On se serait attendu à ce que chacun penche pour telle ou telle autre formation. Erreur. Jusqu’à 42% des personnes interrogées “disent n’appartenir à aucune formation politique ou ne pas être politiquement rangés ”. Près de la moitié de quelque 16 millions d’habitants au Cameroun donc ! Dans une République, il s’agit d’un indicateur inquiétant pour la démocratie. Seulement 58% de l’échantillon affirme avoir de la “ sympathie ” pour un parti politique reconnu. Bien entendu, il ne s’agit que des sympathisants dont certains peuvent ne pas être des militants effectivement enregistrés.
Même si on aurait pu le sentir à la lumière du faible taux de participation aux législatives et municipales du 22 juillet 2007 (environ 5 millions d’inscrits sur les listes seulement), l’enquête confirme une intuition que certains hommes politiques avaient déjà formulée au lendemain de la consultation. Plusieurs raisons expliquent cette désaffection des Camerounais pour la politique. Parmi celle-ci, les fraudes massives qui font que les choix du peuple ne sont jamais respectés. Constatant qu’un seul parti confisque l’essentiel des mandats électifs depuis le retour du multipartisme en 1990, certains citoyens sont devenus pessimistes. On entend à peu près la même rengaine partout : “ Que l’on milite dans un parti ou pas, que l’on vote un candidat ou non, les mêmes s’arrangent toujours pour gagner. Il vaut mieux donc les laisser s’octroyer les mandats jusqu’au jour où ils décideront de quitter les affaires. ”
Au-delà, la majorité des Camerounais qui avaient milité dans les partis à l’orée des années 90 en espérant une amélioration de leurs conditions de vie se sont désillusionnés. Presque rien n’a changé ; si oui, la vie est toujours plus chère d’année en année. La question que l’on se pose dans les chaumières est de savoir : “ Qu’est-ce que la politique m’a donné depuis que je milite ? ” Les leaders se trouvent dans une position inconfortable pour y apporter une réponse afin d’entretenir la flamme militante. Mais cette désaffection signifie-t-elle que la population ne se sent plus concernée par la chose politique ? Selon Aboya Manasse, politologue et enseignant à l’Université de Douala, “ la population dans sa grande majorité ne se sent plus concernée par les affaires politiques, pas parce que la gestion ne l’intéresse pas, mais parce qu’elle a été mise à l’écart par une oligarchie individualiste. ”
Source: Le Messager
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