"Vous avez encore un blanc en stage à Mutations? Ils sont incroyables ces gens. Avec toutes les infrastructures qu'ils ont chez eux, ils trouvent quand même le moyen de faire leur stage ici. Qu'est-ce qu'ils cherchent vraiment ?", se demande une visiteuse au siège du journal. Elle vient d'apercevoir Arnauld Bernard, l'un des stagiaires, en provenance de France. Elle se rappelle aussi qu'il y a un an, des amis lui avaient rapporté la présence de Benoît Léty, un autre Français arrivé dans le même but à la rédaction de Mutations. Si les déclarations de la jeune femme peuvent paraître inattendues, elles ne font pourtant qu'exprimer la surprise et la perplexité de nombreuses personnes quant aux raisons qui poussent des jeunes étudiants, occidentaux notamment, à venir au Cameroun. D'autant qu'ils sont de plus en plus nombreux à débarquer ici pour des stages académiques d'un à trois mois. "J'ai un ami camerounais qui m'a encouragé à venir à Mutations et comme j'ai un oncle qui vit ici, je n'ai pas beaucoup hésité. Je suis étudiant en Sciences politiques mais le journalisme m'intéresse, raconte Arnauld Bernard. Je pense que cette expérience pourra jouer en ma faveur à mon retour, car Mutations jouit d'une bonne réputation. Par contre, je n'aurais pas accepté d'aller à Cameroon Tribune qui est un journal un peu trop classique à mon goût", ajoute le jeune homme de 22 ans. Deux de ses compatriotes ont pourtant exercé, entre mai et juin 2005, au sein du quotidien national.
Sophie Guerin et Naëlle Le Moal arrivaient de l'Institut supérieur de communication et des médias de Grenoble où elles reçoivent une formation de journalistes. Comme l'école offre à ses étudiants la possibilité de faire des stages à l'étranger, grâce à certaines allocations, les deux jeunes filles ont choisi le Cameroun, car elles souhaitaient "découvrir un pays africain et le Cameroun est l'un des rares pays d'Afrique noire où on n'entendait pas parler de guerre ou de famine". Des contacts à Cameroon tribune ont permis d'effectuer les démarches et c'est une Organisation non gouvernementale, Alliance solidaire, basée en France et oeuvrant pour la facilitation des transits Cameroun-France, qui s'est chargée d'organiser leur séjour.
Si le journalisme semble attirer plus de stagiaires, les hôpitaux accueillent aussi ces jeunes venus acquérir de l'expérience. C'est le cas de la Maternité d'Etoudi qui a une longue tradition d'accueil de stagiaires étrangers. Ceux-ci arrivent notamment de France, du Canada, du Burundi ou encore du Congo. "Nous recevons des groupes d'étudiants qui viennent souvent voir comment se prodiguent les soins dans les hôpitaux camerounais. La plupart des stagiaires occidentaux ont l'intention d'ouvrir des centres ici, après leur formation. Ils voient quelles sont nos faiblesses et nos atouts", explique Octavie Atangana, une infirmière. "Je suis là pour vivre une expérience différente. On a presque tout chez nous, mais j'ai envie de savoir comment ça se passe ailleurs, surtout dans les pays sous-développés. Je fais une sorte de tournée pour mes stages. L'année dernière, j'étais en Thaïlande et au Chili. Cette fois, j'ai travaillé en Somalie, au Bénin et enfin au Cameroun. Pas pour me moquer de la misère des gens, mais pour être sûr que je n'ai pas envie de rester dans un bureau climatisé à soulager des maux imaginaires", raconte Pieter Vranken, étudiant Néerlandais en 3e année de médecine à Paris.
Expériences
De même, dans le cadre de coopérations entre certaines universités françaises et des Ong, des étudiants en médecine sont envoyés au Cameroun. Ainsi, ils sont trois à l'hôpital Central, deux au Centre hospitalier universitaire et un à l'hôpital Militaire de Yaoundé. Pour Antonio Maggiolli, les raisons de sa présence sont moins nobles. "En fait, j'étudie le commerce international. J'avais envie de découvrir le Cameroun que je connais grâce à son équipe de football. Mon père possède une société forestière à Bafia et je me suis dit que c'était l'occasion ou jamais de m'amuser. Il a exigé cependant que je l'aide et donc, j'ai le statut de stagiaire académique dans son équipe".
Si pour lui, du point de vue financier, les choses sont évidentes, ce n'est pas toujours le cas pour ceux qui ne connaissent personne ici. La plupart logent dans des foyers contre des sommes importantes, ou chez des particuliers. Comme ce fut le cas pour Sophie et Naëlle. Les jeunes filles ont versé une rente de plus d'un million pour leurs frais de transport, leur nutrition et leur hébergement à une dame à Leboudi, un petit village sur la route d'Okola. En plus d'une caution du même montant. "Si nous connaissions des gens ici, nous aurions pu payer moins cher", déclarent-elles. N'empêche, elles ont apprécié leur séjour au Cameroun et surtout, elles repartent avec une "expérience" qui leur sera fortement utile. "Tout ce qu'on dépense pour arriver ici doit bien servir un jour à quelque chose", espère Pieter Vranken.
Source :Quotidien Mutations
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