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Richard Munteh Ndula : J'étais devenu un mendiant au Sdf
(19/11/2009)
Le bateau Sdf est en train de prendre de l'eau de toute part. C'est une lapalissade de le dire.
Par Michel Ferdinand (Quotidien Mutations)
Le parti de Ni John Fru Ndi ne payerait pas ses employés.
Le parti de Ni John Fru Ndi ne payerait pas ses employés.
Après des actes de défiance perpétrés par des élus du parti à l'instar des maires qui viennent d'être réhabilités et de l'un de ses députés à l'Assemblée nationale, la formation politique conduite par John Fru Ndi a visiblement du mal à garder le cap. C'est maintenant au tour de l'un des proches collaborateurs du Chairman de prendre le large et de se livrer en déclarations sur la gestion de la première formation politique de l'opposition au Cameroun. Des déclarations qui mettent à mal la gestion non seulement des ressources humaines, mais aussi financières de cette formation politique dont l'aura n'a eu de cesse de décroître au fil des années.

Le plus dur, sans doute pour John Fru Ndi et les siens, est sans contexte le jour choisi par Richard Munteh Ndula pour rendre son tablier (le 6 novembre, jour de l'accession au pouvoir du chef de l'Etat Paul Biya, et ce à la suite d'un discours dans le fief même du parti de Philémon Yang, le chef du gouvernement) et la destination prise par l'intéressé, les rangs du Rdpc, le "grand ennemi" d'en face. L'homme de 29 ans remet en cause le flou qui entoure la gestion des ressources financières issues de l'appui de l'Etat au Sdf. Une récrimination qui n'est pas nouvelle et qui tend à démontrer que les problèmes de gouvernance ne se trouvent pas toujours là où on les imagine.

Mais on ne peut quand même qu'être surpris par le temps mis par l'intéressé pour se rendre compte de ce que rien de bien ne se construisait dans le Sdf et surtout du fait qu'il a contribué d'une façon ou d'une autre à asseoir ces pratiques en les cautionnant. Il est tout aussi comptable des accusations dont il affuble son "ancien employeur". Mais une chose est certaine, dans le camp des irréductibles du Chairman, il y en a toujours, ce départ constituera certainement un non événement.


Pourquoi avez-vous démissionné de votre poste de secrétaire particulier du président national du Social Democratic Front (Sdf) ?

J'ai démissionné depuis le 6 novembre 2009. Et quand je l'ai fait, il y a des cadres de ce parti qui m'ont rencontré pour me faire changer d'avis. A ce moment-là, ma lettre de démission n'avait pas encore été portée à l'intention du public. Mais, je leur ai dit que trop, c'est trop. Je ne pouvais plus le supporter. Surtout que je ne comprends pas comment je peux travailler pendant trois ans sans avoir un salaire. J'avais bien envie de savoir comment et combien on devait me payer. Le plus souvent, il fallait attendre que l'Etat verse des fonds au Sdf pour qu'on me donne 320.000 FCfa au bout d'un an. Ça veut dire que je touche combien par mois. Voilà toute l'interrogation. A un moment, certains responsables ont cru que je blaguais. J'ai pris ma décision de partir et je suis parti. Je pense qu'on ne doit pas traiter un être humain de la sorte.

Aviez-vous un contrat de travail en bonne et due forme avec votre employeur?

On ne m'a pas pris en route. J'ai fait une demande d'emploi et j'ai été recruté pour travailler comme secrétaire particulier. C'était accompagné de mes diplômes de licence en sciences politiques obtenue à l'Université de Buéa en 2003 et de Maîtrise en droit dans le même domaine en 2004 à l'université de Yaoundé II à Soa. J'ai une lettre de recrutement signée le 1er novembre 2006 par N.A Ngwa, secrétaire administratif au Sdf. Je suis d'ailleurs le seul à en avoir de tous ceux qui travaillent aux côtés du chairman comme Sp, protocole ou chauffeur. Aucun d'entre-nous n'est affilié à la Cnps. Je vous le dis en connaissance de cause.

Combien avez-vous perçu, en termes de salaire, entre la date de votre recrutement en novembre 2006 et celle de votre départ le 6 novembre 2009 ?

Je n'ai rien perçu. Même pas 5 francs. Quand j'ai été recruté, j'ai passé sept mois sans salaire. C'est quand ma femme a accouché d'une deuxième fille qu'on m'a remis 50.000 FCfa. Après l'embauche, je n'ai plus rien eu. Je ne suis pas seul dans cette situation. Je le dis aujourd'hui parce que je n'y suis plus. Et puis, il faut sauver ceux qui sont restés. Puisqu'ils ont décidé de ne plus parler. Aucun personnel qui travaille autour du chairman n'a de salaire à la fin du mois. Dans ma lettre de recrutement, mon traitement salarial ne transparaissait pas. J'ai l'impression que c'est une maffia bien organisée pour arnaquer des jeunes comme moi. J'étais le sixième Sp du Chairman, mes prédécesseurs ne sont plus au Cameroun. Ils ont préféré l'exil. Mais, moi je suis un intellectuel et j'ai décidé de rester dans mon pays pour me battre. Je parle aujourd'hui de ma situation au Sdf, tout en évitant de parler des secrets de ce parti. Ce n'est pas parce je suis actuellement dehors que je dois tout dire en mal.

