En prélude à cet événement, Me Atangana Ayissi, membre du conseil de l’ordre du Barreau du Cameroun s’est confié au Messager.
Me Atangana Ayissi pouvez-vous, expliquer ce qu’est le Cib ?
La Cib est le sigle donné à la Conférence internationale des barreaux de tradition juridique commune qui a vu le jour le 29 novembre 1985 sur initiative de 24 barreaux dont celui du Cameroun, représenté par Mes Douala Moutomè et Monguè Din, sous le bâtonnat de Yondo Black. Notre barreau est donc membre fondateur de cette structure qui s’assigne pour l’objectif l’appui mutuel au développement structurel et fonctionnel des barreaux membres pour leur indépendance dans leur délicate mission de défense des libertés individuelles et de promotion de démocratie dans leurs pays respectifs. Aujourd’hui la Cib compte plus de 50 barreaux de tradition juridique commune.
Qu’est-ce qui caractérise cette tradition dite “ commune ” des barreaux membres ?
Deux grands systèmes se partagent le monde du droit : la Common law qui est pratiquée dans la communauté des Etats ayant en partage l’anglais : le Royaume-Uni, l’Amérique du Nord, la Nouvelle Zélande, l’Australie, l’Afrique australe… Et le système romano germanique qui est pratiqué dans les pays latins et leurs anciennes colonies dont le Cameroun ; c’est l’héritage juridique de 1000 ans de civilisation romaine sur le ‘’vieux continent’’. Ce biculturalisme est plus net dans notre pays qui a réussi à mettre en place une législation uniformisée des deux systèmes. C’est ce qui ressort du nouveau code de procédure pénale. C’est une expérience unique au monde opportunément capitalisée grâce au hasard de l’histoire. Nous ne manquerons d’ailleurs pas l’occasion d’en parler à nos confrères et observateurs internationaux venus du monde entier.
La Cib regroupe les barreaux qui ont en commun le système romano germanique et, de manière plus ou moins avouée, le français en partage, d’où l’intérêt que l’Organisation Internationale de la Francophonie lui porte.
A la différence de la Common law qui s’est bâtie sur des cas concrets soumis aux Cours royales, d’où l’importance de la jurisprudence ici, le droit romano germanique est d’abord doctrinal si vous voulez avec, pour chaque système, ses particularités sur les principes directeurs, la procédure, le déroulement du procès, l’administration de la preuve, etc.
Le thème de ce congrès est l’argent et la justice. Doit-on y voir un rapprochement avec les procès actuels et le contexte de lutte contre la corruption engagée dans notre pays ?
Je ne le crois pas. Les thèmes de conférence sont arrêtés à l’avance par le secrétariat de la Cib qui est à Paris et sont d’intérêt général à tous les barreaux membres dans leur mission de développement de la justice, de la protection des droits de la défense, des droits de l’Homme et de la démocratie. La politique intérieure du Cameroun n’a donc en rien inspiré le thème retenu cette année. Il faut aider la justice à examiner dans la sérénité les affaires en cours.
Il sera plutôt question au cours de ce congrès de l’amélioration de la qualité de la justice sous l’angle financier. Les congressistes seront appelés à analyser la très forte incidence de l’argent, comme un frein censitaire à la démocratisation de la justice. De nombreux citoyens en effet n’arrivent pas à jouir de leurs droits d’accès à la justice du fait de son coût élevé, davantage compliqué par leur faible pouvoir d’achat.
Un autre aspect interpellera à coup sûr les politiques gouvernementales. En effet, il est constaté que des budgets conséquents ne sont pas suffisamment consacrés ni au niveau structurel et fonctionnel de la justice, ni et encore moins, au niveau des acteurs judiciaires et parajudiciaires. Nous pensons que l’indépendance financière de la justice est nécessaire et préalable à son indépendance tout court, si nous voulons réellement que la justice soit la chose la mieux distribuée. Une justice de qualité, attrayante pour les investissements est contributive au relèvement du taux de croissance de nos Etats.
Source: Le Messager
|