La capitale économique du Cameroun ressemble de plus en plus à une poubelle géante. Par ce temps de pluies incessantes, les emplacements désignés pour l’installation des bacs à ordures offrent souvent un spectacle scandaleux, même quand ces bacs ont été vidés par les services compétents. Au lieu dit Shell New-Bell, comme à Nkongmondo, ancien Makoumba Makoumba à Akwa ou encore du côté de la Nouvelle route Bonadibong, au carrefour des Flèches plus connu de nos jours sous l’appelation “ Douches ” en souvenir des douches et de la buanderie municipales qui existaient dans les parages jusqu’à la fin des années 60, à certains endroits de Bali, un des quartiers plus ou moins résidentiels de la ville, les poubelles flottent sur un mélange de boue et de déchets, dégageant une odeur pestinentielle. L’étranger qui visite Douala doit se demander sur quel bourbier il est tombé. Et s’il a le courage de s’aventurer dans les marchés, il risque de mourir d’étouffement. De Deido (Saker) à Bonassama en passant par Ndokoti et New-Bell (marché central), nos marchés sont eux-aussi des dépôtoirs où les produits alimentaires déposés à même le sol sont assaillis par des armées de mouches, asticots et autres bestioles qu’on n’aimerait pas vraiment avoir comme invités à table. Cette réalité, déjà choquante en saison sèche, semble s’être aggravée avec la saison des pluies parallèlement à la dégradation de l’état de nos routes. Pauvre cité portuaire qui était encore il y a un quart de siècle la lumière de tout un pays. Mais à qui la faute ?
Tous responsables !
“ Le Cameroun est un des rares pays au monde où tout va pour le mieux alors que les autorités ne font rien” disait il y a une trentaine d’années un observateur averti de la scène camerounaise. On était encore bien loin du laisser-faire actuel. Que dirait-il aujourd’hui où tout le monde contribue d’une manière ou d’une autre, au désordre urbain de Douala. D’abord les pouvoirs publics qui manque cruellement de volonté politique. Sinon comment comprendre que les commerçants s’installent souvent n’importe où au marché, pourvu qu’ils trouvent le moyen d’écouler leurs marchandises, sans qu’ils en soient délogés par les autorités locales ? Ensuite, les populations de Douala elles-mêmes ne sont pas exemptes de reproche quant à la situation chaotique de cette mégapole. Combien sont-ils, les citoyens qui prennent le temps de jeter les ordures exactement dans les bacs disposés à cet effet ? Combien de gens savent dans ce pays que la loi sur la protection de l’environnement, du 5 août 1996 dans son article 47-3 interdit formellement le mélange des déchets domestiques (ménagers) avec les déchets industriels produits par des usines ?
Là encore, L’Etat a-t-il pris la peine d’informer régulièrement les Camerounais à ce sujet ? Les citoyens ont-ils de leur côté cherché à connaître cette loi que nul n’est pourtant sensé ignorer ?
Par ailleurs, comment expliquer qu’un pays comme le Cameroun n’ait pu construire une seule décharge répondant aux normes internationales en matière de protection de l’environnement, alors que la législation nationale exige la séparation des déchets ? Et même si le tri sélectif était effectué que ferait-on des déchets industriel en l’absence d’une usine de traitement de ces déchets ? A ce propos, un projet de construction d’un dépôt des déchets industriels à Douala, initié par l’association Environnement Concerns (Ong américaine) et déclaré éligible au financement Ppte, le 16 février 2004 pour les crédits de l’exercice 2005 pour le compte du ministère du développement urbain et de l’Habitat, serait toujours bloqué dans les tirroirs de ce département ministériel. Pendant ce temps, les conséquences du manque d’un dépôt de déchets industriels, pourtant indispensable à la capitale économique du pays, sont incommensurables.
Source: Le Messager, Jean-Célestin EDJANGUE
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