Les mairies camerounaises sont endettées
Lors de la dernière réunion de coordination administrative
de la province de l’Adamaoua, le gouverneur Enow Abrams Egbé a fortement exhorté
les préfets à encadrer les maires dans leurs missions pour donner une chance de
succès à la décentralisation annoncée. C’est que dans la majorité des cas,
nombre d’élus locaux de cette province et, à l’observation, de la région
septentrionale manquent d’outils de gestion municipale. Du fait de leurs
surfaces financières ou de leur entregent, beaucoup se sont retrouvés à la tête
des mairies. Lesquelles ont tout de suite été transformées en vaches à lait, du
moins en zones d’influence. Normal donc que plus d’un an après leur élection,
l’on compte à peine sur les doigts des deux mains, les maires en mesure de
présenter un bilan imposant.
A contrario, quelques-uns sont désormais dans le
viseur de la Commission nationale anti-corruption. C’est le cas du maire de
Fotokol dans le Logone et Chari. Une correspondance signée d’une vingtaine de
conseillers en date du 22 mai 2008 dénonce des irrégularités constatées dans le
compte administratif de 2007. Le recouvrement des recettes, la réhabilitation de
la voirie urbaine, les travaux d’adduction d’eau et d’électrification auraient
été passés par pertes et profits par Mahamat Moussa.
Des cas similaires foisonnent dans la région. Parmi les nouvelles communes
créées en avril 2007, peu fonctionnent normalement. Après l’utilisation à
géométrie variable de la subvention de 30 millions Fcfa offert par l’Etat,
l’heure est désormais à la navigation à vue. Prospective, programmation, connais
pas ! L’on se contente d’attendre les centimes additionnels communaux (Cac) pour
régler les charges salariales, tout au moins.
Autre casse-tête dans les communes du Septentrion, le recouvrement des recettes.
L’incivisme fiscal est fortement ancré ici dans le vécu quotidien des
populations. A la commune de Ngaoundéré 1er par exemple, la secrétaire générale
Rassidatou, révèle qu’entre janvier et juin 2008, à peine 20 millions Fcfa ont
été recouvrés, soit 1/3 des recettes attendues. Selon Oumar Diallo, le premier
adjoint au maire de cette commune, sur 5 000 conducteurs de motos recensés, 400
seulement s’acquittent de l’impôt libératoire. Certaines personnalités
politiques, traditionnelles et religieuses, propriétaires de boutiques ou de
troupeaux de bœufs refusent de payer l’impôt, fait-on savoir.
De temps à autre, les autorités municipales sont obligées de requérir le soutien
des forces de l’ordre pour des recouvrements forcés. D’après les textes en
vigueur, les taxes et droits devant renflouer les caisses des communes sont au
nombre de treize : le produit de l’impôt forfaitaire, la taxe d’eau, la taxe sur
les ambulances municipales, la taxe de l’inspection sanitaire, le droit
d’occupation temporaire de la voie publique, la taxe sur le stationnement, la
taxe sur les spectacles, les droits des stades à l’exception des stades
omnisports, la redevance sur la dégradation de la chaussée, la taxe d’enlèvement
des ordures, la taxe de transit, la taxe d’assainissement, etc.
Cependant, le recouvrement reste aléatoire. "Les usagers ignorent beaucoup de
ces taxes. D’aucuns considèrent que cela relève de l’escroquerie. Nous allons
continuer de les sensibiliser", déclare un conseiller de la commune de
Ngaoundéré 2e. En outre, le fonctionnement de certaines communes est bloqué par
la non nomination de délégués du gouvernement auprès des communautés urbaines.
Dans d’autres communes de la zone septentrionale, les préfets et sous-préfets
sont accusés de faire obstruction aux maires. Cela a été noté à Kaélé dans le
Mayo-Kani. Les divergences tournent généralement autour du partage des
ressources financières municipales…
Source : Le Messager
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