"...J’ai été obligée de constater que, au contraire, la plupart des produits ont vu leur prix augmenter ”. Eliane Musongo, une femme de quarante-cinq ans habitant le lieu dit Feu rouge Bessenguè, à Douala, est désabusée. Elle qui pensait, s’appuyant sur les ordonnances présidentielles du 7 mars 2008 en vue de la lutte contre la vie chère, desserrer un peu sa ceinture, s’aperçoit qu’elle va devoir la serrer jusqu’aux derniers trous. “ Au marché New-Deido, le kilogramme de viande de bœuf sans os [la viande n’est pas concernée par les ordonnances du 07 mars, ndlr] oscille entre 2.600 et 2.700 Fcfa. Il y a deux mois, on pouvait encore manger le même kilogramme de viande pour 2. 200 ou 2. 400 Fcfa. Quant au pain, certes en apparence il coûte toujours 150 Fcfa. Mais son grammage a chuté. On l’impression que les pouvoirs publics de ce pays n’ont rien compris des violences de la fin du mois de février dernier ”, s’indigne-t-elle.
Thérèse, une autre femme qui avait cru que la date du 1er avril approchant, nombre des produits indexés par les émeutes contre la vie chère en fin février vont retrouver des prix accessibles à toutes les bourses n’en revient pas : “ Je suis allée à Youpwé samedi dernier pour acheter du poisson. Il n’y en avait presque pas. Sinon des tout petits poissons et à 1.700 Fcfa. Les mêmes poissons que l’on pouvait encore avoir à moins de 1.400 Fcfa”, affirme cette jeune femme. Elle poursuit : “ Comment veulent-ils que nous les prenions au sérieux. Ils ne sont même pas capables de faire respecter les décisions qu’ils prennent ”.
“ Poisson d’avril ? ”
Ce sont probablement les restaurateurs qui sont le plus surpris par la situation actuelle. Ils comptaient sur la baisse effective des prix de certains produits pour la faire répercuter sur la carte des menus. C’est en tout cas ce qu’explique Mor du restaurant sénégalais La Terranga, à Akwa : “ Je croyais que c’est aujourd’hui, 1er avril, que les prix devaient baisser sur le riz, le poisson, la viande, le lait… J’ai envoyé mes cuisinières au marché Mboppi. Elles en sont revenues après avoir constaté que le poulet mis à part, aucune autre denrée n’a vu son prix véritablement diminuer. Pour de nombreux produits, les prix ont plutôt augmenté ”.
Et de préciser : “ Le lait en poudre se vend à 3.200 Fcfa le sac d’un kilo contre 2. 200 Fcfa avant. Le sac de 50 kilos de riz brisé coûte maintenant 16.000 Fcfa alors que six mois auparavant il était vendu à 11. 500 Fcfa. Le prix du sucre en poudre a lui aussi augmenté de 100 Fcfa”.
Du coup, Mor ne peut s’empêcher de lancer comme une boutade : “ Le chef de l’Etat, en prenant ses ordonnances, voulait peut-être préparer un poisson d’avril. Mais personne ne l’a compris ainsi. Il doit si ce n’est pas le cas, veiller à l’application de ses textes contre la vie chère ”. De quoi faire réfléchir les fonctionnaires qui attendent la hausse de leurs salaires cette fin du mois d’avril 2008. A la vérité, les ordonnances du chef de l’Etat ne concernent qu’un nombre très limité de produits de grande consommation. Mais de nombreux citoyens pensaient que, comme par un coup de baguette magique, tout allait baisser sur le marché. Non seulement ces produits de consommation de masse nommément cités sont vendus au même prix qu’avant les ordonnances, mais surtout les prix de ceux qui n’étaient pas concernés montent en flèche. Les citoyens commencent à perdre leurs illusions.
Source: Le Messager
|