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Martin Abéga : L'Etat doit exiger une bonne compensation financière concernant les APE
(23/01/2009)
Le Secrétaire Exécutif du Groupement inter patronal du Cameroun revient sur les conséquences de l'accord d'étape signé par le Cameroun et l'Ue.
Par Monique Ngo Mayag
Martin Abéga estime le Cameroun lésé dans la signature de l'APE avec l'Union Européenne.
Martin Abéga estime le Cameroun lésé dans la signature de l'APE avec l'Union Européenne.
En quoi se résume l'accord de partenariat économique (Ape) intérimaire signé le 15 janvier dernier entre le Cameroun et l'Union européenne?

Le Cameroun et la commission de l'Union européenne (Ue) ont en effet signé ce qu'on appelle un accord d'étape qui, comme son nom l'indique, est une étape intermédiaire qui permet d'attendre la signature de l'accord de partenariat économique (Ape) proprement dit, qui lui ne sera pas signé entre le Cameroun et la commission de l'Union européenne, mais plutôt entre la commission de la Communauté économique et monétaire d'Afrique centrale (Cemac) et la commission de l'Union européenne. Puisque c'est la commission de la Cemac qui est censée négocier l'accord d'étape pour les différents pays de la sous région. Il y a eu un accord d'étape parce que c'est en 2007 que le Cameroun avait été sommé par l'Ue de signer ledit accord. Car du point de vue de l'Ue, les règles de l'Organisation mondiale du commerce (Omc) ne permettait pas à ladite Ue, ou ladite commission européenne, d'acheter ses produits agricoles en provenance du Cameroun à des prix concurrentiels.

Nous, en tant que secteur privé, nous disons que ce n'est pas vrai. L'Ue a tenu. La preuve que nous avons, c'est que l'on nous avait dit que le dernier délai était fixé au 31 décembre 2007, il fallait signer sinon, ce serait grave. Vous constatez avec moi que ce n'est qu'en janvier 2009, donc plus d'un an plus tard, que le Cameroun a finalement signé l'accord d'étape. Ce qui veut dire que ce n'était forcément pas vrai qu'il y avait un risque grave. La deuxième réalité qu'il faut comprendre à travers cette signature de l'accord d'étape, c'est que comme le dit la commission de l'Ue, il permet au Cameroun de ne pas souffrir de la taxation en terme de douane pour la vente de ses produits sur le territoire de l'Ue. Mais il faut aussi relever que cet argument n'est pas forcement un argument qui résiste à l'analyse dans la mesure où le Cameroun, suite à ce qu'on appelle l'accord de Cotonou, bénéficiait déjà de cette mesure. Certains soutiennent qu'en signant on va augmenter le niveau d'exploitation, c'est faux. Puisque depuis l'accord de Cotonou, les exploitations du Cameroun hors pétrole, n'ont pas du tout augmenté.

On a envie de croire que la signature de cet accord par le Cameroun s'avère inutile…

Je ne juge pas les décisions politiques qui sont prises par mon pays. Je constate simplement que mon pays a pris une décision souveraine. On ne peut plus rien y faire, l'accord est signé. Mais notre devoir en tant que patronat consiste aujourd'hui à attirer l'attention de notre Etat sur la nécessité pour lui, de s'accrocher à l'intégration sous régionale, de manière à faire en sorte que l'accord qu'on va négocier désormais au niveau sous régional, que cette négociation permette au Cameroun de se rattraper. Parce que, il faut savoir qu'avec la signature de l'accord lui-même (Ape), le Cameroun va perdre la fiscalité des portes. C'est-à-dire que les produits qui seront importés de l'Ue, ne payeront plus de taxes douanières. Mais la conséquence, c'est que cela va avoir un impact fiscal. Et l'impact fiscal veut dire que le Cameroun va perdre des rentrées financières qui découlaient de la taxation des produits européens. Mais d'autre part, je dis : attendez, il ne faut pas vous plaindre parce que les produits européens coûteront moins chers au Cameroun. Oui, c'est vrai, mais ce que vous oubliez, c'est que pour acheter les produits moins chers, il faut de l'argent. Or, si vous ne travaillez pas, comment allez-vous avoir de l'argent ? Vous travaillez par exemple dans un organe de presse, mais toujours est-il que vous devez être payé. Si le journal n'a pas d'annonceurs, de quoi vont vivre les journalistes de cet organe de presse ? Donc, vous voyez que ce n'est pas une affaire qui ne vous concerne pas vous les journalistes. Elle vous concerne.

