Décision dans laquelle la Haute cour constate le désistement de Dzou Tabi, qui reconnaît ainsi l'appartenance du terrain querellé à Menanga Adolphe. Plus de 30 ans après ce verdict, Ottou Balla Hubert, l'un des petits-fils Dzou Tabi, qui se présente comme étant avocat stagiaire à l'étude de maître Foulletier (l'avocat de son grand-père) à l'époque des faits, révèle une information à la fois grave et troublante : la décision de la Cour a été rendue (1970) après le décès de maître Foulletier (1969), dont l'étude à eu pour liquidateur maître Zébu, qui n'est autre que l'avocat de Menanga Adolphe, c'est-à-dire, la partie opposée à Dzou Tabi. Comment les juges de la Cour suprême n'ont pas pu s'apercevoir de cette situation qui exhale une forte odeur de collusion d'intérêt ou alors de délit d'initié ?
Ce d'autant que Hubert Ottou Balla soutient qu'en 1970, pour mettre un terme au litige dans lequel il avait intérêt (puisque étant l'avocat de l'une des parties), maître Zébu devenu liquidateur de l'étude de maître Foulletier, a "profité de l'illettrisme de Marc Dzou Tabi pour lui faire signer la lettre de désistement" sur laquelle la Cour suprême s'est appuyée pour rendre son verdict en dernier ressort. Laquelle lettre de désistement est par ailleurs invisible, alors que dans le fond du dossier judiciaire de cette affaire, figurent des jugements plus anciens prononcés notamment en 1968.
En réaction à cette information de Hubert Ottou Balla, Thomas Fozein qui est présenté comme le mentor de la famille Menanga coupe, sec : "Qu'est ce qui prouve que Dzou Tabi allait avoir gain de cause devant la Cour suprême après avoir été débouté par le tribunal coutumier et la Cour d'Appel ? L'on ne peut se prévaloir de sa propre turpitude. Ces élucubrations ne m'intéressent pas. Cela ne remet pas en cause l'autorité de la chose jugée.
Moi, ma bible c'est le droit". Et Fouda Etoundi Fils d'ajouter : "Vous dites qu'Ottou prétend qu'il était avocat stagiaire à l'étude de maître Foulletier à cette époque-là. Pourquoi n'a-t-il pas saisi la Cour suprême pour attirer son attention sur ce qu'il raconte aujourd'hui ? C'est une histoire fausse".
Par ailleurs, quelle curiosité que cette décision rendue par la Chambre administrative de la Cour suprême en 2004, par laquelle cette juridiction donne raison à la famille Dzou Tabi face à l'Etat du Cameroun accusé d'avoir frauduleusement donné un titre foncier (numéro 12948) à la famille Menanga, sur un terrain revendiqué par les Dzou Tabi ! La Chambre administrative s'est-elle rendue compte de quelques entourloupes dans la délivrance dudit titre foncier ? Où en est-on avec l'appel interjeté en 2005 par l'Etat, sur cette décision le déboutant ? Autant de zones d'ombre à éclaircir dans cette affaire dans laquelle certains documents délivrés par le service des Domaines suscitent également quelques interrogations.
Un terrain, deux titres ?
Il en est ainsi de ce "rapport d'état des lieux de reconstitution des limites du titre foncier n°5094 [celui dont les Dzou Tabi sont propriétaires] suivant lettre ministérielle n° 002643 du 22 octobre 2004". Selon ce document initié pour voir plus clair dans le litige foncier qui perdure au carrefour Golf à Yaoundé, le "géomètre assermenté du Cadastre" Maurice Tegho, qui avait été envoyé sur le terrain par ses supérieures hiérarchiques a donné une conclusion qui renseigne à suffisance sur les pratiques peu orthodoxes en vigueur dans les services des Domaines du Cameroun.
Dans son rapport co-signé par le chef service provincial du Cadastre du Centre, le géomètre écrit : "d'un constat général, les limites du titre foncier n° 5094 parcelle B appartenant à Marc Dzou Tabi, immatriculé le 22 décembre 1972 épousent intégralement celles du titre foncier 12948 appartenant à Adolphe Menanga, immatriculé le 24 juin 1975".
Par conséquent, poursuit le géomètre, les deux titres fonciers "ne constituent en réalité que la même et unique parcelle". Conclusion, le service des Domaines a délivré deux titres fonciers à deux familles sur un même terrain. Ce qui est interdit et devrait, en principe, induire l'annulation de l'un des titres. En l'occurrence, le plus récent, précise un juriste. Au demeurant, une observation pointilleuse permet de constater que le rapport du géomètre, que Thomas Fozein qualifie de "faux", est entaché de quelques irrégularités.
En effet, comment un titre foncier portant sur 9 hectares (le 12948 des Menanga) peut-il "intégralement" épouser les contours d'un titre foncier de 4 hectares seulement (le 5094 des Dzou Tabi) ? Interpellé sur cette remarque, un agent du service des Domaines du Mfoundi tente un éclairage : "au regard des deux superficies, la seule explication valable est que le titre foncier 12948 (9 hectares) a englouti la parcelle pour laquelle le titre foncier 5094 (4 hectares) a été délivré. Ce qui signifie qu'en réalité, le titre foncier 12948 aurait dû porter uniquement sur 5 hectares et non sur 9 hectares comme c'est le cas". Autre écheveau à démêler dans cette affaire.
Source: Quotidien Mutations
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