Elle n’était pas seulement son épouse, son amie, sa conseillère plus de
cinquante ans durant. Elle lui chuchotait aussi des avis sur la manière de
porter ses costumes, sur la manière de se tenir devant les gens, etc… Chacun
dans l’assistance mesure alors la perte que Victor Fotso vient de subir. Le
cercueil de sa défunte épouse, Lydie Rosette Fotso née Hanffou, gît là tout
près.
Les grandes douleurs sont muettes. L’homme ne parle pas longtemps. Ceux qui ont
la mémoire des détails voient que la bière ressemble beaucoup à celle de feue
Jeanne Irène Biya, décédée en août 1992. Une fois encore et malheureusement, des
milliers de personnes sont venus à Bandjoun pour soutenir la famille de nouveau
endeuillée. Cette fois, c’est l’épouse du capitaine d’industrie que l’on conduit
à sa dernière demeure. Ce samedi, l’esplanade de la résidence de Victor Fotso à
Bandjoun sert de place des cérémonies. Evêque de Bafoussam, Mgr Joseph Atanga a
fait le déplacement et officie. Les témoignages suivent bientôt.
Pour avoir perdu très tôt son père, Lydie Rosette Fotso, généreuse, était le
pilier de sa famille. La réserve de la sœur, Esther Tchouta Moussa,
représentante de la famille Hanffou, fait place à l’épanchement des enfants.
Roger Fotso d’abord, impressionné que tant de monde soit venu dire adieu à sa
maman. Dans un élan de spontanéité, il avoue avoir envie de mourir lui aussi.
Yves-Michel, lui, admire l’endurance, le stoïcisme et la dignité de la disparue.
Malade de longues années durant, maman Lydie, comme on l’appelait, ne se
plaignait, dit-on, jamais et supportait la douleur comme la grande dame que
chacun décrit. Elle aussi avait connu joies et peines. La perte de frère et de
sœurs, mais surtout celle de sa première fille, maître Florence Fotso, en 1998,
ont été des moments difficiles.
Les péripéties d’une maladie longue de près de quinze ans, Yves-Michel les
raconte avec émotion, mettant en exergue la foi de cette croyante à laquelle le
Seigneur avait offert bien des grâces. Comme celle de revenir d’un coma de huit
jours à la suite d’une opération chirurgicale au cou. Comme celle de retrouver
l’usage des membres après une paralysie de six mois. Les derniers moments de sa
maman à Paris, Yves-Michel les a vécus grâce au chef de l’Etat, Paul Biya, qu’il
remercie. Son passeport lui avait en effet été restitué pour effectuer le
déplacement de la France. Des hommages, il y en a d’autres. Le président de la
République centrafricaine, François Bozize, a dépêché une délégation et fait
parvenir un message de condoléances à Victor Fotso. Un autre message vient de la
princesse Mercedès Puyol Ngyen, voisine d’immeuble, trente ans durant, de Lydie
Rosette Fotso à Paris.
Le Tchad aussi s’est manifesté, ainsi que des personnalités politiques,
administratrices, traditionnelles de notre pays. Le vice Premier ministre chargé
de l’Agriculture et du développement rural, Jean Kueté, est en effet présent. A
ses côtés, des membres du gouvernement, des opérateurs économiques et une foule
d’invités et d’amis. La vie de la défunte est évoquée dans une plaquette
illustrée de dizaines de photos inédites, une plaquette que l’on s’arrache sous
les tentes. Où la logistique des grands jours a été mobilisée pour ces obsèques
grandioses. La dernière fois que l’on a vu autant de monde dans le chef-lieu du
département du Koung Khi, c’était à la faveur des funérailles de Ma Maptue, la
mère de Fotso Victor, il y a quelques années. Née le 20 octobre 1935 à Bandjoun,
Lydie Rosette Hanffou avait épousé Victor Fotso le 16 décembre 1955. Elle laisse
sept enfants et de nombreux petits fils.
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