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Cameroun : le changement ne viendra pas de Montréal !!! (1)
(18/09/2007)
Un étudiant livre sa vision de la situation des étudiants Camerounais dans l'agglomération Canadienne de Montréal. Pour lui, le constat est on ne peut plus désolant. Point de vue.
Par Yaqoub Ben Garoua
La ville de Montréal
La ville de Montréal
Note de l'auteur : L’objet de cet article n’est pas de porter des jugements de valeurs sur des individualités; chacun étant le produit d’un environnement sur lequel il n’a aucun pouvoir autre que l’adaptation. Il s’agit ici d’observer des comportements sociaux
collectifs qui peuvent paraître inquiétant sur différents niveaux, mais nullement de blesser qui que ce soit.


Cette ville froide qu’est Montréal accueille plusieurs milliers d’étudiants internationaux. Parmi eux, se trouvent nombre de jeunes gens venant des néo-colonies françaises. Si certains de ces étudiants sont des boursiers émérites, beaucoup sont les enfants de l’élite de leurs pays respectifs. Ce texte fait suite à une petite enquête de terrain réalisée parmi des étudiants camerounais. Le constat principal faisant suite à ces démarches, est que le peuple de ce pays n’a hélas pas grand-chose à espérer de sa future classe dirigeante si l’on se base sur les réalités observées à Montréal (À Paris, les choses semblent être différentes, fort heureusement). Les situations néo coloniales sont bien parties pour se perpétuer. La colonisation de l’Afrique par l’Europe a été, et continue d’être, un processus, une violence dont la complexité ne permet pas le survol dans un article tel que celui-ci. Nous partirons donc du principe que chaque lecteur est conscient de l’histoire de la colonisation et de ce qu’il est commun de nommer la « décolonisation ».

Les changements viennent des étudiants. C’est un fait historique et logique. Les jeunes gens éduqués sont l’espoir de changement. Il ne peut venir que d’eux. Ils sont à un moment de leur vie où les matières grises fonctionnent à plein régime. Hélas, tout est en train de changer. Il fut un temps où les jeunes avaient pour héros : Malcolm X, Lumumba, Che Guevara et Nkrumah. Ils débattaient avec passion, livres en mains, de la situation de leurs pays et de comment « changer les choses ». Puis advint l’age de la télévision abrutissante dans chaque foyer. Depuis, c’est la décadence. Nous sommes passé de "Aussi longtemps qu’une seule portion de la terre Africaine demeure sous la domination étrangère, le monde ne connaîtra pas la paix." (Kwame Nkrumah) à des slogans tels que « Get rich or die trying » (50cents). Aussi consternant que cela puisse paraître aux résistants de l’intellect. Et le pire, c’est que ces derniers slogans ne sont pas juste un credo pour des adolescents facilement influençables par l’industrie du divertissement, mais pour des étudiants dont le souci devrait pourtant être l’avancement de l’esprit vers ce but, désormais lointain, qu’est le modelage de l’Homme nouveau.


Les jeunes ne lisent plus ?
Les jeunes ne lisent plus ?
C’est à partir de ce constat déjà accablant que part notre enquête. Arriver dans une ville étudiante est toujours galvanisant pour un intellectuel. De nombreuses conférences et manifestations y ont lieu, et l’espoir renaît toujours : « peut être qu’ici trouverai-je des groupes motivés par le changement en Afrique?! Peut être que parmi les étudiants d’ici seront les Aimé Césaire, Ben Bella, Frantz Fanon et Mongo Beti de notre temps? ». Hélas, quel n’a pas été notre désespoir quand nous avons découvert avec effroi, que les jeunes en provenance des pays néo-coloniaux français étaient des étudiants de profession mais pas de cœur. Qu’au sein des étudiants venant de ces pays en grandes difficultés, les échanges, les débats sérieux et les projets de lutte contre le néo-colonialisme et la misère ne sont au programme que de quelques petits groupes d’étudiants musulmans et que les autres associations d’étudiants africains ne s’occupent que de sport et surtout de « fêtes ».

