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Opinion : quel profil pour rentrer au Cameroun ?
(18/02/2008)
La question du retour en Afrique ont toujours été au centre des préoccupations des jeunes immigrés. Mais les diplômés auront-ils réellement une place au soleil à leur retour ?
Par Yann Yange

Tout le monde connaît plus ou moins le dicton populaire qui veut qu'on ne soit jamais mieux ailleurs que chez soi. En effet, cette assertion se veut de plus en plus remise à l'ordre du jour au vu de la situation du continent noir et du climat de discrimination dans lequel les Africains sont contraints de vivre et parfois, de survivre en Europe. Les nombreuses questions telles que “quand vais-je rentrer ?”, “devrais-je rentrer?”, “pourquoi rentrer ?” reviennent ainsi au goût du jour pour poser inéluctablement sur la table, le débat sur la fuite des cerveaux et celui du retour des diplômés en Afrique. Plus particulièrement au Cameroun.

S'il nous paraît clair au vu des différentes réalités, de la détresse morale et de la misère matérielle auxquels notre pays est en proie, qu'il est impératif qu'un maximum de diplômés fasse leur retour au bercail, il serait malgré tout utopique de penser que le système en place est savamment conçu pour les accueillir tous et leur trouver une place au soleil. Il n'en n'est malheureusement rien. Pour les jeunes de la diaspora, de plus en plus nombreux en occident, de la France à l'Allemagne, de la Grande Bretagne à la Norvège, en passant par l'Espagne ou le Japon, plusieurs centaines voire des milliers sortant chaque année des universités parfois les plus prestigieuses, les inégalités sociales prévalant sur place, au Cameroun, peuvent continuer à peser sur leur future réintégration à leur retour.

En effet, Il s'avère que, comme les trois classes, bourgeoise, moyenne, “ouvrière”, qui existent au Cameroun, il existerait plus ou moins trois classes d'étudiants Camerounais qui, de par leur appartenance à telle une ou à telle autre de ces classes, pourraient voir leur retour totalement compromis ou alors, à l'inverse, extrêmement facilité. Même si ces trois classes, que nous présenterons ci-dessous, ne prétendent pas être entièrement exhaustives des cas de figures d'immigrés Camerounais que l'on peut rencontrer en occident, elles n'en restent pas moins indicatives d'une réalité qui prévaut dans certains milieux estudiantins aujourd'hui.


On retrouve donc ainsi, pour une première classe d'étudiants, ce qu'on a qualifié de privilégiés : ceux là, sont des enfants d'hommes politiques, d'hommes affaires et des décideurs Camerounais qui après une scolarité très souvent normale et linéaire dans un grand lycée de Douala ou Yaoundé, ou une école Française, sont arrivés en France (ou ailleurs) avec tous les avantages liés à leur rang social : obtention aisée de visa, capacité de logement facile dès l'arrivée à l'étranger, facilités d'inscriptions et rentes mensuelles assurées pendant presque toute l'étendue de la scolarité. Les parents eux, attendant impatiemment le retour des enfants, pour leur assurer une place dans une grosse structure ou les mettre aux commandes d'un groupe familial. Les jeunes de cette catégorie, n'ont clairement aucune raison de rester en occident, n'ayant aucune problématique d'ordre matérielle ou financière à traiter. Ils peuvent s'envoler directement pour le Cameroun (après une scolarité après bac généralement très rapide compte tenu des facilités) où très souvent, une place au soleil les attend, et s'atteler ainsi, à la difficile tâche de remettre le Cameroun sur les bons rails s'ils en ont un tant soit peu la conscience.

La seconde classe d'étudiants est constituée des jeunes de la classe moyenne qu'on pourrait appeler les “néo-battants”, les plus nombreux, dont les parents bénéficiaient d'un semblant de prospérité jusqu'à l'avènement de la crise économique, et qui ont malheureusement vu leurs richesses s'amenuiser au début des années 90 avec la dévaluation et ses corollaires. Ces parents vivent plutôt décemment au pays, ont toujours un large réseau de contacts et ont su trouver les ressources minimales pour envoyer leurs enfants étudier en occident, tout en les laissant en général, par la suite, après un ou deux ans, à eux-mêmes, la manne financière ayant commencé à faire défaut avec le temps. Ces enfants ont vécu une enfance plutôt sans difficulté matérielle, sont arrivés en Europe sans grand problème et ont réellement été confrontés aux difficultés de la vie après quelques années en occident, au moment où ils ont compris que le Cameroun de l'avant crise n'était plus ce qu'il était et qu'il était temps de s'assumer. Ces jeunes vivent souvent de petits boulots (baby sitting, cours de soutien, télémarketing, gardiennage, Mc Do, ...) en même temps qu'ils effectuent leur scolarité. Ce qui peut parfois expliquer le fait que les diplômes bac + 5 s'obtiennent souvent en 6, 7 ou 8 années après le bac. Voire plus. Mais dans tous les cas, les jeunes de cette catégorie sont très souvent ceux qui ont la conscience scolaire la plus affûtée, dans ce sens qu'ils savent qu'ils n'auront pas d'autre voie de réussite s'ils n'obtiennent pas leur parchemin, et que le bilan de leur virée occidentale ne pourra être que mitigé. Pour cette classe de jeunes, les plus motivés - qui n'auront pas peur de prendre des risques après des années de Mc Do et baby sitting - devront rentrer au Cameroun, profiter des réseaux tissés par les parents avant la déchéance et, s'atteler à la tâche de redressement de notre pays. Ceux là ont à quelque chose près, les mêmes opportunités de retour que les privilégiés. Par contre, une partie de ces jeunes restera en occident pour des besoins de sécurité financière pour éviter les risques de perte d'emploi en cas de déchéance des parents.

La troisième partie des jeunes et la moins bien desservie par la nature économique et politique Camerounaise, et qu'on a qualifié de “débrouillards” est celle issue de la classe pauvre. Fils d'agriculteurs, de petits commerçants et parfois d'enseignants, ils sont parfois venus en France de leur propre chef et par leurs propres moyens, car y voyant l'eldorado. Parmi ceux-là, il y a ceux qui n'ont pas la possibilité d'étudier arrivés ici, qui n'ont pas de papiers et qui doivent survivre de débrouillardise, de petits jobs en tout genre pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs familles restées sur place. Pour cette dernière catégorie, ils doivent continuer a se battre en France et à économiser, en espérant qu'un jour, quand les choses se seront améliorées, ils pourront repartir créer quelque chose. Il y a malgré tout parmi ceux là quelques uns qui réussissent plutôt brillamment, avec de bons diplômes, mais qui, même s'ils rentrent au Cameroun, du fait qu'ils n'ont aucune connexion, risquent de se retrouver à la rue ou sans travail à la hauteur de leur talent. Pour ceux là aussi, il vaut mieux rester encore en occident un moment.

Finalement, si le retour au Cameroun doit se poser dans la tête de tous comme un impératif - même s'il ne se réalise pas par la suite - il serait sage pour tous les jeunes diplômés de le préparer en prenant en compte toutes sortes de paramètres liés à la conjoncture économique et aux besoins de la société Camerounaise ; en allant bien au delà des compétences intrinsèques qu'on peut avoir dans un domaine précis. Sinon, ce retour peut s'avérer être totalement inefficient, avec ce que ça peut générer comme frustration individuelle d'abord, aux répercussions collectives très importantes par la suite.

Car, on sait tous ô combien, notre jeunesse a besoin en son sein, plus que que de gens qui échouent, de modèles de réussites et surtout, de modèles de chemins à emprunter.

Note : ce texte a été publié pour la première fois en 2005 par la rédaction.








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