Sarkozy invite Biya à améliorer la gouvernance au Cameroun
(25/07/2009)
Nicolas Sarkozy a invité Paul Biya, au pouvoir au Cameroun depuis 27 ans malgré des contestations, à améliorer la gouvernance et la démocratie dans son pays, fait savoir la présidence française.
Par Le Nouvel Observateur
Lors d'un déjeuner de travail d'une heure, le président français a évoqué "librement" avec Paul Biya la situation intérieure du Cameroun, "y compris les questions de gouvernance, de démocratie et de droits de l'homme", a précisé l'Elysée.
"Il a dit au président Biya que les efforts des dernières années devaient être poursuivis et approfondis", a-t-on ajouté de même source. "Il a rappelé que la bonne gouvernance était la condition essentielle du développement."
Selon l'Elysée, Nicolas Sarkozy a également jugé "essentiel" l'organisation d'élections dans les pays africains.
Paul Biya a remplacé fin juin sans explication son Premier ministre Ephraim Inoni, qui était en place depuis plus de quatre ans et tentait d'obtenir du Fonds monétaire international une aide pour amortir l'impact de la crise financière mondiale.
Paul Biya a dû faire face à une vague de mécontentement en raison de la hausse du coût de la vie et le gouvernement a annoncé en juin des réductions de 25% des prix de produits de base tels que le riz, le sel ou le poisson.
En 2008, un amendement constitutionnel l'autorisant à briguer un nouveau mandat en 2011 avait provoqué de violentes manifestations, greffées sur des émeutes de la faim.
En dépit d'un PIB supérieur à celui du Ghana ou du Sénégal, le Cameroun est à la traîne dans des domaines comme la santé et l'éducation, et il est considéré comme l'un des pays les plus corrompus d'Afrique.
Dans une interview accordée en mars à Reuters, le cardinal de Douala a estimé que la corruption et la mauvaise gouvernance alimentaient les frustrations et que la jeunesse du Cameroun chasserait le gouvernement actuel, en cas d'élections libres.
"Nous sommes plus proches d'une dictature que d'une démocratie", avait ajouté Mgr Christian Tumi.
L'opposition et des représentants de la société civile camerounaise accusent Paul Biya d'avoir truffé de partisans une nouvelle commission électorale censée être neutre.
Le Collectif des organisations démocratiques et patriotiques de la diaspora camerounaise prend encore moins de gants.
Le Code avait lancé un appel à manifester vendredi à Paris pour protester contre "les honneurs" accordés par la France "au dictateur Paul Biya" et estimé que la "Françafrique" reprenait "du poil de la bête sous la non-rupture de M. Sarkozy".
"La démocratie, la gouvernance et les droits de l'homme sont des préoccupations constantes de la France et du président, en Afrique comme partout ailleurs", assure pour sa part l'Elysée.
L'entretien entre Nicolas Sarkozy et Paul Biya s'inscrivait dans le prolongement d'une visite effectuée au Cameroun en mai par le Premier ministre français, François Fillon.
La France et le Cameroun avaient alors signé un accord de partenariat dans le domaine de la défense et un accord de gestion concertée des flux migratoires.
Selon l'Elysée, les deux chefs d'Etat ont notamment parlé vendredi du "contrat désendettement-développement", dont le Cameroun est le premier bénéficiaire de la part de la France.
Ce dispositif permet de transformer la dette bilatérale en dons à hauteur de 537 millions d'euros sur cinq ans (2006-2010), à condition que ces sommes servent à financer des projets définis par Paris et Yaoundé dans la santé, l'éducation, les infrastructures, le développement agricole et l'environnement.
Selon l'Elysée, Nicolas Sarkozy a assuré Paul Biya que la France maintiendrait son niveau de coopération avec le Cameroun malgré la crise et les contraintes budgétaires liées à celle-ci.
Après l'entretien, Paul Biya a qualifié d'"excellentes" les relations franco-camerounaises et fait état d'une "concordance de vues presque parfaite" sur "la plupart des sujets".
Il a invité Nicolas Sarkozy à se rendre au Cameroun, pays jusqu'à présent omis des tournées africaines du chef de l'Etat français. Selon l'Elysée, celui-ci a répondu qu'il souhaitait aller au Cameroun, mais sans fixer de date.
Voir la vidéo
Voir aussi toutes les vidéos sur la visite de Paul Biya en France : son entretien avec Christine Lagarde et Jacques Toubon, sa visite à Bordeaux...