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Paul Biya prisonnier de son système
(03/01/2006)
Le chef de l’Etat n’a pas pu innover, dénonçant des maux connus et à cours d’idées pour leur thérapeutique.
Par Alain B. Batongué

Les nouveaux ambassadeurs d’Espagne, de Grèce ou d’Egypte, peu habitués aux subtilités de la politique camerounaise et qui viennent tout juste de présenter leurs lettres de créance ont dû être impressionnés le 31 décembre dernier par la texture du message présidentiel de fin d’année délivré par le chef de l’Etat. Dans une posture debout qui lui est désormais coutumière pour indiquer sa robustesse, accompagnant souvent par le geste certains propos forts, Paul Biya a surtout dénoncé les deux travers qui empêchent un bon fonctionnement de notre pays : la bureaucratie et l’inefficacité de notre administration à travers ces hauts responsables qui s’enlisent dans de stériles querelles de personnes ou de compétences, et surtout la corruption.

Des propos parfois très durs, surtout lorsqu’il a révélé les deux facteurs qui bloquent notre marche en avant : "le premier tient à l’inefficacité de certaines administrations qui (…) se contentent souvent d’une simple gestion au long cours ou s’enlisent dans des querelles de personnes ou de compétences. L’absence de projets et le taux anormalement bas de consommation des crédits sont les illustrations les plus fréquentes de ce comportement ".
Puis, abordant l’autre aspect, il martèlera : " Il y a plus grave ; Je veux parler de la corruption (…) Il y a évidemment une totale incompatibilité entre les efforts que nous déployons pour faire reculer la pauvreté et l’enrichissement scandaleux de quelques uns. Le détournement de fonds publics se fait au détriment de la communauté nationale (…) Ces ponctions sur la richesse nationale sont d’autant plus intolérables qu’une partie de notre population continue de connaître des moments difficiles, en particulier celle qui est frappée par le chômage. " Visiblement marqué par ces efforts à contre courant, il frappera du point sur la table : " je voudrais dire très solennellement qu’il faut que cela cesse. "


Rigueur et moralisation

Il n’aura donc pu émouvoir que ceux qui viennent d’arriver au Cameroun, parce que aucune de ses tares dénoncées dans le discours présidentiel n’est nouvelle : le chef de l’Etat, dans ces quatre derniers messages à la nation, a régulièrement dénoncé tantôt " l’inertie ", tantôt " la corruption ", tantôt " l’imprévision ", annonçant des traitements de cheval qui n’ont jamais pris corps, en dehors de quelques actes spectaculaires, très souvent destinés à calmer nos partenaires financiers, notamment les grands bailleurs de fonds que sont le Fmi et la Banque mondiale.
Doit-on le rappeler, le combat contre la corruption faisait partie de son discours d’investiture le 06 novembre 1982 lorsque, pour la première fois, il parla de " rigueur et de moralisation ".

Lors de la création du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc, parti Etat) en mars 1985 à Bamenda, il en fit l’un de ses chevaux de bataille. En juin 1990, pendant que l’opinion nationale le pressait à une ouverture démocratique et à un retour au multipartisme, il fit un autre discours à Yaoundé où il dénonça la corruption. C’est d’ailleurs en prenant en référence ses propres propos que l’aile des " modernistes " du Rdpc défraya la chronique il y a quelques années, en indiquant que les plus gros fossoyeurs de la République, spécialistes des détournements de fonds et de corruption se recrutaient dans les rangs du parti au pouvoir, qui avait besoin de mettre de l’ordre dans sa maison pour gagner en crédibilité. Ce discours fut étouffé, et les initiateurs réduits au silence de diverses manières.

On s’étonnera donc que le chef de l’Etat fasse cas de si peu d’imagination, à moins qu’il n’avoue sa propre impuissance. Car l’Agence nationale d’investigations financières (Anif, qui attend toujours désespérément des locaux fonctionnels), ne pourra pas être la solution au problème évoqué ; ni la chambre des comptes, réduite à contrôler les simples calculs des comptables. Tout le monde le sait, les rapports du Contrôle supérieur de l’Etat régulièrement adressés au chef de l’Etat n’ont jamais été accompagnés de sanctions ; et les représentations diplomatiques savent bien aujourd’hui que plus de 80% des maisons construites à coup de dizaines ou centaines de millions dans les nouveaux quartiers résidentiels de Douala et Yaoundé appartiennent à des fonctionnaires qui n’ont officiellement pas plus de 300 000 de salaire mensuel, et qui ne s’alignent pas devant les banques pour demander des crédits…

Le reste du discours s’est dissipé dans des promesses creuses pour un pays dont " la paix et la stabilité " ont fini par devenir un programme de gouvernement. Seul acte concret à mettre à son actif et qu’il a évidemment rappelé : " la mise au point avec les institutions financières internationales d’un programme triennal pour la période 2005-2008 qui nous ouvre d’intéressantes perspectives ", l’atteinte du " fameux point d’achèvement de l’initiative Ppte ayant pour conséquence d’alléger considérablement le poids de notre dette ". Mais à quoi, dans ces conditions, servira-t-il de l’atteindre si cela doit profiter à quelques fonctionnaires champions de la distraction des fonds et désormais sûrs de leur impunité ?

A titre de comparaison, le président sénégalais s’est aussi adressé à ses compatriotes, sans faire dans la même langue de bois, puisant au contraire dans des éléments concrets. Quelques illustrations : au niveau de l’éducation Abdoulaye Wade a rappelé la priorité de son gouvernement qui est de consacrer 40% du budget à l’éducation, ce qui a permis " la construction massive d’infrastructures scolaires : 500 collèges moyens, 30 nouveaux lycées et 4 universités scientifiques en construction ". Au plan économique, Abdoulaye Wade relève " un taux de croissance supérieur à 6% pendant deux ans consécutifs et annonce une stratégie de croissance accélérée qui permettra d’atteindre 7% en 2006, dans un environnement favorable où les ressources budgétaires ont été doublées sans augmentation des impôts et sans création de nouveaux impôts, et où 15.000 nouveaux postes viennent d’être crées à la Fonction publique. " Dernier cliché, le social avec une politique d’habitat social concrète, construite autour du slogan " une famille un toit ". Ici, l’Etat subventionnera 33% du crédit logement et le reste sera remboursé par le citoyen à faible taux d’intérêt, pendant une période de 10 à 15 ans. Exemple concret : une famille qui a besoin de 9 millions pour construire une villa remboursera en réalité 6 millions en 10 ans.



Source : Mutations




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