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Célestin Bedzigui : Lapiro a été victime d'une double crucifixion
(31/03/2014)
L'homme politique a donné son avis sur les dernières années de Lapiro de Mbanga au Cameroun et en dehors. Ainsi que sur les circonstances de sa mort
Par 237 Online
Célestin Bedzigui
Célestin Bedzigui
Le décès de Lapiro de Mbanga dans la ville de Buffalo près de New York ne va pas porter bonheur à l’image du Cameroun ici aux USA, si on en croit certains observateurs. C’est aussi votre avis ?
La surenchère dans les spéculations est indécente comparée à la grande perte que le Cameroun subit avec la disparition de Lapiro de Mbanga. Les «observateurs» dont vous parlez feraient mieux d’avoir à cœur l’immense peine que vivent tous les Camerounais à travers le monde et au Cameroun, tellement Lapiro, son combat et les épreuves qui lui ont été infligées ont fini par avoir une place prépondérante dans notre subconscient collectif.

Personnellement, quel témoignage portez-vous à la mémoire de cet immense musicien ?
Ce n’était pas seulement un immense musicien ; c’était un «grand monsieur», avec ce qui va avec de générosité et de courage. Nous nous parlions très souvent et nous nous appelions «mon Beau»… Il m’a appelé il y a moins d’un mois et nous avons passé près d’une demi-heure au téléphone. Je l’exhortais à venir dans la région de New York City et tirer avantage de ce que des compatriotes ici ont des studios d’enregistrement chez qui il pouvait mettre des «choses» en boite.

Nous nous connaissions depuis le début des années 80, j’avais à cette époque eu à occuper les fonctions de Directeur Régional des Brasseries du Cameroun dans plusieurs régions du pays. Il avait coutume de venir me voir pour le sponsoring de ses activités d’artiste. Mais, c’est pendant la «Coordination» en 1991 que nos relations se sont solidifiées. Et je dois dire que c’est pendant la période des «villes mortes» que Lapiro s’est vu infliger les premières stigmates douloureuses qui l’accompagneront jusqu’à sa mort.

Vous parlez de stigmates ?
Loin de moi l’idée d’engager une polémique. Mais, il est nécessaire que la jeune génération et le public comprennent ce que Lapiro a enduré comme injustice et qui dans une certaine mesure aurait pu ou l’a probablement fragilisé. La disparition de Lapiro devrait donner lieu à une profonde réflexion sur ce qui se passe dans notre pays où des castes et des cliques n’hésitent pas d’infliger aux Camerounais des souffrances indicibles dont le coût humain devient intolérable. On peut à ce propos dire que Lapiro a subi deux crucifixions dans sa vie, ayant été successivement victime des «Bêtes» et des «Méchants».


Qui sont donc les « Bêtes » ?
Les « Bêtes » sont les « extrémistes » au sein de l’opposition de l’époque, qui étaient si prompts à qualifier de « traitres » ceux qui choisissaient une posture politique différente de la leur. Certains d’entre-deux ont survécu et écument la toile en procureurs autoproclamés qui distribuent des brevets de « vrais » ou de « faux opposant ». Ils sont les auteurs de la première crucifixion de Lapiro… Souvenez-vous du temps de « La Coordination ». Lapiro en était un des moteurs et animateurs. Nous étions dans une confrontation politique extrême avec le pouvoir. La praxis de la politique veut qu’on confronte ses adversaires pour que chacun évalue ses forces, pour finir par se parler pour « settle » la solution politique. Le régime avait un genou à terre et était prêt à céder. Biya ne contrôlait plus le pays et il nous revenait de faire preuve d’intelligence tactique. Un responsable du pouvoir a sollicite une conversation avec Lapiro qui ne l’a pas caché d’ailleurs. Lorsque la chose s’est sue, certains qui tenaient à monopoliser l’initiative au sein de la Coordination lui ont mis sur la tête le bonnet d’âne de «traitre»…

Je me souviens de ce jour, en Juillet 1991, à Akwa où, au prétexte qu’il était « un traitre », ceux qui les commandaient ont lancé contre lui une « horde » de fanatiques. Poursuivi par cette horde, il n’aura la vie sauve que parce qu’il eut le reflexe de s’engouffrer dans l’immeuble de la direction de la Sitabac de l’époque. S’il avait été rattrapé par ses poursuivants ce jour-là, il aurait été tué sur place et son cadavre brûlé. Pour Lapiro qui portait le «struggle» dans sa chair, d’être ainsi qualifié de « traitre » et éjecté du mouvement fut d’une extrême douleur. Il se voyait ainsi obligé de subir une décennie d’errance et de traversée du désert à l’extérieur et à l’intérieur du Cameroun, à se battre pour redorer son blason politique. Il évoquait toujours avec rage cet épisode sans manquer de pointer du doigt ceux qui en étaient les instigateurs dans la Coordination, que nous connaissions.

