Les pommettes affaissées, davantage de plis sur le front et les yeux rouges, Françoise Foning est réellement en danger. Même la barrette de velours qui formait un joli noeud sur ses tresses la senti et s'est défaite toute seule en retombant sur son épaule. En fait c'est que les nouvelles ne sont pas bonnes. Mme Foning, à 18h30mn dans son quartier général, apprend que sur les 18 bureaux du centre de vote du lycée de Bépanda, elle a obtenu la majorité dans un seul. Celui où elle a voté.
"Ils m'ont lâché. Ils m'ont trahi", a-t-elle martelé à l'annonce de la terrible nouvelle. Elle n'a eu de cesse de répéter le même message de trahison au téléphone. Une litanie en somme! Pour de nombreux témoins de la scène, son affolement peut être synonyme du chant du Cygne. La journée de Françoise Foning a été plutôt difficile. La candidate s'est levée tôt ce dimanche 30 septembre 2007.
Avait-elle le choix? Devant défendre son siège en jeu et son honneur, elle qui s'est déclarée humiliée pendant la campagne, Françoise Foning a quitté son domicile à Bépanda peu avant 7h du matin pour aller à Anflo au rond point Deïdo, un autre de ses Qg, pour vérifier si tout était en ordre.
Deux heures de discussion avec ses proches sur le quadrillage des bureaux de votes de Douala 5e. A peine a-t-elle fini de donner les consignes, Jeanne Kamkuimo, l'une de ses colistières l'informe des blocages que Jean-Michel Nintcheu du Sdf met en place pour nuire à leur stratégie. "Il faut coller des avocats et des huissiers derrière chacun d'eux que ce soit Nintcheu, Mbah Ndam ou Fru Ndi. Rien ne doit nous échapper", rétorque t-elle.
Retour à la maison à 11h et mise en place du dispositif de sécurité pour son départ au bureau de vote du lycée de Bépanda où elle glisse peu après son bulletin dans l'urne. Entre temps, Jacques Bimaï est arrivé, la mine décontractée arborant une chemisette blanche aux motifs noirs. Il s'est assis aux cotés de Françoise Foning dans la Nissan Patrol grise, suivi d'un minibus ou se trouvait une vingtaine de gros bras, une ambulance de Sitrafer et deux véhicules de la police. N°433 dans la salle B, Françoise Tsobgny Nguiazong épouse Foning née en 1948 à Bafou a voté à 12h25mn.
"Je remets tout entre les mains du Seigneur car je crois en lui et je fais entièrement confiance aux Camerounais. Je n'ai pas peur car, je sais que je vais gagner", a-t-elle confié aux journalistes venu couvrir les législatives partielles du 30 septembre 2007. Très peu de monde autour de "Ma Foning" cependant. En dehors de Abel Calvin Ndjocké, son colistier, et de Gabriel Fandja, ancien maire de Douala 4e, il n'y avait pas de "grands camarades" du parti des flammes.
Une monotonie rompue par quelques coups de fil, mais aucun soutien physique. En entrant dans son Qg de Bépanda, aux femmes qui cuisinaient, Françoise Foning a posé la question essentielle: "Avez-vous déjà voté?". Réponse en choeur: "Oui la mère. Regarde mon doigt". "Sortez. Sortez tous. On ne veut voir personne ici", a ensuite tonné M. Siéwé, garde du corps de Françoise Foning à l'endroit de badauds venus demander des faveurs à la candidate.
Dans un mouvement de fatigue, Françoise Foning enlève ses pieds des babouches violettes avec des cordages blancs et pousse un soupir de soulagement. Qui n'a pas duré bien longtemps puisque les nouvelles en provenance des bureaux de vote sont mauvaises… D'autres moments de tension commencent pour la nuit très longue et incertaine.
Source: Quotidien Mutations
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