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Présidentielle camerounaise : Revue des candidats
(04/10/2011)
Après une première semaine intensive de campagne et alors qu’on approche de la date fatidique du 9 Octobre 2011, quelles sont les chances pour les uns et les autres de remporter cette élection ?
Par Yann Yange
Le Président Biya, favorii pour sa propre succession
Le Président Biya, favorii pour sa propre succession
Le Cameroun s'apprête à vivre sa quatrième élection pluraliste depuis son accession au multipartisme en Décembre 1990. Sur les 51 candidatures déposées pour cette élection qui aura lieu le 09 Octobre 2011, 23 personnalités ont finalement été retenues par la commission électorale (Elecam) et par la cour suprême du Cameroun, statuant en lieu et place du Conseil Constitutionnel. Petit passage en revue des candidats à cette élection : qui sont-ils, que valent-ils et quel est leur itinéraire politique ?

Les poids lourds

Paul Biya, John Fru Ndi, Adamou Ndam Njoya et Garga Haman Adji sont les poids lourds de cette prochaine élection au regard des scores qu’ils ont obtenus lors des précédentes échéances électorales. A eux quatre, ils ont représenté 96.6% des suffrages exprimés en 2004 avec respectivement 70.92%, 17.4%, 4.47% et 3.37% des voix.

Paul Biya, 78 ans, actuel chef de l'État en poste depuis près de 29 ans et bénéficiant de l’appareil d'État pour sa campagne, devrait se faire réélire au soir du 9 Octobre 2011 avec un score supérieur à 75%. Spécialiste des promesses en tout genre, le Président camerounais envisage à travers son programme dit des « grandes réalisations » de faire du Cameroun un « grand chantier » à partir de 2012.

L’inauguration de certains projets industriels, dont un à Kribi, a d’ailleurs été opportunément mis à son agenda de Président de la République, renforçant ainsi la confusion entre son statut de chef de l'État et sa position de candidat.

John Fru Ndi, 70 ans, opposant redoutable au début des années 90, a perdu de sa superbe. Son parti, malgré de nombreuses défections internes depuis vingt ans, est quand même parvenu à conserver quelques bastions notamment dans le Littoral et dans le Nord Ouest.

Malheureusement, le flou dans la ligne politique du parti – le SDF avait demandé aux Camerounais de ne pas s’inscrire sur les listes électorales avant de se rétracter à une semaine de la clôture des inscriptions – risque fort de couter quelques voix à son leader. John Fru Ndi devrait certainement faire un score autour de 10%, inférieur à celui de 2004 où il avait glané 17.4% des voix.

Les deux derniers poids lourds de ce quatuor sont Garga Haman Adji et Adamou Ndam Njoya, 67 et 69 ans, respectivement. Possédant une envergure incontestable dans le paysage politique camerounais et déjà candidats malheureux en 2004, leur quasi absence des plateaux de télévision au cours de cette première semaine de campagne démontre, s’il en était, que ces deux vieux briscards de la politique camerounaise comptent surtout sur leurs implantations régionales pour conquérir les suffrages des Camerounais. Originaire de l’Extrême Nord, province la plus peuplée du Cameroun avec 3 111 972 habitants, Garga Haman Adji va certainement tout miser sur la fibre régionale pour espérer gonfler son score.

Deux ou trois de ces quatre dinosaures de la politique camerounaise (73.5 ans de moyenne d’âge à eux 4) pourraient, même s’ils n’incarnent plus à l’avenir de leur pays, constituer le peloton de tête de l’élection à venir.


Les outsiders

Kah Walla est certainement la révélation 2011 de cette campagne électorale. Investie par le CPP (Cameroon People's Party), ce chef d'entreprise âgée de 46 ans, ancienne conseillère municipale à Douala et transfuge du SDF, est l'une des plus jeunes candidates à cette élection présidentielle.

Titulaire d'un diplôme en management aux Etats-unis, elle a essaimé depuis trois ans le Cameroun comme activiste sociale à travers son association « Cameroun O Bosso » avant d'investir le champ politique. Son programme de société baptisé « le Cameroun leader » tourne autour de deux slogans majeurs : « reconquérir notre pouvoir » (réforme des institutions, identité, code électoral, décentralisation) et «bâtir notre puissance » (Cameroun porte d'entrée de l'Afrique, grenier de l'Afrique centrale, transformation de l'économie informelle).

