Douala :Projet Sawa Beach
Depuis qu'un colonel reconverti dans les affaires, Édouard Etondé Ekoto, après avoir été nommé en 2002 à la tête de la Communauté urbaine de Douala, a fait tomber sur la ville une pluie de projets. Le plus beau d'entre eux, Sawa Beach, prévoit de faire surgir d'une mangrove insalubre une cité aux allures de petite Venise tropicale. Quand il en a parlé la première fois, en mai 2003, ce n'était encore qu'un rêve. Et quelques dessins. Aujourd'hui, le projet est bouclé. Sur le papier en tout cas. Chiffres, études, maquettes, tout y est. Seuls manquent encore les financements. Mais le colonel ne doute pas, lui qui revient de Chine, de dénicher à travers le monde les investissements nécessaires. Comme il a bon espoir de doter Douala d'un grand stade, de rénover le centre-ville, d'aménager de nouveaux quartiers et de mener à bien ce qui a été entrepris. Car, depuis deux ans, la ronde des engins de chantier est incessante. Trois artères de la ville ont été refaites, les caniveaux obstrués sont en cours de réfection et le pont du Wouri fait peau neuve. Pour un début, ce n'est pas si mal Mais il reste tellement à faire. En particulier dans les quartiers périphériques tels que Mbam Ewondo, New Bell-Bamiléké, Bassa... Car il est peu probable que les investisseurs privés qui financeront Sawa Beach où le golf de l'île de Manoka s'intéressent d'aussi près à New Bell et à ses tas d'immondices.
Douala, ville pour vivre
Carrefour commercial, la capitale économique du Cameroun attire les travailleurs en quête d'emploi. La communauté urbaine souhaite en faire un lieu d'ancrage plus que de passage. Sur les quelque 9 milliards de dollars de Produit intérieur brut (PIB) du Cameroun, presque 70 % sont générés par les activités domiciliées à Douala. C'est dire que la ville n'a pas usurpé son statut de capitale économique du pays. Tandis que Yaoundé vit au rythme des fonctionnaires et autres diplomates, Douala se calque, elle, sur celui des entrepreneurs.le port est le centre névralgique de Douala. Il déborde d'autant plus d'activités que ses principaux concurrents du Congo-Brazzaville, de la République démocratique du Congo et de l'Angola pâtissent encore des effets des guerres civiles qui ont ravagé ces pays.
Le bois, le blé, les fruits et légumes, les véhicules : les dockers ne semblent jamais cesser de charger des conteneurs ou de les décharger avant de les envoyer par train ou par camion vers leur destination finale. L'amélioration des infrastructures de transport ( le rail a été privatisé tandis que les axes routiers vers Yaoundé, le Nigeria et le Tchad au Nord, la Centrafrique à l'Est, le Gabon et la Guinée équatoriale au Sud, sont aujourd'hui bitumés ) est un des atouts du port autonome de la cité du Wouri. La création d'un guichet unique du commerce extérieur (Guce) en 2000 a permis de réduire considérablement les tracasseries administratives, les délais de sortie des marchandises et les pertes d'argent . La mission est réussie puisqu'un dossier de marchandise est désormais traité en 1,77 jour, alors qu'il fallait il y a quatre ans au moins une semaine pour mener à bien la procédure. En moyenne, entre 300 et 350 dossiers passent quotidiennement au guichet unique. Profitant de sa lancée, le Guce entend maintenant poursuivre sa modernisation en instaurant un guichet unique électronique fin 2004.
Douala : Plein d’atouts a faire valoir
Douala a bel et bien besoin d'exhiber ses atouts pour gagner la confiance de ses partenaires et surtout des investisseurs étrangers. Les analystes estiment que pour sortir de la pauvreté d'ici à 2015 le taux de croissance annuel devrait flirter avec les 7 %, alors qu'il culmine aujourd'hui à 4,2 %. Quatre Camerounais sur dix vivent toujours en dessous du seuil de pauvreté, d'après la Banque mondiale. En 2003, les investissements directs étrangers (IDE) ont atteint 86 millions de dollars pour l'ensemble du pays. Ce qui est encore trop faible quand on sait que la Guinée équatoriale voisine, par exemple, draine 323 millions de dollars au titre des IDE !
