A l’image des autres communautés étrangères qui vivent dans l‘hexagone, les Camerounais multiplient des activités et organisations leur permettant de recréer un environnement socioculturel originel.
Les bousculades incessantes devant le consulat de France à Douala en témoignent. La saison des pluies au Cameroun qui correspond à l’été indien en France, est la période pendant laquelle les Camerounais voyagent le plus pour l’hexagone. Or, une fois la terre promise foulée du pied, nos compatriotes cherchent généralement à reconstituer les modes culturels de vie acquis les années précédentes. Il n’est donc pas étonnant que de Lille, dans le nord de la France, à Nice dans le sud, en passant par Strasbourg à l’Est ou Nantes sur la côte atlantique, les Camerounais comme les autres ressortissants africains, tentent de créer des structures leur permettant de continuer à se retrouver pour entretenir et partager des histoires communes.
Les nombreuses “ associations de Camerounais de… ”, concourent à cet effet. Et parmi les animations les plus prisées, il y la création des chorales: “ L’idée c’était de mettre sur pied un groupe de chant choral pour avoir une activité qui permet à la communauté camerounaise d’Angers d’être ensemble deux fois par semaine et de pouvoir, en cas de besoin, assister l’un de nous qui a eu le malheur de perdre un proche dans la région ”, témoigne Aîmée Missè, présidente de la chorale Elong’a mulema(entendez le chant du cœur). Fondée en 2002, la structure a depuis élargi son champ d’action et ses activités : “ Nous avons été tous surpris par les sollicitations multiples dont nous sommes l’objet depuis trois ans. On nous appelle même pour animer les mariages au-delà de la seule région de Maine-et-Loire. L’engouement des choristes est tel que nous envisageons sérieusement de nous produire l’année prochaine au Cameroun ”, ajoute la présidente de la chorale des Camerounais d’Anjou.
Nostalgie
Autres régions, autres activités. A Paris, certains Camerounais ont choisi de reconstituer les tontines un peu comme au pays. Hommes ou femmes, ils se réunissent pratiquement chaque dimanche autour d’un bon repas pour avec en toile de fond l’acquittement d’une cotisation dont les bénéfices là encore sont destinés à l’entraide: “ Notre mouvement de solidarité est né il y a quinze ans, à la suite du décès d’un jeune Camerounais de 25 ans. Nous nous sommes aperçus que sa famille avait d’énormes difficultés à faire rapatrier son corps. Nous avons alors pris conscience que chacun de nous pouvait se retrouver dans la même situation ”, relate Pierre Yves M., membre d’une association camerounaise en région parisienne, qui précise: “ c’està partir de cet élan que nous avons réussi à contracter aisément une assurance vie pour l’ensembles des adhérents de notre organisation ”, précise-t-il.
C’est dans le même sillage qu’il faut comprendre le cercle des jeunes originaires de Deido, à travers “ Les sans Soucis ”. L’association lancée il y a deux ans pour comme son nom l’indique “ oublier l’espace d’un wek-end les soucis de la semaine ”, est en plein boom: “ Chaque fois que je rentrais du travail, je cherchais en vain avec qui partager les souvenirs du pays. Dès que l’on m’a proposé de faire partie d’une association qui permette cet échange, je n’ai pas hésité ”, confie à son tour R. Epessè, un des membres des “ Sans Soucis ”, regroupement dans lequel on trouve autant d’hommes que de femmes et qui est présidé par H. Nséké. N’allez surtout pas conclure trop rapidement que pour les membres de ces regroupements tout pour le mieux dans le meilleur des mondes : “ Je faisais partie de l’une de ces associations, il y a quelques années déjà. Nous cotisions de l’argent pour épauler celle d’entre nous qui était frappée par un coup dur. Mais j’ai été désagréablement surprise de constater qu’à la mort de mon père, même le bureau du mouvement dont j’étais pourtant la trésorière, m’a tourné le dos. Je n’ai rien compris. Alors, j’ai décidé de quitter cette organisation ”, témoigne Rachel B. à Paris, qui doute désormais des intentions affichées par ce type de regroupements.
Mais il y a aussi des rencontres plus désintéressées, comme la désormais incontournable partie de football du dimanche matin : “ Après des soirées parfois bien arrosées le samedi et parfois excessives sur le plan alimentaire, il est toujours important d’être présent au décrassage du matin. Nous organisons des matches en toute décontraction avec ceux de nos compatriotes qui veulent courir après un ballon de football ”, indique Henri, un des nombreux inconditionnels de ce rendez-vous dominical, où l’on peut croiser sur une même aire de jeu, des anciennes gloires sportives, des artistes et des Camerounais beaucoup moins connus. Il faut aller au-delà de la simple tenue arborée par les uns et les autres pour se souvenir qu’un Mbida Arantès conserve de beaux restes des années où il portait fièrement le maillot frappé de la tête de lion. Même si intégration ne rime pas forcément avec assimilation, les Camerounais comme bien des communautés qui vivent à l’étranger, veulent emporter avec eux les boutures de leurs racines. Une manière de marquer leur différence et donc l’attachement à ce qui fait l’essence de cette nation dont on ne cesse de dire qu’elle est une Afrique en miniature.
Source : Le Messager
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