Candidate au bilinguisme effectif et dont la double culture rassure, Kah Walla est sans nul doute la très bonne surprise de ce cru 2011. Cela lui fera-t-il atteindre la barre des 5% ?

Bernard Muna, spécialiste des prétoires et ancien procureur adjoint au TPI du Rwanda, fait aussi partie des outsiders pour l’élection du 9 Octobre 2011. Transfuge du SDF et leader de l’AFP (Alliance des Forces Progressistes), cet avocat de formation de 71 ans en est à sa première élection présidentielle. Son projet de société se propose de repenser l'État autour d’une « organisation décentralisée de la République et des gouverneurs élus au suffrage universel ».

Se posant en adepte de la transition, Bernard Muna s'est engagé à ne faire qu'un seul mandat. Si sa filiation familiale - il est le fils de l’ancien premier Ministre Camerounais Salomon Tandeng Muna - peut lui attirer la sympathie de ses concitoyens et sa brillante carrière de juriste inspirer le respect, le principal écueil de Bernard Muna sera sa difficulté à rassembler des voix dans sa province d’origine où son ancien compagnon et frère d’armes, Ni John Fru Ndi, demeure encore bien implanté.

Jean-Jacques Ekindi, 66 ans, est un des principaux outsiders à cette élection présidentielle. Surnommé le « chasseur de lion » pour sa détermination à vouloir faire partir Paul Biya du pouvoir pendant les « années de braise » début 90, cet ingénieur de formation a connu une longue traversée du désert avant de réapparaître sur la scène politique grâce une élection comme député du Wouri lors des élections législatives de Juillet 2007.

Réputé sérieux et rationnel, Jean Jacques Ekindi a fondé son programme sur la réforme des institutions (mise en place du fédéralisme), l’emploi des jeunes (mise en place de structure d’accompagnement et de financement) et le retour à la morale. Le candidat du MP (Mouvement Progressiste) en est à sa troisième participation à l’élection présidentielle. Ses scores antérieurs et la controverse autour de sa participation aux marches Sawa dites « anti Bamiléké » de 1996 ne laissent pas présager qu’il dépassera la barre de 2%. Il devrait néanmoins faire mieux que son score de 0.27% de 2004.

Les vieux routiers

Anicet Ekane est un vieux routier de la politique camerounaise. Ancien militant du parti indépendantiste historique camerounais, l’UPC, il quittera cette formation politique pour créer le MANIDEM en 1995. Après sa démission du poste de Président du MANIDEM en 2009, on pouvait penser qu’Anicet Ekane se retirerait de la vie politique.

Sa candidature à l’élection présidentielle du 09 Octobre prochain montre bien que l’ancien militant panafricaniste, âgé de 60 ans, a toujours l’intention de déloger Paul Biya de son fauteuil de chef de l’Etat. Portée par le projet du MANIDEM, le TRANSIPEC (transition politique et économique au Cameroun), la vision d’Anicet Ekane est de proposer une période de transition qui devra déboucher sur « la mise sur pied d’un gouvernement consensuel de transition démocratique, le lancement d’un large débat autour des institutions, la convocation par le gouvernement de transition des états généraux de la nation(EGN) pour l’élaboration d’une nouvelle constitution, d’un code électoral et d’un pacte social ». Avec la campagne qu’il conduit en ce moment, le candidat Ekane ne devrait pas dépasser les 1%.( En 2004, il n’avait obtenu que 0.35% des suffrages).

Albert Dzongang, 63 ans, est lui aussi un vieux briscard de la politique camerounaise. Transfuge du RDPC, cet enseignant de formation s’est présenté pour la première fois aux élections présidentielles en 1997. Très critique envers le mode de financement public de la campagne électorale qui, selon lui, met sur le chemin du palais présidentiel un certain nombre de candidats qui n’en ont pas la carrure, le candidat de la Dynamique milite pour une candidature unique de l’opposition, la seule chance selon lui de battre le Président Biya dans les urnes dans un scrutin à un tour.

Pourfendeur du tribalisme, Albert Dzongang considère qu’il y a en réalité deux ethnies au Cameroun : celle des « bouffeurs », comme il qualifie lui-même les détourneurs de fonds, et celle des Camerounais qui subissent au jour le jour les pesanteurs d’un quotidien toujours plus difficile. Si on peut lui donner le crédit de mettre la main dans le plat et de poser un certain type de problèmes fondamentaux sur la table (le financement des partis, la candidature unique, etc), le candidat de la Dynamique ne devrait pas dépasser les 1%.


