L'artiste Joe La Conscience (Kameni Joe de Vinci) a comparu hier devant la barre du tribunal de première instance de Yaoundé centre administratif, où il est accusé "de réunion et de manifestation interdite".
Placé en détention provisoire à la prison centrale de Kondengui depuis vendredi le 7 mars dernier, il a été interpellé devant l'ambassade des Etats-Unis à Yaoundé alors qu'il y faisait une grève de la faim, pour empêcher toute modification de la Constitution. L'audience a été reportée à ce jour, pour comparution des témoins de l'accusation. A savoir, les gendarmes qui l'ont interpellé et qui, d'après l'acte d'accusation, soutiennent l'avoir interpellé au quartier Tsinga. Une déposition que démentent des proches de l'accusé. C'est bien devant l'ambassade des Etats-Unis à Yaoundé qu'il a été interpellé, soutiennent-ils.
Dans une lettre ouverte adressée le 9 mars dernier au président de la République, l'épouse de l'artiste Joe La Conscience sollicite "qu'une grâce soit accordée à (son ndlr) époux, pour qu'il soit libéré de cette geôle dans laquelle il se trouve sans autorisation de visite et dans un état de santé assez dégradable". Elle rappelle que l'artiste a été interpellé par les éléments du Secrétariat d'Etat à la Défense "depuis le vendredi 29 Février". Et surtout, que quelques jours avant son arrestation, leur fils Aya Kameni Patrick Lionel "perdait la vie suite à une balle réelle tirée contre lui par les forces de l'ordre dans notre domicile de Loum-ville, sous mes yeux et ceux de mes autres enfants". A ce jour, Joe La conscience n'a pas eu le temps de se prosterner sur la dépouille de son fils.
Actionnant la fibre sensible, son épouse interpelle le chef de l'Etat : "Excellence Monsieur le Président, vous pouvez imaginez la vie d'une mère, d'une épouse de voir son fils abattu sous ses yeux et de vivre sans le père de ses enfants pourtant principal pourvoyeur de notre foyer". Dans sa lettre ouverte, Sidonie Peka se présente comme "l'épouse de Kameni Joe de Vinci (Joe La Conscience), artiste-musicien camerounais qui a été interpellé devant l'ambassade des Etats-Unis d'Amérique à Yaoundé, alors qu'il observait une grève de la faim pour protester contre l'oppression faite à la presse, notamment avec la fermeture de Radio et Télévision Equinoxe".
Artiste engagé, Joe La Conscience est l'inspirateur de ce qu'il est convenu d'appeler "La longue marche pour la paix". Et qui consistait pour lui à effectuer une marche sur une distance de près de 450 km entre Loum, sa ville de résidence et le palais présidentiel à Yaoundé, où il espérait pouvoir être "reçu par le président de la République" afin de lui remettre à main propre un mémorandum contre la révision de la Constitution au Cameroun intitulé : "Les 50 bonnes raisons pour ne pas modifier la constitution du Cameroun". Entre autres raisons qui devraient empêcher le président de la République d'"écorcher" la Constitution pour se représenter au terme de son deuxième septennat, le mémorandum indique qu'en "25 ans de renouveau national le Cameroun a régressé de plus de 50 ans comparativement à son potentiel économique". Autre raison évoquée dans le mémorandum : "Le peuple camerounais sait que cette loi constitutionnelle de 1996 contient des dispositions constitutionnelles qui n'ont jamais été mises en place 12 ans après son adoption".
Etouffé par les autorités administratives de la province du Littoral, le projet de la longue marche n'a pas eu lieu. A défaut d'une marche symbolique sur Etoudi, Joe La Conscience a néanmoins pu se rapprocher du palais présidentiel, s'installant plusieurs jours devant les services de l'ambassade des Etats-Unis, où il a observé une grève de la faim avant de se faire interpeller par les gendarmes.
Source: Le Jour Quotidien
Voir aussi :
Video : Joe la conscience contre la modification de la constitution
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