Elle risque d’être emportée par le virus de la contrebande et de la contrefaçon qui fait des ravages dans la zone industrielle de Bassa. Dans sa lutte pour la survie, Cicam a initié un train de mesures pouvant permettre de sauver ce qui peut encore l’être à court terme. Si elle n’entend pas encore mettre la clé à la porte -scénario catastrophe mais de plus en plus envisagé- la société est cependant engagée dans un programme d’ajustement d’effectifs. Concrètement, un plan social ciblant 200 personnes est quasiment achevé. Il ne reste plus que la publication des noms des partants et son exécution.
Comme on peut l’imaginer, l’ambiance n’est pas à la fête en ce moment à Ndokoti, siège de l’entreprise. Bien qu’elle soit lourde, les gens continuent néanmoins de se dire " bonjour " dans les couloirs comme on a pu le constater mardi dernier. Le licenciement de 200 personnes sur les 1200 qu’emploie la société est donc l’une des conséquences directes de la crise de la contrebande qui asphyxie les manufactures de la capitale économique. Pendant que certains employés s’apprêtent à quitter la boîte, la société vient d’enregistrer l’arrivée en son sein d’une expatriée de nationalité chinoise. Et les questions fusent. Une entreprise chinoise va-t-elle racheter la société pour mieux organiser la production et l’écoulement du compétitif textile chinois, objet d’un grand débat en ce moment. Quelles conséquences socio-économiques l’arrivée de la Chinoise peut-elle avoir ? Pour l’instant, ce ne sont que des interrogations. Pierre Regenet au fait des enjeux du dossier du textile reconnaît l’existence des contacts, " lointains " certes, mais " réels " quand même entrepris par une société chinoise d’une part et certaines entreprises européennes d’autre part. Sans confirmer, il ne dément non plus l’intérêt dont est l’objet Cicam.
Ce dernier développement de la crise de la contrebande ne surprend pas les observateurs avertis. Depuis quelque temps environ quatre ou cinq mois, les dirigeants de cette entreprise tirent la sonnette d’alarme. Selon une étude réalisée par Nicolas Njoh, personne-ressource de ce secteur, par ailleurs directeur de Newco, une filiale de la Cicam, l’entreprise ne contrôlerait à peine que 3% des parts de marché! Dérisoire. Les grands points de pénétration des marchandises sont Fotokol, Makari et Kousseri dans l’Extrême Nord, Bourhatchneni, Dourbeye, Tcheboa dans le Nord, Eyumojouk, Ekok-Ikom dans le Nord-Ouest, Idenau, Tiko dans le Sud-Ouest, Youpwé et le port de Douala dans le Littoral, Bitam et Abang Minko dans le Sud. Les produits écoulés se vendent à des prix défiant toute concurrence. Exemple. Un pagne Cicam de marque " Mandoula " est vendu à 4.400 F. Le même produit fabriqué au Nigeria coûte 2000 F. Celui réalisé en Chine, en Inde ou au Pakistan est proposé à 1800 F ! " Ce qui n’est pas possible si l’on prend en compte les coûts très élevés de fabrication. Aucune entreprise peut vendre raisonnablement les marchandises à ce prix là et qui plus est quand elle est situation d’importatrice", s’emportait récemment Nicolas Njoh au cours d’un débat au Gicam. Le réseau bénéficie donc des complicités locales qui se sucrent sur le dos des industries locales et de l’Etat. Fataliste, le directeur général de Cicam pense que malgré tous les efforts de sensibilisation menés, il ne voit pas de changement possible à l’horizon. Conséquence, il commence à tirer les leçons de cette regrettable situation. Cicam ne file plus le bon coton.
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