Les bonnes surprises

Jean de dieu Momo, 50 ans, avocat de formation, ancien du TPI au Rwanda, fait partie des bonnes surprises de ce cru 2011. Personnage relativement connu de la société civile camerounaise, notamment pour ses actions en faveur de la promotion des droits de l’homme, il a été présent sur à peu près tous les grands événements médiatiques de ces dernières années. Et il s’est surtout fait remarquer avec l’affaire des neuf disparus de Bépanda qui lui a valu le surnom de « chasseur de généraux » pour sa détermination à voir les responsables des dérives du commandement opérationnel poursuivis et punis par la justice.

Pourfendeur insatiable des injustices, défenseur des « moto taximens » et des « jeunes émeutiers », Jean de Dieu Momo a fait son grand coup d’éclat lors de cette campagne présidentielle en essayant de lancer son premier meeting dans le village natal du chef de l’Etat Paul Biya, à Mvomeka. Son projet politique est centré sur plusieurs axes : la révolution agricole, l’emploi des jeunes et la réforme des grandes écoles publiques pour lesquelles il prône un recrutement au mérite et la fin de l’équilibre régional. Grâce à une légère connaissance de l’Extrême Nord où il a exercé à ses débuts, Jean de Dieu Momo compte créer la surprise. Il ne devrait cependant pas dépasser la barre des 2%.

A 44 ans, Olivier Bilé est, à l’instar de Kah Walla, l’un des plus jeunes candidats de ce cru 2011 mais aussi l’une des bonnes surprises. Enchaînant les plateaux de télé pour présenter sa vision du Cameroun qu’il a ancrée autour du concept de « foyisme politique » (gouverner dans l’amour et la crainte de Dieu), Olivier Bilé a l’expression limpide et le bagout que lui procure sa formation de communicant.

Transfuge de l’UPA (Union des populations Africaines) de Hubert Kamgang, la vision du candidat Bilé peut se résumer en plusieurs axes : la création de 500 000 emplois par an tout au long de son mandat, la sortie du franc CFA avec la création d’une monnaie appelée le « camer » et la révision de nos structures mentales et spirituelles pour mieux gouverner avec Dieu comme repère fondamental. Si sa candidature présente un certain intérêt, que ses passages médiatiques sont toujours de bonne facture et qu’il a sans aucun doute une bonne connaissance des problèmes de ses concitoyens, Olivier Bilé ne devrait pas conquérir des masses au soir du 09 Octobre. Score à priori : bien en deçà du 1%.

Les déceptions

Parmi les déceptions de ce début de campagne, Esther Dang, Ayah Paul Abine et l’un des opposants historiques, Victorin Hameni Bieleu. Les deux premiers, transfuges du RDPC, qui se sont révélés aux Camerounais l’un pour sa démission en fanfare du RDPC et l’autre pour son opposition au projet de modification de la constitution en 2008, étaient très attendus de par leur statut d’anciens poids lourds du parti au pouvoir.

Esther Dang, 66 ans, dont le parcours académique et professionnel – docteur en économie, ancienne directrice de la Société Nationale d’Investissement – indiquait que l’économie devait la clé de voute de son mandat, n’a pas convaincu en ce début de campagne. Les rares apparitions télévisuelles qu’elle a faites n’ont pas permis de consolider l’image d’une dirigeante porteuse d’espoir. A son crédit néanmoins, le fait d’avoir publié un programme économique extrêmement bien articulé sur la forme et téléchargeable sur son site internet de campagne. Une de ses mesures phares : le découpage administratif du Cameroun en pas moins de 26 régions pour créer des pôles de compétitivité extrêmement bien ciblés. La candidate du BRIC parviendra-t-elle à convaincre les Camerounais ? Rien n’est moins sûr. Elle devrait bénéficier de moins de 1% des suffrages.

