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La leçon de Lula Da Silva à nos Chefs d’Etat
(11/04/2005)
Nos chefs d'états, éternels quémandeurs d’aide, pourraient prendre exemple sur ce pays d'Amérique du Sud.
Par Le Messager

C’est aussi le sens de la pétition à lui transmise en fin de semaine dernière.

La visite du Président brésilien Luiz Inacio Lula Da Silva en Afrique (du 10-14 avril au Cameroun, au Nigeria, au Ghana, en Guinée Bissau et au Sénégal) quelques jours seulement après sa décision de ne plus solliciter le financement du Fonds monétaire international dont le dernier accord de prêt venait à échéance le 31 mars 2005, nous semble une opportunité unique pour impulser, susciter et aiguiller la prise de conscience de nos Chefs d’Etat et de gouvernement ainsi que nos dirigeants des administrations publiques sur l’impératif de tout faire pour sortir du “ binôme infernal ” aide-crédits concessionnels. C’est lundi 28 mars que le ministre de l’économie, Antonio Palocci, a rendu publique la décision du gouvernement brésilien de se financer autrement que par le recours au prêt du Fmi après près de huit années de dépendance financière. L’objectif de la présente analyse est de montrer par l’exemple brésilien que s’affranchir de la tutelle très nocive du Fmi est une exigence pour chaque pays africain d’une part, et qu’aucun pays africain ne pourra enclencher un réel cycle de progrès et de prospérité en se focalisant sur le marché très étriqué des capitaux publics d’autre part.



1 - Le Président Lula et la sortie du cycle de dépendance financière

De 1983 à 1993, le Brésil avait signé trois accords de financement avec le Fmi dans le contexte de la crise de la dette. De 1993 à 1998, le pays assurait sa souveraineté financière. La crise financière asiatique de 1997 – 1998 et la crise russe se propagèrent sévèrement au Brésil. L’accord stand-by du Fmi du 2 décembre 1998 initialisa un nouveau cycle de dépendance financière du Brésil. Le package des financements mis à la disposition du pays par divers organismes pour affronter la crise culminait à 41 milliards de dollars Us. Depuis 1998, trois accords de prêt stand-by du Fmi vont se succéder, couplés chacun d’une facilité de réserve supplémentaire (type de prêt mis en place en 1997). Le tableau 1 ci-dessous retrace l’évolution des accords de financement Fmi avec le Brésil depuis les années 80.
Le dernier accord de financement qui vient d’être bouclé par la conclusion de sa dixième revue a été signé le 06 septembre 2002 avec une durée de 15 mois pour un montant record de 30,4 milliards de dollars, échéance décembre 2003. En octobre 2002, Lula Da Silva remporte l’élection présidentielle et entre en fonction en janvier 2003. L’accord de prêt de septembre 2002 sera prorogé et augmenté en décembre 2003 pour un total de 41,8 milliard de dollars US, échéance 31 mars 2005.
L’équipe Lula va mettre les bouchées double. L’accord du Fmi prévoyait un objectif d’excédent budgétaire primaire (3,88% en 2002) de 3,75% du Pib en 2003 avec la même exigence pour 2004 et 2005 afin d’enclencher une dynamique de réduction de l’endettement public. Mais le Président Lula a plutôt fixé un objectif plus ambitieux que l’exigence du Fmi soit 4,25% par an d’excédent budgétaire primaire en vue de se constituer une meilleure marge de manœuvre. Les résultats sont palpables, le gouvernement brésilien a dégagé un excédent budgétaire primaire de 4,3% en 2003 et 4,6% en 2004. En profitant de la robustesse de la croissance mondiale en 2004, le Brésil a réalisé un taux de croissance de 5,2% en 2004 avec une croissance de la production industrielle de 8,3%. La dette publique est passée de 65,5% du PIB en 2002 à 54,5% en 2004 (voir tableau 2 ci-dessous). Sur les 41,8 milliards de dollars, le Brésil n’a utilisé que 26,5 milliards de dollars. En annonçant le 28 mars (3 jours avant l’échéance de l’accord du prêt avec le Fmi) que le gouvernement brésilien ne signera pas un nouvel accord de prêt avec le Fmi, ce n’est que le résultat d’une stratégie proactive du Président Lula : pour remettre le Brésil dans la trajectoire du progrès économique et social, le préalable est de se constituer une marge de manœuvre suffisante pour s’affranchir de la tutelle financière du Fmi afin de restaurer l’indépendance des politiques publiques brésiliennes. Félicitation monsieur le Président Lula !
Le directeur général du Fmi, Rodrigo de Rato, a déclaré ceci : “ (…), the Brazilian authorities have decided not to request Fund support under a successor arrangement. The IMF staff and management fully support the authorities’ decision. (…) The Brazilian authorities and the staff and management of the IMF look forward to continuing with the close and cooperative policy dialogue between Brazil and the IMF through the usual channel of surveillance and post-program monitoring”.
C’est très clair. Le Fmi ne peut pas demander à un pays-client de ne plus consommer ses produits financiers. Les chefs d’Etat et autres dirigeants africains qui n’ont pas encore compris que le business plan du Fmi a pour objectif d’accroître ses parts de marché et créer la valeur pour ses actionnaires majoritaires (pays membre du G7 et de l’Ocde), demeurent des inconscients primaires. Le Président Lula le sait. Il en est non seulement conscient mais en plus volontaire. Il a surtout la pleine conscience qu’un pays ne peut se développer qu’en accédant lui-même aux vastes marchés de capitaux privés qui constituent la principale source de financement non seulement pour les pays industrialisés mais aussi des pays en développement. Le Président Lula ne peut donc pas s’accommoder longtemps des financements faibles et très coûteux du Fmi.