Outre son port, la capitale économique du Cameroun peut se targuer d'avoir un aéroport international. Moins moderne que celui de Yaoundé, il est néanmoins mieux desservi. Air France, SN Brussels, Swiss y font escale plusieurs fois par semaine. En quelques années, il est aussi devenu un véritable hub régional, et un passage quasi obligé pour les voyageurs européens ou américains qui désirent se rendre à Malabo.
Douala puise aussi et surtout sa force dans le vivier de ses petites et moyennes entreprises (PME). Près de 60 % des quelque 124 000 sociétés répertoriées dans le pays sont installées dans cette ville. Une minorité d'entre elles travaillent à l'international.
Plus grande ville du pays avec près de 3 millions d'habitants, Douala constitue aussi un grand marché de consommation. Grâce à l'activité économique, le revenu moyen par habitant est plus élevé que dans le reste du pays (environ 2 600 dollars/an contre 560 dollars/an pour la moyenne nationale).
La situation économique de la ville n'est pas idéale, loin s'en faut. Les obstacles administratifs et logistiques à l'implantation puis à la viabilité d'une entreprise sont encore nombreux.Dans cette perspective, l'amélioration du réseau électrique et des lignes de téléphone fixe demeure une priorité pour la ville.
Autre obstacle: la flambée des prix de l'immobilier. Dans le quartier administratif de Bonanjo, le prix du mètre carré de terrain peut atteindre 200 000 F CFA (plus de 300 euros) et il vaut 100 000 F CFA dans la zone commerciale d'Akwa. Consequence: cela a conduit une partie de la population à s'installer à la périphérie de l'agglomération
À Douala, le partage des richesses est encore très inéquitable et la classe moyenne peine à émerger. D'après de récentes statistiques, seuls 40 % des habitants de la ville sont actifs. Et les jeunes âgés de 18 à 30 ans, qui représentent environ la moitié de la population totale de Douala, sont les plus affectés par le chômage (42,5 %). « Chômage et paupérisation conduisent bien souvent à une situation explosive. Ce sont les sources de la délinquance et de l'insécurité grandissante », admet un agent de la CUD.
Cela dit, le secteur informel emploie nombre de travailleurs. Mais, à force de se démener sans l'aide de personne, certains habitants ont aussi l'impression d'être des laissés-pour-compte.
« Faux ! » rétorque-t-on à l'hôtel de ville, en mettant en avant l'Agence de développement de Douala (A2D), créée il y a tout juste un an sous l'impulsion du délégué du gouvernement. « Nous réfléchissons aux moyens à engager pour que les habitants se reconnaissent dans leur ville et pour qu'ils participent à son développement », résume le président de l'A2D, Protais Ayangma. L'Agence assurera la promotion internationale de la ville, en mettant en exergue ses atouts économiques et en créant prochainement « un événement, un rendez-vous annuel », dont le thème reste à définir. Plus généralement, l'Agence envisage de faire de Douala un lieu d'ancrage et non plus un simple lieu de passage. « Pour l'instant, l'intégration des nouveaux habitants n'est que superficielle »,
Douala: A l'heure du Multimédia
Douala n'est pas seulement le poumon économique du Cameroun, elle se veut aussi la capitale du multimédia. Ville carrefour pour les échanges avec les autres pays, elle se lance tous azimuts dans l'ère de la communication globalisée et virtuelle.
Pour marquer cette volonté de modernisation, la municipalité a décidé de doter chaque arrondissement - la ville en compte six avec l'île de Manoko - d'un « cercle municipal ». Appellation quelque peu désuète pour un endroit résolument moderne. Le « cercle », c'est d'abord un lieu de vie où l'on peut se rencontrer, se marier et faire la fête.