L’être humain est fragile et le traumatisme psychologique peut favoriser l’irruption de certaines pathologies. C’est en tout cas pendant cette traversée du désert que Lapiro ressentira les premiers symptômes de la maladie qui l’a emporté. Y a-t-il eu un lien de causalité entre sa traversée du désert et le début de sa maladie, à chacun de s’en faire une opinion. Celle d’un grand nombre est connue.

Et les « Méchants » alors ?
C’est le régime actuel évidement qui n’a pas hésité à emprisonner Lapiro pendant trois ans. Quelle raison sinon une insipide méchanceté peut justifier que Lapiro qui était déjà malade fut jeté en prison pendant trois ans dans les conditions médicales et de salubrité que l’on sait à la prison de New Bell après les événements de 2008? D’avoir dénoncé le « coup d’Etat juridique de Monsieur Biya » de modification de la Constitution en violation des accords de la Tripartite était-il un crime ? Les victimes des massacres qui ont suivi doivent rester dans notre mémoire. Nous devons y ajouter le nom de Lapiro. En gardant Lapiro en prison sous un motif fallacieux pendant ces années où il aurait profité pour suivre un traitement approprié, ce régime qui ne suit que ses phobies anti-démocratiques porte une partie de la responsabilité de la mort prématurée de Lapiro, comme hier celle de Bibi Ngota.

Comprenez-vous pourquoi il a refusé d’être enterré au Cameroun ?
Les deux épisodes que je viens d’évoquer pourraient suffire à nourrir une colère justifiée de Lapiro au moment où il nous quitte. De là à ce qu’il ait demandé que ses restes ne soient pas ramenés au Cameroun, à ce que nous avons appris, tant que le présent régime est au pouvoir, pourrait être compréhensible.

Quelle fut votre réaction en apprenant la libération de prison de Titus Edzoa ?
Nous avons été, il y a dix sept ans, la voix isolée dans la classe politique à dénoncer l’abomination de cette « affaire ». Que cette libération résulte d’un geste de Monsieur Biya cédant à l’interpellation de sa conscience ou de pressions exercées sur lui par des personnes ou institutions qui s’élevaient contre une injustice, le constat est patent : Il est mis fin à une Injustice ; La Vérité, et avec elles la Justice immanente, ont donc fini par prévaloir. Comprenez donc notre satisfaction, si discrète fut-elle.

L’annonce de la publication de plusieurs de vos livres a été remarquée ces temps derniers dans les medias sociaux…
J’ai en effet rendu publiques deux Trilogies, dont une politique et une économique que je gardais depuis un temps dans mes tiroirs. Enfin ! Diront certains… Les six livres sont le produit de 20 longues années de réflexion, d’observation et d’écriture.

Quel est le contenu de la Trilogie politique ?
Elle se compose des trois ouvrages suivants :

1- Ecrits et Débats Politiques (450 pages). A la demande de plusieurs de mes connaissances, j’ai sélectionné mes écrits les plus significatifs publiés dans les différents journaux depuis le temps de « La Coordination » en 1991. Cela permet de saisir le fil de ma pensée politique depuis toutes ces années.
2- La Maldémocratie (247 pages). Son sous-titre, « Essai sur la Maldémocratie » en Afrique Francophone, en donne le contenu.
3- Les Chemins de la Prospérité (219 pages) dont le sous- titre est ‘’Réflexion pour un Etat, une Economie et une Société Développées au Cameroun’’ propose un modèle et une stratégie de développement pour en faire un pays développé.

Et la Trilogie poétique ?
Elle est composée des recueils suivants:
1-Remember O Kameroun Mon Amour, avec une préface du Pr Franklin Nyamsi ; C’est un hommage aux Héros nationaux et Martyrs du Cameroun.
2-Mémorial contre l'Oubli, Préface par le Pr Ebenezer Njoh Mouelle ; c’est une rhapsodie pour les grandes causes et les grandes figures qui ont lutté pour la Justice et l’Egalite des peuples.
3- Temps et Vies. La Trilogie Poétique est déjà disponible en ligne chez Amazon, eBay, Barnes et Noble, Googlebooks. La Trilogie Politique le sera dans quelques semaines, le temps de la mise en ligne.


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