Aviez-vous eu des gratifications ?

Après douze mois, on venait nous dire de décharger 300.000 ou 320.000 FCfa, en disant que le parti a eu des fonds de l'Etat pour son fonctionnement. On le faisait en secret, dans une chambre. Je pense que ce n'est pas une faveur. C'est un droit. Quand on travaille, on a droit à un salaire. Je n'étais pas seulement Sp, je faisais un peu de tout. Je dois m'occuper de ma famille. Je suis marié et père de quatre enfants. Je dois envoyer mes enfants à l'école, les nourrir et m'occuper d'eux quand ils sont malades. Je ne pouvais pas le faire, compte tenu de mon traitement.

Comment avez-vous pu vivre sans salaire pendant trois ans ?

Il y a un phénomène qui se passait. Lors des événements, nous étions obligés de nous courber devant des députés ou maires. A la sortie d'une rencontre, on les abordait pour avoir 5.000 ou 10.000 FCfa. Nous étions devenus des mendiants. Ceux que j'étais trouvé sur place le font depuis 1990.

Ce n'est pas un hasard si votre lettre de démission est signée un 6 novembre 2009 ?

Le 4 novembre dernier, j'ai suivi le message du Premier ministre Philémon Yang en visite à Bamenda. Ce message m'a intéressé. Et je me suis dis qu'il ne fallait plus continuer à perdre mon temps au Sdf. Je m'étais déjà bien apprêté pour démissionner du Sdf, mais il fallait attendre une grande occasion comme celle-là. Le 6 novembre est un jour historique au Cameroun, c'est le jour où le président de la République, Paul Biya, accède à la magistrature suprême dans notre pays. En démissionnant ce jour-là, ma lettre avait un peu plus de poids.

Qu'est ce qui vous a plu dans le message du Pm ?

Quand les élites du Nord-Ouest ont exprimé les attentes de cette région par rapport au gouvernement, il a dit qu'il n'est pas seulement le Premier ministre du Nord-Ouest, mais celui de tout le Cameroun. C'est dire que c'est un homme d'action qui a une vision. Les élites du Nord-Ouest ont pensé que le temps était venu pour elles de manger. Elles se sont trompées. Le Pm a répondu que, s'il faut manger, c'est tout le Cameroun qui passera à table.

Il y en a qui pensent que vous avez été manipulé par des gens qui veulent faire disparaître le Sdf de la scène politique ?

Pas du tout. Je n'ai rien reçu de qui que ce soit. En tout cas, personne ne m'a contacté pour faire ce que j'ai fait. Je suis parti du Sdf en mon âme et conscience. J'ai même pris mes proches à contre-pied, ils ont découvert ma position dans certains médias. Cette décision m'est venue du fond du cœur. J'ai rejoint le Rdpc et je suis même fier de l'avoir fait. Personne ne doit être négligé dans une société. Un enseignant d'université à Soa nous le disait en sociologie d'organisation. Au Sdf, les gens vont tout dire aujourd'hui, que j'étais incompétent. C'est faux. Ils veulent tout simplement me noyer.

Le chairman du Sdf, Ni John Fru Ndi, était-il au courant de vos misères ?

Comment n'était-il pas au courant ? Je me plaignais chaque fois chez lui. Presque tous les maires et députés du parti le savent. Ils savent que le parti ne nous paie pas. Si rien n'est fait, je vais pouvoir saisir la justice pour entrer dans mes droits, percevoir mes arriérés de salaire, et tout ce qui est lié à l'affiliation à la Cnps. Si j'en veux à quelqu'un, c'est au Sdf qui m'a recruté. Je n'ai aucun problème avec son chairman.

Après votre lettre de démission, des responsables du Sdf vous ont-ils joint pour vous demander de revenir sur votre décision ?

Oui. Ils sont nombreux qui m'ont appelé. Je ne peux pas citer des noms dans les médias. Ils souhaitaient qu'on arrange ma situation. Je leur ai dit qu'il était trop tard. En politique, il faut savoir quitter les choses. J'ai déjà décidé, je suis désormais au Rdpc. Je ne parle pas seulement, je suis un travailleur.

Comment un jeune de 29 ans comme vous entend-t-il refaire sa vie pour éviter d'autres frustrations ?

C'est rien. Je ne peux pas dire que j'ai perdu trop de temps. Ce que j'ai fait, c'est une expérience qui va m'édifier dans la vie. Si non, je ne devais même pas savoir ce qui se passe dans un pays comme le nôtre. Je suis courageux. On le sait dans mon village [Babungo dans le département du Ngoketunjia, région du Nord-Ouest]. Je ne compte sur personne pour me faire une vie, mais si arrive je ne peux pas cracher dessus. Je ne suis pas allé à l'université pour croiser les bras.


Source: Quotidien Mutations


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