Face à la recrudescence des accidents de la circulation qui font de plus en plus de morts ces deux derniers mois sur les différents axes routiers du pays, le ministre des Transports, Dakole Daissala, s’est engagé dans une vaste opération d’assainissement de ses services, notamment ceux chargés de la délivrance des divers titres de transports routiers.
Pour y arriver, il a requis le soutien des forces de l’ordre pour contrôler systématiquement les permis de conduire délivrés en terre camerounaise, et s’assurer de leur conformité avec les normes établies. C’est au cours de ces contrôles renforcés que la brigade routière s’est aperçue que de nombreux permis de conduire délivrés ailleurs sont renouvelés dans la province du Sud, contrairement à une lettre circulaire du ministre des Transports adressée à tous les délégués provinciaux des transports.
Ladite lettre souligne que, “ en vue de prévenir la corruption et les diverses fraudes opérées lors des renouvellements et l’établissement des duplicata des permis de conduire, et dans le cadre de la sécurité routière, il vous est formellement prescrit, (…) l’interdiction désormais de renouveler les permis de conduire délivrés dans une province autre que celle de votre sphère de compétence. ”
C’est le non respect de cette prescription qui a amené la brigade routière du Sud à interpeller Gham-Boh Emmanuel, le délégué provincial des Transport du Sud et son collaborateur Amougou Daniel, chef de bureau des permis de conduire dans la même délégation. Après un bref passage au parquet, les deux complices croupissent à la prison centrale de Yaoundé depuis une semaine pour fabrication de faux permis de conduire.
Ils y sont en compagnie des promoteurs des autos écoles Européenne et Léo, impliqués dans cette pratique considérée au ministère des Transports comme “ principale cause des accidents de la circulation. Car ces faux permis de conduire sont délivrés à des personnes qui n’ont jamais tenu un volant. Et dès le lendemain, vous les voyez sur la route, roulant à tombeau ouvert, mettant la vie des usagers en danger, y compris la leur ”, soutient un cadre du ministère des Transports qui se réjouit de ces arrestations et du précieux concours des forces de l’ordre.
“ Au ministère, notre rôle s’arrête à la sensibilisation. Pourtant, il faut bien sanctionner face à l’ampleur des accidents de la circulation et aux nombreuses pertes en vies humaines. Pour cela, nous avons besoin de l’appui des autres administrations ”, déclare le ministre des Transports qui pense qu’en sévissant de la sorte, c’est le blason du permis de conduire qui sera redoré ; lequel permis devra, à son avis, être considéré comme un diplôme dans l’Administration, au même titre que les diplômes du ministère de l’Education nationale. Donc, être authentique et pris très au sérieux
Dissimuler les preuves ?
Deux jours après les arrestations de Gham-Boh Emmanuel et de son acolyte Amougou Daniel, la délégation provinciale des Transports du Sud a été cambriolée le week-end du 26 août. “ Mais rien n’a été emporté. Sauf les archives et la documentation ont été saccagés. Les bureaux et les tiroirs ont été fouillés de fond en comble.
Les documents jonchaient le sol lorsque le personnel est arrivé sur le lieu lundi pour la reprise du service, avant de constater tout ça, alors qu’en allant en week-end, tout était dans l’ordre ”, précise une source au ministère des Transports où l’on soupçonne derrière cet acte un désir de dissimuler les preuves qui accablent le délégué et son collaborateur.
A la suite du constat de la police, une commission d’enquête a été immédiatement mise sur pied par le gouverneur de la province du Sud, Bernard Wongolo pour établir les responsabilités.
L’Auto-école Européenne au point mort
Au siège de cette Auto-école à Yaoundé, règne un calme plat ce samedi 2 septembre 2006. Une voiture d’apprentissage de couleur blanche traîne dans la cour. Le véhicule qui, en temps normal, serait occupé à dispenser des cours pratiques aux postulants au permis de conduire est sans moniteur et sans apprenant. La grosse enseigne suspendue au fronton du bâtiment affiche fièrement : “ Auto-école Européenne. ”
La plaque fait croire que l’auto-école offre la possibilité aux apprenants de disposer du permis de conduire international. L’enseigne indique aussi que les cours sont dispensés par vidéo. Un marketing de luxe rompu par la fermeture des locaux de l’auto-école. L’entrée principale est cadenassée. Aucun employé ne traîne par là.
La semaine dernière, le propriétaire de cet établissement de formation à la conduite automobile a été interpellé en compagnie de son confrère de l’auto-école Léo, du délégué provincial des Transports du Sud et d’un agent de la même délégation des Transports. Ils sont placés en détention préventive à la prison centrale de Yaoundé. Il leur est reproché d’entretenir un réseau de délivrance de faux permis de conduire.
Vivement que l’ardeur du ministre des Transports à traquer toutes les brebis galeuses dans le domaine des transports et de la délivrance des permis de conduire porte des fruits. Car, dans les axes routiers, les conducteurs multiplient des actes d’imprudence. Au point de transformer les routes camerounaises en mouroir.
Source: Le Messager
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