Rarement session parlementaire aura été aussi attendue. Celle qui s’ouvre demain à 16 heures au palais de Verre de Ngoa Ekelle l’aura été davantage par l’Exécutif lui-même, qui n’a jamais eu autant besoin du parlement. Notamment depuis que la pression de la communauté internationale est " montée d’un cran " sur le président Biya, en vue de faire appliquer, en toute urgence, l’esprit et la lettre de l’article 66 de notre constitution, relatif à la déclaration des biens et donc, au contrôle de l’enrichissement individuel de ceux qui nous gouvernent.
Le projet de loi portant déclaration de patrimoine a été bouclé depuis des semaines à la présidence de la République. Un dossier piloté, croit-on savoir, par le ministre d’Etat secrétaire général à la présidence de la République, Jean Marie Atangana Mebara, en relation étroite avec le vice Premier ministre, ministre de la Justice, Amadou Ali. Très peu d’informations ont circulé sur le contenu exact de ce projet qui sera rapidement présenté aux députés. Mais on sait que de nombreux " spécialistes " ont été discrètement approchés pour donner leur avis sur tel ou tel point, ou sur la mouture générale du projet.
Des avocats célèbres, des enseignants d’université, des magistrats de renom et quelques fiscalistes réputés ont ainsi été reçus par le Sgpr à qui ils ont personnellement remis leurs commentaires. Il se dit cependant que l’option générale du projet de loi est à la présentation du problème à partir de la situation actuelle et pour l’avenir, évitant ainsi des effets rétroactifs qui embarrasseraient en premier les caciques du pouvoir.
Une chose reste sûre cependant, c’est que la communauté internationale, représentée ici par les ambassadeurs des principaux pays occidentaux, attend impatiemment la discussion en commission puis en plénière, l’adoption, puis la promulgation par le chef d’Etat de ce texte dont elle devrait se servir pour accentuer la pression pour une nouvelle gouvernance dans ce pays.
Mais avant d’y arriver, il faudra sacrifier à un rituel, celui du renouvellement du bureau de l’Assemblée nationale. Un exercice qui, au fil des ans, a perdu son suspense, Cavaye Yeguié Djibril étant désormais sûr de terminer son mandat de député au perchoir. Mais cette session sera marquée, dans ce renouvellement, par les dissensions internes au Sdf où deux groupes se disputent désormais la légalité dans la conduite des affaires du parti, et qui ont tous décidé de désigner les représentants du parti dans le bureau à constituer de manière consensuelle avec la Rdpc, largement majoritaire.
Le pouvoir du chairman Ni John Fru Ndi lui est officiellement dénié par le président de la cellule des Conseillers, qui dit être la seule structure habilité à parler au nom du parti en attendant la tenue du congrès en mai prochain. Il a donc porté l’affaire devant les tribunaux de la République, qui annoncent le verdict pour ce jour, juste le temps d’indiquer au Rdpc son interlocuteur dans les négociations.
Dans cet environnement général, l’autre question qui a alimenté beaucoup de commentaires ces derniers jours, celle relative à la levée de l’immunité parlementaire de certains députés, risque de ne plus figurer à l’ordre du jour. Non pas que les soupçons qui pèsent sur certains d’entre eux aient été aplanis, mais simplement du fait que les bailleurs de fonds, qui décidément donnent le là dans cette opération d’assainissement, estiment que la priorité ne peut pas être les députés, alors que la haute administration grouille encore de nombreux " clients " de choix qu’il faudrait d’abord entendre. Ceux-ci concourant plus directement, toujours de l’avis de ces partenaires au développement, à la corruption et à la prévarication qui ont gangrené le système, et bloqué les chances de croissance et de développement du pays.
Ainsi rassuré sur tous les plans, Cavaye Yeguié Djibril devrait écouter, dans la sérénité, le doyen d’âge prononcer demain le discours d’ouverture, qui devrait faire un clin d’œil aux femmes (en fête ce jour), dont l’importance démographique et les progrès dans l’alphabétisation tardent à se traduire, dans notre pays, par une représentation consistante dans les cercles de prise de décision.
Source: Quotidien Mutations
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