2 – L’évolution du financement international des pays en développement

Depuis le début des années 90, la structure du financement international des pays en développement est très largement dominée par les capitaux privés. Ainsi, en 1996, sur les 311,8 milliards de dollars US qui se sont dirigés vers les pays en développement 281,3 milliards de dollars US étaient des flux privés (prêts et titres) soit 90% contre 10% seulement pour les capitaux publics. En 2004, sur les 323,8 milliards de dollars US du financement international des pays en développement, 301,3 milliards de dollars sont des capitaux privés, 93% contre 7% seulement des capitaux publics (aide et crédits). Le tableau 3 ci-après retrace l’évolution du financement international des pays en développement depuis 1996.


3 – Pourquoi les Chefs d’Etat africains doivent apprendre la leçon de Lula da Silva

La grande majorité des pays africains est actuellement sous la tutelle financière du Fmi. Nos pays sont des utilisateurs abusifs des ressources du Fmi. Les politiques économiques et sociales sont définies par cet organisme de Washington qui n’a même pas assez d’argent, mais qui est l’agent technique (agence de notation des risques) des pays du G7, de l’Ocde ou du Club de Paris qui contrôlent le marché de capitaux publics dont le poids est marginal (moins de 10%) comme les statistiques ci-dessus le démontrent. Les chefs d’Etat et autres dirigeants africains sont des éternels quémandeurs du “ binôme infernal aide-crédit ” depuis les années 60. Tous les instruments en vogue (objectifs du millénaire, l’initiative Ppte, prêts concessionnels, dons-aides, Dsrp, Nepad, Commission de Tony Blair sur l’Afrique, etc.) sont centrés sur le marché marginal et très limité des capitaux publics. Or, s’affranchir de la tutelle financière du Fmi et orienter son financement international vers les marchés de capitaux privés comme le Président Lula vient de le faire, constituent des pré-réquis pour chaque Chef d’Etat africain.
La difficulté à surmonter par nos dirigeants se trouve dans leurs profils cognitifs. Très peu de pays ont réussi à s’affranchir des financements du Fmi par leur leadership : le Maroc en 1993 après une série de 9 accords ; la Jamaïque en 1996 après 13 accords et les Philippines en 2000 avec 23 accords au total. Le Président Lula est un leader éclairé, un conscient volontaire, capable d’instrumenter un management public proactif, en mobilisant les multiples intelligences disponibles au sein de sa population au Brésil et à l’étranger. Par contre, la majorité de nos dirigeants semble avoir des profils cognitifs et psychologiques largement appauvris par la pratique récurrente de la prostitution financière doublée de la corruption à grande échelle qui caractérise la gestion de leurs finances publiques. Cette “ misère anthropologique ” de nos dirigeants constitue le principal blocage, garantissant au Fmi, à la Banque Mondiale et autres instruments du marché de capitaux publics, un règne insolent sur l’Afrique et ses peuples. Comme tout apprentissage initiatique visant la maîtrise de la complexité, assimiler et opérationnaliser la leçon de Lula da Silva, ne peuvent pas être une sinécure pour nos Chefs d’Etat et de Gouvernement. Messieurs les Chefs d’Etat ayez au moins le courage de demander conseil au Président Lula !


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