Ayah Paul Abine, quant à lui, s’est fait connaître pour son opposition ferme au projet de changement de la constitution d’Avril 2008 souhaité par le Président Biya et porté par le RDPC, parti au pouvoir dont il était l’un des députés à cette époque. C’est à ce moment là que sa carrure politique s’est consolidée au sein de l’opinion. Présenté comme un fort en thème, notamment grâce à son rang de major de promotion à l’ENAM en 1976, ce magistrat de 60 ans fait une campagne extrêmement discrète. Anglophone d’origine, il devra batailler avec Kah Walla, Bernard Muna et l’inamovible John Fru Ndi pour conquérir quelques voix dans le Nord Ouest et le Sud Ouest. Il a peu de chances, vu son faible niveau de déploiement électoral, de parvenir à conquérir énormément de suffrages.

Victorin Hameni Bieleu, opposant qui s’est fait connaitre durant les années de braise et qui était un des leaders charismatiques de l’union pour le changement qui a secoué le pouvoir en place en 1992, n’est plus que l’ombre de lui-même. Incapable de renouveler les schémas politiques sur lesquels il a fondé son parti en 1991, le leader de l’UFDC, âgé de 62 ans, a reconnu à la télé qu’il n’allait faire campagne que dans sa région d’origine, le Haut Nkam, puis à Douala et peut-être à Yaoundé. Un déploiement minimal pour un score qui sera aussi minimal malgré le capital sympathie dû à son histoire politique personnelle dont il peut bénéficier. Il ne devrait pas atteindre la barre des 1% (il avait obtenu 0.31% des voix en 2004).

Les idéologues

Les deux idéologues de ce scrutin, au sens de promoteurs d’un idéal parfois utopiste de société, sont certainement Pierre Fritz Ngo et Hubert Kamgang. Ils sont certes candidats mais on a l’impression qu’ils sont surtout là, avant tout, pour poser un certain nombre de problèmes qu’ils estiment majeurs pour le Cameroun et qu’ils ont porté avec eux tout au long de leur existence. Pour Pierre Fritz Ngo, c’est l’écologie qui doit être au centre des préoccupations des Camerounais. Agé de 59 ans, le leader du MEC (Mouvement des écologistes du Cameroun) a pour crédo principal la protection des ressources environnementales du Cameroun : « Nous avons beaucoup de ressources qui doivent être protégées, et qui doivent être régénérées, pour le bien-être des Camerounais et des générations futures ».

Déjà candidat malheureux à l’élection présidentielle de 2004, il y a peu de chances que son message soit entendu. Mais il aura au moins eu le mérite de le porter. Il devrait être très en deçà des 1% (il avait obtenu 0.34% en 2004).

A l’instar du président du MEC, Hubert Kamgang, le candidat de l’UPA (Union des Populations Africaines) porte un message avec lui : celui du panafricaniste convaincu qui milite pour l’indépendance totale du Cameroun. Cette indépendance passe, selon lui, d’abord par l’indépendance monétaire qui doit être mise en œuvre par une sortie rapide de la zone franc et la création du monnaie nationale qui portera le nom de « Um », du nom du leader indépendantiste camerounais Ruben Um Nyobé. Ingénieur statisticien économiste de formation, âgé de 67 ans, Hubert Kamgang a développé ses idées dans deux ouvrages et les défend au quotidien au sein d’un mouvement qu’il dirige appelé le Mouvement Tchuidjang Pouémi pour l’éducation populaire en matière monétaire et économique.

Si ses idées sont louables et peuvent se séduire les pourfendeurs d’une France interventionniste, il y a peu de chances qu’il conquiert des suffrages massifs. Ses scores de l’élection de 2004 où il avait fait 0.19 % avec des idées similaires n’augurent en rien qu’il dépassera les 1%.

Les inconnus

Les sept derniers prétendants à la magistrature suprême, malgré leur nouveau statut de candidat à l’élection présidentielle et le fait que la campagne électorale ait commencé depuis plus d’une semaine déjà, continuent de demeurer extrêmement absents du paysage médiatique camerounais ; certains étant parfois contraints de vaquer à leurs occupations professionnelles pour assurer leur pitance quotidienne. Marcus Lontouo, Atangana Nsoe, Isaac Fezeu, Georges Nyamdi, Joachim Tabi Owono, Daniel Soh Fone et Jean Njeunga, puisqu’il s’agit d’eux, ne devraient récolter qu’un minimum de voix à l’issue de ce scrutin : moins de 1% à eux sept, certainement grâce à quelques membres de leurs familles et des soutiens isolés ici ou là.


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