Parce qu'il ne faut pas qu'on vous trompe en vous disant que les produits vont coûter moins chers. Mais si les entreprises camerounaises ne sont pas prêtes, ne se sont pas mises à niveau pour pouvoir être compétitives, pour pouvoir résister à la bourrasque, qu'est ce qui va arriver ? Elles vont fermer. Et le taux de chômage va augmenter. Il y aura de plus en plus de chômeurs dans cinq ans, dix ans, quinze ans, date à laquelle on aura finalisé l'accord de partenariat économique.

Qu'est ce qui doit donc se passer?

Vous comprenez donc pourquoi, le Gicam se bat et continue de dire qu'il est nécessaire de renforcer les capacités des entreprises, de les mettre à niveau et surtout de faire en sorte qu'on obtienne de l'Ue, qu'elle s'implique dans le développement des infrastructures. Qu'elle s'engage aussi à nous dire comment elle va compenser ce qu'on appelle l'impact fiscal. C'est-à-dire les pertes fiscales que le Cameroun va enregistrer. Parce que si le Cameroun n'obtient pas un remboursement ou du moins une compensation de cette perte fiscale, il va demander à des entreprises de les payer. Les entreprises vivront déjà dans une situation très difficile, très délicate, elles vont encore mourir. Voilà entre autres, les dangers qui vont se présenter à nous dans quelques années.

Il est connu que le tissu industriel du Cameroun n'est pas compétitif. A votre avis, quels sont les ingrédients pour que nos industries s'arriment aux normes de qualité et de compétitivité ?

Nous devons une fois de plus mettre nos entreprises à niveau. Vous avez des normes qui existent aujourd'hui pour exporter en Europe, en occident, qu'il faut respecter. Mais pour respecter les normes, il faut acquérir les marchés. Par exemple, le Cameroun a signé des conventions notamment en ce qui concerne la presse, notamment la convention de Florence. Mais est-ce que le Cameroun respecte cette convention ? Du coup, les éditeurs payent le papier plus cher. Donc, cela impacte sur la compétitivité de la presse camerounaise. Par ailleurs, si vous prenez cet exemple là et que vous tenez compte de cette affaire de compétitivité des entreprises camerounaises, vous vous rendez compte que les entreprises camerounaises doivent acheter du matériel et il faut qu'elles soient accompagnées pour le faire. En Europe, quand on parle de mise à niveau, on accompagne les entreprises. Or, dans notre pays, on ne veut pas accompagner les entreprises. Vous avez vu la crise financière ? Vous avez suivi ce qui s'est passé en Europe, en occident, aux Etats-Unis ? On a demandé d'accompagner les entreprises. Mais chez nous, on ne veut pas accompagner les entreprises. On ne comprend pas que les entreprises sont très importantes pour le développement. Elles doivent être des partenaires de l'Etat.

Quelles sont les étapes qu'il reste à franchir aux Etats pour la signature effective des Ape avec l'Ue ?

Dans la logique de négociation, la négociation des Ape se fait par région. Il s'agit donc pour les pays de la Cemac, de continuer à négocier avec la commission de l'Ue pour atteindre un bon accord. L'occasion m'est propice pour souligner que comme nous l'avons toujours dit, le Gicam, le secteur privé n'est pas opposé à l'Ape. Nous sommes opposés à un mauvais Ape. Nous exigeons qu'on négocie pied à pied pour qu'on puisse ainsi signer un bon Ape, pour que chacun soit gagnant dans cette opération. Nous souhaitons vivement que l'Etat profite de la négociation au niveau sous-régional pour consolider le texte de l'Ape d'étape et demander une bonne compensation financière. Et pour cause !la communauté européenne envisage de mettre 597 millions d'euros (2008-2013) à la disposition de l'Afrique de l'Ouest dans le cadre du Pir. La somme promise à l'Afrique centrale est comparativement dérisoire. Bien entendu, ce que le Cameroun recevra au titre du 10ème Fed est tout aussi dérisoire par rapport à ce qui est réservé à la Côte d'Ivoire par exemple. C'est dire s'il est urgent que les suggestions du Gicam soient prises en compte à l'effet de subordonner la signature de l'accord d'étape à l'amélioration de son contenu et à l'obtention d'une allocation financière conséquente.

L'Etat consulte-t-il le Gicam avant la signature des différents accords ?

L'Etat nous sollicite, il nous consulte. Mais nous n'avons pas l'impression que l'Etat nous comprend. Parce qu'une fois que l'Etat nous a écouté, est-ce qu'il nous comprend? On ne sait pas. La preuve, il fait ce qui lui paraît bon. C'est comme ça partout. Mais, maintenant, nous souhaitons que l'Etat ne fasse pas simplement que nous entendre.



Source: Quotidien Mutations


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