C'est aussi et surtout un lieu d'éveil aux nouvelles technologies de l'information et de la communication, grâce à plus de cent ordinateurs connectés à l'Internet haut débit et aux techniques multimédias de pointe (téléphonie via Internet, photo numérique, etc.).
Destiné aux jeunes, les cercles sont en phase d'équipement, le premier ayant été inauguré à Douala fin mai 2004.
Mais les autres acteurs de la ville n'en sont pas pour autant exclus. Au contraire, puisque le cercle municipal » offrira aussi des facilités aux entreprises, notamment la vidéo-conférence. Une manière de faire rencontrer la jeunesse dynamique et les entreprises locales.
Douala: Un pont de plus
Les habitants de la métropole attendent avec impatience la construction d'un deuxième ouvrage enjambant le fleuve. Bientôt, les trois heures d'embouteillage pour effectuer les deux petits kilomètres qui relient le quartier industriel de Bonaberi au centre de Douala ne seront plus qu'un mauvais souvenir. Le pont qui enjambe le Wouri est, depuis la fin mars, en cours de réhabilitation. Surtout, le projet d'en construire un deuxième est en passe d'être approuvé par le gouvernement. Et pour cause : la capitale économique du Cameroun ne cesse de s'agrandir, sous la pression démographique (près de 6 % par an). Près de 3 millions d'habitants y vivent. À l'ouest de Douala, de l'autre côté du fleuve, le quartier de Bonaberi n'est pas en reste. Il abrite non seulement une importante zone industrielle mais aussi de plus en plus de logements résidentiels - 350 000 habitants y vivent désormais - sans oublier les espaces consacrés aux cultures vivrières. Environ 80 % des produits agricoles vendus dans les rues d'Akwa, de Bonanjo, de Bell et des autres arrondissements proviennent de l'autre côté du fleuve. On y trouve les produits cultivés dans l'Ouest. Treize mille tonnes de marchandises passent chaque jour d'une rive à l'autre. Sans compter les quelque 100 000 personnes et 38 000 véhicules !
Il paraît donc urgent de renforcer les capacités du pont déjà existant. Construit il y a cinquante ans, il commençait à montrer des signes de dégradation inquiétants.D'après les dernières études, le deuxième pont sera parallèle à l'actuelle construction. Mais ses points d'ancrage posent encore quelques problèmes, notamment pour l'indemnisation des populations qu'il faudra inévitablement déplacer. La Communauté urbaine de Douala (CUD) préconise de relier l'extrémité continentale de ce nouveau pont à une voie de contournement de la cité, sorte de périphérique qui permettrait de désengorger les artères du centre-ville. Coût estimé de ce projet : 40 milliards de F CFA (60 millions d'euros). Il faut encore que le gouvernement approuve l'initiative avant de lancer un appel d'offres. Cette artère traversant le fleuve sera confiée à une entreprise privée qui l'exploitera selon le principe du BOT (Build, Operate and Transfer) avant de transférer la propriété de l'infrastructure à la CUD. Pour assurer la rentabilité de l'opération, l'entreprise concessionaire instaurera sans doute un péage à l'entrée du nouveau pont.
En attendant le feu vert du gouvernement, les habitants doivent se contenter d'un ouvrage encombré d'ouvriers et d'engins de chantier. Les travaux, qui doivent durer deux ans, causent bien des désagréments. Les premières victimes sont les chauffeurs de taxi, interdits de passage. Seuls les véhicules particuliers peuvent emprunter le pont, ce qui a pour avantage de fluidifier la circulation. Les personnes non motorisées et fatiguées par la perspective de traverser à pied, sous un soleil de plomb, sont obligées de prendre un bus mis spécialement à leur disposition pour 100 F CFA le trajet. Certains regrettent le rejet par les autorités de la proposition d'ériger un pont flottant. Un peu coûteuse - environ 1,5 milliard de F CFA (2,2 millions d'euros) -, celle-ci aurait néanmoins permis d'offrir une solution provisoire, en attendant la fin des travaux
Sources: Les dossiers J.A.L'intelligent
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