Le milieu étudiant élitiste camerounais de Montréal est assez caricatural de cette absence de conscience révolutionnaire (Précisons qu’il s’agit ici de la révolution intellectuelle évidemment; de briser les chaînes de l’esprit) car comme dans tous les milieux privilégiés, il est très difficile d’y rencontrer des jeunes gens éveillés politiquement. Le constat est lourd : de jeunes étudiants, adultes, de la mi vingtaine, dont le souci n’est pas d’aider le Cameroun mais plutôt que tous les copains voient la nouvelle paire de chaussures de sport, la nouvelle robe, tel des gamins de 14ans. Des gens envoyés ici pour acquérir une éducation au prix d’une inscription très élevé de 5500$ par trimestre (plus de 8ans de salaire au Cameroun!), et qui n’ouvrent que très épisodiquement un livre. Et dont le but hebdomadaire se résume aux sorties du Jeudi au Dimanche soir en boite de nuit afin d’y retrouver un cercle d’habitués et d’y prolonger une vie de pré pubères, loin de toutes considérations intellectuelles sur leur rôle pour le futur de la société camerounaise. Il est habituel de voir des jeunes dépenser plusieurs milliers de dollars par week-end sur ce poison débilitant qu’est l’alcool, enrichissant ainsi de gros groupes occidentaux avec l’argent d’un pays qui en a pourtant tellement besoin. Il s’agit d’une forme aigue de collaboration avec les puissances néo coloniales. Cela peut paraître excessif, et pourtant, face à l’urgence des problèmes auxquels doit faire face la société camerounaise, il est impensable que son élite, que ces rares jeunes qui ont accès à l’université et donc au savoir, puissent vivre comme des petits français, sans aucune considération pour leur peuple; avec en tête, pardonnez le langage, des histoires de fesses et de fêtes, au lieu de savoir et de raison.

Cette jeune élite vit en cercle fermé, comme au pays, et règne dans une atmosphère de dépravation assez inquiétante, où les jeunes femmes ne sont pas respectées (peut être parce qu’elles ne se respectent pas elles mêmes dans bien des cas). Combien de jeunes femmes camerounaises, avec des potentiels intellectuels énormes, se laissent influencer dans ce que la génération 80 semble tenir pour slogan et qui se résume à : « s’amuser ».

50 cent comme modèle...
50 cent comme modèle...
Nous n’avons rarement autant entendu ce mot dans la bouche d’adultes universitaires que depuis notre séjour à Montréal (Certains pourront prendre en exemple comparatifs les étudiants américains ou français qui passent leur temps à « s’amuser », sauf que est ce la le modèle à suivre? Les pays néo-colonisés peuvent-ils se permettre de perdre ainsi ceux qui devraient être leur espoir?). Il semble que les jeunes femmes des élites en provenance des pays néo coloniaux français (car le schéma est à peu près le même pour les marocains ou les tunisiens; drogues dures en plus) soient elles aussi victimes de la propagande occidentale qui fait des ravages à travers le globe, et qui veut que plus les vêtements sont absents de leur corps, plus leurs mœurs sont lestes, plus elles seraient « Libres »; ne réalisant pas qu’il s’agit là de techniques habiles de l’homme dominant qui vise surtout à se faciliter le « travail ». Des jeunes femmes, pourtant d’une beauté dont seul le Cameroun peut se targuer, et qui se sont laissées hypnotiser par la machine mercantiliste américaine qui leur ôte l’élégance et les encourage à vivre « comme dans les clips »; à idolâtrer Usher et à ne surtout pas lire Frantz Fanon ou Angéla Davis. Quant aux hommes, le constat est bien pire, car les femmes au moins se débrouillent pour assurer dans leurs études. Comment comprendre que des jeunes de 25ans, de l’élite de leur pays, puissent aller au Canada dans les meilleures conditions, et puissent, par paresse et abus de cannabis, finir sans papiers, ou sans diplômes! Ce sont des cas bien réels, qui sont une insulte aux jeunes camerounais qui luttent au pays et qui se seraient, s’ils avaient eu une occasion pareille, nourris l’esprit avec sérieux en pensant à leurs responsabilités pour le futur du Cameroun et n’auraient jamais jeter plusieurs trimestres d’université en l’air par paresse d’enfant gâté; c'est-à-dire pour certains l’équivalent de 40ans de salaire moyen au Cameroun.

