Mouafo.
M.F.
Georges D. Nyamndi : Une expérience à revivre
Un état décentralisé comprenant des régions semi-autonomes, un président élu au suffrage universel pour un mandat de 5 ans renouvelable une fois, un pouvoir judiciaire indépendant garant de la légalité républicaine et de la constitutionalité des lois, une économie de libre échanges, la gratuité de l’éducation, la protection des minorités, etc. Voilà en raccourci le programme politique qui a bâti la campagne à la présidentielle de Georges Nyamndi, président du Social liberal Congress (Slc), lors de la présidentielle d’octobre 2004. Tout projet de société fondé sur le travail, la justice et le progrès.
Malheureusement, l’essai du candidat du Slc a tourné au cauchemar du fait de son classement ridicule. L’homme n’ayant recueilli que 6730 voix. "J’ai eu l’occasion de jauger notre démocratie et redécouvrir un peuple épris de paix et de justice", relativise-t-il, au téléphone, cet échec. Il s’est classé avant dernier des seize candidats ayant pris le départ de la compétition. Mais, s’il est un candidat dont les électeurs n’oublieront pas de sitôt les prestations, c’est bien lui. Tellement, ce prétendant de culture anglophone a marqué les esprits par son éloquence et son bilinguisme.
Depuis les résultats, il a disparu de la scène, y compris dans son Nord-ouest natal. Il dit pourtant être resté actif aussi bien à la tête de sa formation politique à prêcher la doctrine du Slc, que dans la vie civile. "Non! Je suis très souvent en tournée d’évaluation auprès des militants", rétorque Georges Nyamndi lorsqu’on lui demande s’il attend la prochaine présidentielle pour refaire surface. Enseignant à l’Université de Buéa, pour lui la politique ne doit être prise pour autre chose. Incisif, il accuse l’actuelle gouvernance de somnolence. "Depuis, nous attendons toujours de voir clair sur ses axes. Actuellement, tout donne lieu à une navigation à vue. Il en est ainsi des grandes ambitions qui constituent une véritable nébuleuse", réagit George Nyamndi, qui avait adressé ses félicitations au vainqueur du scrutin au lendemain des résultats en novembre 2004.
Dippah Kayessé
Jean Michel Tekam : Pharmacien au quartier
2005. Jean Michel Tekam s’en souviendra. C’est en effet au cours de cette année, au bord de la retraite, qu’il a encore enregistré des déboires. Enseignant des sciences, il a perdu son emploi à l’université des Montagnes où il enseignait.
La chaîne de déception s’est allongée, il y a quelques mois, lorsque Jean Michel Tekam a été forcé d’abandonner la pharmacie du Bénin qu’il gérait à Bafoussam. En réalité, M. Tekam avait bénéficié d’un crédit auprès de la Société générale des banques au Cameroun. Crédit garanti par une maison qu’il avait en banlieue parisienne. Mais, la banque pour recouvrer son argent, a préféré saisir l’immeuble abritant la pharmacie du Bénin. L’immeuble a été acheté par Dieudonné Kamden, homme d’affaires et par ailleurs président de Fovu club de Baham.
Ainsi, un matin, les affaires de M. Tekam ont été jetées dans la rue. Et le pharmacien est en chômage forcé. Considéré comme étant un érudit qui ne sait toujours pas arrimer son savoir aux réalités de la scène politique camerounaise, Jean Michel Tekam est contestataire dans l’âme : " Il me souvient que le Programme national de gouvernance vise à ériger au Cameroun un Etat performant, capable de promouvoir un développement économique et social durable. Mais, face à la réalité, on est en droit de dire que la pétition de principe s’identifie à un discours démagogique ", déclare-t-il. Ses prises de position ont elles fait de lui un leader incompris ? On peut le croire, puisque le président national du Parti démocrate socialiste (Pds) traîne à la queue, lors des consultations électorales. A la présidentielle 2004, il n’a pas dépassé 0,34 % (12 785 voix).
M.F.
Source : Quotidien Mutations
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