Marilyn Nguemo donne son avis sur les stratégies à adopter en entreprise au Cameroun
En quoi consiste concrètement votre travail ?
Je suis en quelque sorte le médecin des entreprises. Sur la base des problèmes qu'un groupe m'expose, j'émets un diagnostic et je propose des solutions pour palier à ces entraves. Prenons le cas d'une entreprise qui traverse une crise de mésentente entre ses membres. Mon travail va consister premièrement, à identifier le problème, au delà de ses manifestations. Tout partira donc, de l'analyse de la situation au travers des entrevues individuelles et anonymes avec les parties. En aparté, chacun pourra me donner son avis sur les causes du problème et proposer une issue. Au terme de ces échanges, je pourrais être à mesure de déterminer le fondement de la crise. Si c'est par exemple un problème de leadership qui mine les rapports de l'équipe, je suggèrerais par exemple d'encadrer et de renforcer les capacités des dirigeants. Si le problème réside dans la planification du travail, je proposerais de recentrer les zones d'intervention des uns et des autres en spécifiant clairement les tâches des différentes parties prenantes de la structure. Mais avant de parvenir à ce stade, je dois mener une sorte de thérapie de groupe basée sur un concept ou des éléments neutres, qui permettront d'éveiller l'esprit de groupe et de ranimer la confiance entre les parties. C'est ainsi que lors des séminaires ou des ateliers, on pensera à des exercices ou des divertissements.
Pour acquérir ces aptitudes, cela a dû nécessiter des années de formation…
Oui. Etre consultante requiert en effet une formation pour acquérir des outils théoriques et techniques. A mon arrivée à l'agence conseil stratégie en 2003, j'ai bénéficié d'une formation. Une initiation dont les modules sont axés sur la mise sur pied et la mise en application des stratégies. En dehors de ces pré acquis, le travail de consultant nécessite un sens analytique (pour analyser les situations), et un esprit d'éveil accru. En effet, il faut être ouvert et toujours curieux. Par ailleurs, dans cette branche, il faut avoir au moins le niveau licence. Nous avons essayé de former les diplômés en Brevet de technicien supérieur (Bts), ça n'a pas vraiment marché. Ils ont reçu une formation beaucoup trop pratique, l'université a cet avantage qu'elle développe l'esprit d'analyse des étudiants du fait des cours beaucoup plus théoriques que pratiques.
Quelles sont les difficultés auxquelles vous devez faire face ?
Ce ne sont pas vraiment des difficultés, je parlerais plutôt de challenges. Parce qu'il faut être apte à trouver des méthodes participatives, où l'individu est au centre de l'apprentissage. Pour analyser une crise et la désamorcer, il faut un travail de fond et suffisamment de disponibilité. Mais le souci des employeurs est de raccourcir les séances de " consultation ". Pour " gagner du temps ", ils nous demandent généralement de leur présenter un modèle général pour palier à leur problème, ignorant qu'à chaque problème sa solution. Une multinationale de 150 ans d'existence n'a pas forcément les mêmes préoccupations qu'une petite et moyenne entreprise (Pme) de 5 ans d'âge. Je dois donc user de tact pour leur expliquer que les stratégies doivent donc être adaptées aux situations auxquelles on est confronté. C'est en intégrant toutes les parties de l'entreprise, qu'on parvient à identifier les racines du problème et prévoir ainsi une issue. Après ce travail de fond, nous faisons des propositions et nous veillons à leur mise en œuvre en accompagnant individuellement les membres du groupe. Un travail suffisamment laborieux pour les employeurs, mais très souvent, ils finissent par reconnaître que ce long processus est bénéfique.
Source: Quotidien Mutations
|