Dans cette édition, notre compatriote dont le patriotisme et les affinités avec le régime en place ne peuvent être remis en cause, elle décortique dans une enquête minutieuse et dense, ce qu’elle a qualifié de "Diplomatie, histoire d’un long naufrage".
On découvre dans les 6 pages de cette enquête : la paupérisation de nos diplomates à l’étranger ; le délabrement de nos représentations ; l’abandon de nos postes de chef des missions ; l’absence totale d’une diplomatie agressive pouvant faire la promotion du Cameroun et des Camerounais sur la scène internationale.
Sous d’autres cieux, les parlementaires prenant connaissance de ce document fort fouillé, auraient interpellé le ministre en charge des affaires étrangères pour s’expliquer. Rien. Tout s’est passé comme si l’isolement du Cameroun était un objectif vers et pour lequel nos plénipotentiaires avaient été désignés pour œuvrer.
Lorsqu’on se livre à une rétrospective diplomatique, une grille nous démontrerait que, des années 70 à 90 florissantes, les Camerounais ont été progressivement et patiemment délogés des postes du système des Nations Unies qu’ils occupaient brillamment et avec des résultats. Pourtant, rien ne démontre que ces postes aient été supprimés, au contraire, les besoins exprimés les ont augmentés. Rien ne prouve non plus que les Camerounais soient devenus incompétents et non compétitifs.
Il existe curieusement au sommet une volonté d’isoler ce pays pourtant riche et dynamique.
Cette semaine, deux grands rassemblements se déroulent, un à Syrtre en Lybie pour le 5è anniversaire de UA ; l’autre à Cuba pour le 4è sommet des Non alignés. A défaut d’y être au niveau le plus élevé, le Cameroun sera représenté. Par contre à l’Assemblée générale de l’Onu où nous n’aurons qu’un strapontin, nous y serons représentés au sommet de l’Etat.
Allez donc comprendre les choix du chef de l’Etat camerounais qui préfère les tribunes mondiales ou occidentales à celles du continent noir.
Savoir partir comme Joseph Ki-Zerbo
Cela faisait plus de trois heures que le professeur Joseph Ki-Zerbo était assis à la même place, devant une petite table ronde au bord de la piscine d’un hôtel à Niamey (Niger). Il répétait les mêmes gestes, prenant des notes sur des bouts de papier, lisant un gros livre aux feuilles jaunies par le temps.
" Nous aimerions lire vos mémoires professeur " l’interrompai-je. Le grand bonhomme lève sa tête que protège un bonnet zébré et répond de sa voix fluette et monocorde: " Je n’ai pas assez de temps pour cela. En plus je commence à avoir de trous de mémoire ". Il venait d’avoir 81 ans en juin de l’année dernière.
Depuis quelque temps, le prof avait réduit ses enseignements d`histoire de l`Afrique aux universités d`Orléans, de Paris et de Dakar. Il faisait des communications ponctuelles très attendues. Pareilles de ses sorties au Parlement Burkinabè ou son mouvement, le Parti pour la démocratie et le Progrès (PDP), jadis deuxième force politique du pays, ne possède plus que 10 sièges Joseph Ki-Zerbo prend du recul de partout, mais il reste dans ses livres.
La proximité de Joseph Ki-Zerbo avec son ami, l`abbé Alexis Kagamé, prof à l`université de Butaré (Rwanda) n`est pas qu`intellectuelle, elle est aussi physique.
Tous deux historiens de formation et de métier, ils vont ensemble contribuer à la rédaction de l`ouvrage collectif "Histoire générale de l`Afrique" dont l`Unesco est le maître d`ouvrage. Ils participent également à la rédaction de la monumentale collection "Les Africains" éditée par "J.A.".
Côté physique, Ki-Zerbo est sahélien, filiforme, acétique, il a le geste lent, le propos mesuré. Aujourd`hui légèrement voûté par les saisons qui passent, ce chercheur infatigable, camarade de Cheik Anta Diop a consacré toute sa vie au service de l`Afrique.
Alexis Kagamé est, lui, de souche hamite venue de Somalie ou d`Ethiopie. Leur proximité physique est très frappante. A la différence de son ami sahélien, Kagamé se méfiait de la politique. Il redoutait ceux qui la pratiquent. Il disait de Senghor: "s`il n`avait pas fait de la politique, il serait ce poète constamment inspiré qui ne cesse de se répéter comme il le fait dans chacun de ses livres.
Il a été définitivement absorbé par politique"
Il est possible que Joseph Ki-Zerbo ait relu ces réserves de son ami rwandais sur Senghor le politique. Ki-Zerbo a écrit une dizaine de livres tous consacrés à l`Afrique. Député à l`Assemblée nationale du Burkina Faso, il aurait voulu aller au-delà… A 82 ans, le prof a décidé de quitter les amphis, les meetings politiques et les débats au parlement, après 50 ans de combat pour l`Afrique. C`est de cette manière que les grands hommes quittent les affaires, avant que les affaires ne les quittent.
Source: Le Messager
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