La voix tremblotante, elle a de la peine à raconter sa mésaventure. Un abus perpétré il y a moins d’une semaine par deux jeunes militaires, et dont elle ne semble pas remise du traumatisme. Elle ne connaît pas l’identité de ses bourreaux. Mais elle dit pouvoir les reconnaître dans un carré d’hommes en tenue. Sans grande conviction sur l’efficacité de la démarche, Adèle Ngo Nlep, 19 ans, se prépare néanmoins à déposer une plainte contre X dans les services de la Légion de gendarmerie du Littoral. Avant, elle s’est rendue dans un centre hospitalier de Douala, où les médecins ont remarqué des signes de violences sexuelles, et délivré un certificat médical témoignant de la brutalité subie. " Ma famille et mes amis m’ont fait comprendre que la plainte contre X est la seule chose que je pouvais faire pour le moment. Mais je ne suis pas très sûre de son aboutissement. Je sais que, généralement, l’ouverture des enquêtes sert uniquement à calmer moralement le plaignant… " lance la victime, l’air plus rageur encore.
Selon la jeune Adèle Ngo Nlep, élève en classe de terminale dans un établissement privé de la capitale économique, l’histoire se déroule en effet vers 2h du matin, dans la nuit du dimanche 25 au lundi 26 avril dernier. Habitant le quartier Log-baba, elle revenait d’une veillée mortuaire organisée au lieu dit Ccc-Bassa quand sur son chemin, elle croise un groupe de quatre hommes visiblement ivres et habillés en tenues militaires. Interpellée par l’un d’eux, elle croit d’abord, quoiqu’il s’agisse de militaires et non de policiers ou de gendarmes, à un contrôle routinier d’identification. Elle s’exécute et s’avance en direction des bidasses. Mais la suite des événements lui prouvera le contraire. " Dès que je me suis retrouvée tout près du groupe, l’un d’eux s’est mis à m’insulter et à me menacer. Il m’a demandé d’où je venais à une heure aussi tardive. Pendant ce temps, un autre s’est mis à appuyer fortement mes seins. Il pleuvait légèrement et la route était déserte. Je n’ai donc pas eu le courage de réagir… " raconte t-elle.
Bestialité
Une passivité compréhensible, qui s’avèrera malheureusement désagréable pour la jeune fille. La suite de sa confession dévoile au grand jour les agissements peu honorables de certains hommes recrutés au sein de l’armée. " Un taxi est passé par là, et deux des quatre militaires l’ont emprunté pour une destination dont je ne me rappelle pas. Les autres m’ont demandé de les suivre, en menaçant de me conduire au commissariat si j’osais résister. Le premier m’a saisi le bras gauche et l’autre m’a poussée dans la broussaille. En voulant crier au secours, il m’ont botté avec leurs rangers et m’ont fermé la bouche avec force. Comme j’étais vêtue en kaba, ils m’ont facilement déshabillée et m’ont violée sous la pluie, et chacun à son tour… ", révèle t-elle. La besogne achevée, les deux complices ont pris la poudre d’escampette, abandonnant leur victime dans les buissons, sans force. C’est pratiquement une demie heure plus tard, que Adèle Ngo Nlep retrouvera un peu d’énergie pour remettre ses vêtements et regagner enfin le domicile familiale. Dans la même nuit, un groupe de jeunes du quartier Log-baba, alertés par les frères aînés de la fille, ont effectué une descente aux alentours du lieu où le viol a été commis, dans l’espoir d’y retrouver les militaires. Ils ravaleront leur hargne, hélas, les militaires ayant disparu dans la nature. Actuellement, tous les espoirs de la famille de la fille semblent reposer sur cette plainte contre X. En attendant, les frères et amis de Adèle Ngo Nlep sillonnent chaque jour le périmètre de Ccc-Bassa. Ils promettent de faire la peau à tout militaire " suspect " repéré par là, prévient-on.
Source : Quotidien Mutations
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