Hier, jeudi 11 juillet 2007, le directeur du Développement de l’Enseignement supérieur (Ddes), Norbert Ndong, absent de son poste depuis le 21 juin dernier, a été arrêté à Douala et conduit à Yaoundé où il a été gardé à vue à la direction de la police judiciaire, au quartier Elig-Essono. Jusque tard hier soir, il y a subi un interrogatoire musclé pour "besoins d’enquête".
D’après des sources proches de cette unité, monsieur Ndong, qui est apparu "affaibli et préoccupé", a tenu à s’alimenter convenablement et faire sa prière avant le début de l’interrogatoire. De même, a-t-on appris, il aurait tenu à ce que son "père spirituel", Mgr François Xavier Amara, soit informé de ce qui lui arrive.
Une requête qui n’étonne pas grand monde au ministère de l’Enseignement supérieur, où l’on se rappelle la proximité de ce directeur avec les milieux catholiques dans le moule duquel il a été formé sous l’instigation de son père catéchiste. Norbert Ndong a ainsi fait ses classes au petit séminaire d’Akono, où il fut adopté par Mgr François Xavier Amara.
La question que d’aucuns se posent est cependant celle de savoir comment quelqu’un dont la vie a longtemps été guidée par les préceptes de respect et de droiture a bien pu se retrouver dans une situation aussi embarrassante que la disparition de ces 250 millions de Fcfa destinés à l’organisation du Bts qu’on lui impute?
On se souvient également que ce chantre des chants classiques et grégoriens et des chants classiques avait imposé son style à la chorale du monastère des Bénédictins du Mont Fébé, mais aussi aux veillées pascales ou à celles de Noël, en compagnie de Jean Marie Etoundi, virtuose de l’orgue. Même si les fidèles participaient difficilement aux chants communautaires, tellement la présence du chef était omniprésente.
Un haut responsable de notre administration, qui fréquente également ces lieux de prière, se permit un jour une remarque à Norbert Ndong sur les frustrations dont étaient objet les fidèles. En réponse et sans se démonter, le chef de la chorale conseilla aux mécontents de se trouver une paroisse différente.
Alors que la nouvelle de l’arrestation de Norbert Ndong semble ravir certains responsables du ministère de l’Enseignement supérieur (Minesup), apparemment trop heureux de se débarrasser de cette affaire jugée gênante (une procédure visant à suspendre le Ddes de ses fonctions et de se désolidariser de ses faits est en cours au Minesup), certains de ses collaborateurs ont l’air plutôt inquiets. D’après des sources policières en effet, ils devront également être entendus pour pouvoir établir les responsabilités et élucider cette affaire.
Problèmes de gestion
Un affaire qui vient relancer une autre, qui lui avait valu d’être éjecté de son poste de directeur de l’Ecole normale supérieure (Ens) en 2001. Remplacé par François Minyono Nkodo, il lui était reproché d’avoir extorqué de l’argent aux candidats à l’entrée de cette école. Ce que dénient certains de ses proches, qui affirment que M. Ndong était plutôt victime "de pressions du recteur de l’Université de Yaoundé I de l’époque, du ministre de l’Enseignement supérieur d’alors, Agbor Tabi, du secrétaire général à la présidence de la République au moment des faits, Titus Edzoa, ainsi que de l’ancien Premier ministre Achidi Achu, qui, disent les mauvaises langues, lui envoyaient souvent environ 450 dossiers de candidats à retenir."
Après cette éviction à la tête de l’Ecole normale supérieure, un "garage" lui a cependant été trouvé : la direction des Affaires académiques de l’Université de Yaoundé I où le professeur de langue allemande qu’il est passera quelques années avant d’être rappelé au ministère de l’Enseignement supérieur. Depuis le 10 septembre 2005, il est donc à la tête de la direction du Développement de l’Enseignement supérieur, avec à son actif la gestion matérielle de deux sessions du Brevet de techniciens supérieurs (Bts).
Une gestion qui n’a pas toujours été heureuse, aux dires de ses détracteurs.
On se souvient en effet qu’en 2006 déjà, les enseignants s’étaient plaints des lenteurs observées dans le paiement des frais de surveillance et de corrections de cet examen. Cette fois-là cependant, l’affaire n’avait pas fait grand bruit. Malheureusement, cette année 2007, Norbert Ndong n’aura pas eu la même veine.
Dès le 15 juin dernier, les examinateurs et correcteurs ont apprêté un mémorandum destiné au ministre de l’Enseignement supérieur, Jacques Fame Ndongo. Dans ce document, ils se plaignaient du flou existant dans la gestion du Bts et exigeaient le paiement des frais d’examinassions et d’expertise avant d’entamer les corrections. Certains avaient encore en mémoire la gestion de ces frais l’année dernière où les montants variaient en fonction du client.
Vraisemblablement inquiété face à l’ampleur des revendications des enseignants, le 21 juin, Norbert Ndong est porté disparu de son poste de travail, au moment où, plus que jamais, on y a besoin de lui. Les injonctions du Minesup, à travers un communiqué publié par son secrétaire général par intérim, ne l’ont pas convaincu à rallier son poste. En début de semaine, c’est dans un hôtel de la ville de Douala qu’il a été aperçu. Et déjà, il était filé par des éléments de la gendarmerie. Qui ont fini par lui mettre la main dessus. Même si on ignore encore si, pour cela, ils ont dû lui parler en allemand…
Source: Quotidien Mutations
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