Des mœurs aussi légères peuvent en faire sourire certains mais cela traduit surtout une puérilité, qui pourrait peut-être être acceptable si c’était le fait d’un groupe de jeunes scandinaves dont le pays vit bien; mais qui est une injure aux millions de camerounais dans le besoin matériel et dans l’espoir d’un changement. Pendant que, eux, souffrent, leur future élite s’enivre et fornique au Canada. Bien sûr tous les étudiants ne sont pas aussi dépravés, il existe une partie très concentrée sur ses études, comme par exemple ce jeune prodige qui est entré à Polytechnique à 13ans seulement. Mais ces étudiants sérieux sont discrets et souvent très introvertis; l’organisation d’une grande conférence sur l’avenir du Cameroun ou de tables rondes sur la corruption les intéresserait sûrement mais ils sont trop timides ou pas assez politisés pour la réaliser ou y assister.

Ainsi, en conclusion, il nous semble important de préciser que ces comportements ne sont pas l’apanage des étudiants de l’élite camerounaise. Comme nous l’avons rapidement dit plus haut, la situation de beaucoup d’étudiants marocains est aussi lamentable, de même que nombre d’Ivoiriens. Il semble en fait que ces jeunes gens continuent à vivre comme des « petits français », c'est-à-dire sans souci dépassant le divertissement du moment. Mais ce qui peut se comprendre à 17ans, n’est plus acceptable à 23-25 voir même 30ans. C’est sur eux que repose l’avenir du pays. Les petits occidentaux peuvent se « permettre » l’indifférence mais pas le monde néo-colonisé. Ils ont accès aux études supérieures et aux outils permettant la recherche. À travers l’histoire coloniale, les grands changements voir même les révolutions (Algérie), sont venus des étudiants partis à l’étranger se nourrir l’esprit, se mobilisant et revenant pour aider à libérer leur peuple. À Montréal, il semble qu’une minorité seulement soit consciente de ses responsabilités et que le reste « pense » surtout à « faire la fête ».

La raison pour laquelle nous avons choisi de parler des camerounais, tient au seul fait que l’enquête était réalisable, mais surtout que ce pays a un potentiel illimité et que cela fait très mal de voir autant de gaspillage irrespectueux. Que ceux qui ont la possibilité de s’éduquer, d’influencer le futur du pays, ne se sentent pas plus concernés…Que les mentalités soient aussi abandonnées au lavage de cerveau occidental de consommation et d’individualisme primaire. Que des étudiants, adultes de l’élite, pensent à s’amuser toute la semaine et ne lisent absolument pas. Que des jeunes Québécois soient plus motivés et sincères dans la lutte pour le changement dans des pays qui ne sont pas les leurs, pendant que ceux qui devraient être activistes ou tout au moins se sentir concernés, passent leur temps à « s’amuser » tout en enrichissant ceux qui les méprisent. Pendant que des associations d’occidentaux lèvent des fonds et partent organiser une aide ou une autre, les associations ou groupement des pays néo-colonisés lèvent des fonds pour acheter du whisky et faire des fêtes, encore et encore… Bref, il ne faut pas perdre espoir mais le combat va être rude pour aider le Cameroun ainsi que les autres pays néo-colonisés.

Cet article peut paraître très à charge, mais il l’est par choix. Car il y a urgence. Si par hasard ces lignes permettent ne serait ce qu’à un(e) de ces étudiant(e)s de réformer ses occupations et de se lancer dans la recherche d’alternatives pour l’avenir du pays, et bien cela aura servi à quelque chose.








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