Un pilote d’essai va peut-être devenir lundi le premier astronaute privé. Le vaisseau SpaceShipOne conçu par Burt Rutan et financé par Paul Allen, cofondateur de Microsoft, va tenter lundi 21 juin d’accomplir le premier vol suborbital non-gouvernemental. Un jour historique, affirment-ils sans hésiter, qui verra peut-être s’ouvrir la frontière spatiale au monde de l’entreprise privée.
SpaceShipOne, fabriqué par la firme Scaled Composites de Rutan, doit décoller très tôt lundi matin, vers 6h30 heure locale (soit 15h30 en France), depuis le centre d’essai aérospatial du Mojave, en Californie. Dans un premier temps, l’avion cargo White Knight emporte SpaceShipOne à près de 15.000 mètres d’altitude. La montée prend environ une heure. Là le vaisseau est largué et au bout de 80 secondes il met les gaz pour atteindre trois fois la vitesse du son et s’élever jusqu’à 100 km, la frontière de l’espace. L’ascension dure 25 minutes. Après trois minutes en apesanteur, SpaceShipOne revient se poser sur Terre comme un planeur.
Le 13 mai dernier le prototype de Rutan a dépassé les 60 km d’altitude, ce qui constituait déjà un record pour un avion privé. Rutan, âgé de 60 ans, est un designer aéronautique renommé, qui a déjà fait parler de lui en 86 avec Voyager, l’avion qui a fait le tour du monde sans ravitaillement.
Confiants dans la réussite de cette tentative, Rutan et Allen convie le public à venir assister à l’événement. Pour la modique somme de 40$, le parking de l’aéroport de Mojave est prêt à accueillir les campeurs et leur caravane.
S’ils réussissent leur pari, les concepteurs de SpaceShipOne n’auront plus qu’à renouveler deux fois l’expérience en deux semaines avec trois personnes à bord pour gagner le Ansari X Prize et ses 10 millions de dollars de prime. Un prix pour la gloire… car les investissements de Paul Allen dépassent déjà les 20 millions de dollars.
Le programme de l'avion-fusée
L'engin pénètrera les couches supérieures en présentant le dessous de son fuselage, à un angle élevé. "Cette configuration permet une rentrée (dans l'atmosphère) sans intervention (du pilote) et réduit grandement les sollicitations aéro-thermiques", a expliqué l'inventeur.
Le fuselage de SpaceShipOne est comparable à un suppositoire. Directement derrière le cockpit, qui peut emporter trois personnes, est disposé le réservoir de comburant liquide (oxyde nitreux, le nom scientifique du gaz hilarant), suivi du corps de propulseur rempli du combustible solide (caoutchouc polybutadiène).
L'ensemble est terminé d'une tuyère noire qui dépasse à l'arrière de l'avion, trahisant sa nature réelle de fusée.
SpaceShipOne, attaché sous le "White Knight", un avion de transport construit sur mesure, devait décoller lundi vers 06H30 locales (13H30 GMT).
Après une heure d'ascension, à une altitude de 48.000 pieds (15 km), l'avion libèrera le prototype qui allumera alors son moteur-fusée pour entamer son ascension verticale.
La fusée brûlera pendant environ 80 secondes, propulsant l'engin en ascension verticale jusqu'à environ 160.000 pieds (50 km) à trois fois et demi la vitesse du son, environ 3.500 km/h.
Une fois sa fusée vide, l'engin continuera sur sa lancée pendant trois minutes jusqu'à atteindre 340.000 pieds (103 km), altitude à laquelle SpaceShipOne aura perdu toute vitesse, comme une balle de pistolet tirée en l'air.
L'engin retombera alors jusqu'à 200.000 pieds (60 km), seuil auquel le pilote recommencera à sentir l'effet de l'atmosphère sous ses ailes, et le poids de la gravité sur ses épaules.
Entre l'ascension à partir de 200.000 pieds et la chute jusqu'à cette altitude, le pilote sera en apesanteur, pendant une durée totale de près de quatre minutes, selon les concepteurs du vol.
Une fois les couches supérieures de l'atmosphère traversées, ce qui devrait prendre environ une minute, le pilote rétablira la position de l'empennage à l'horizontale pour planer pendant 17 minutes à partir d'une altitude de 80.000 pieds (25 km) jusqu'à se poser sur la piste de départ.
Par AFP
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