Le Minadt accusé de détournement
Les relations se sont dégradées depuis le début de l’année
entre la commune d’arrondissement de Niété et le ministère de l’Administration
territoriale et de la décentralisation (Minatd). La commune de Niété, à travers
son maire Jean Jaurès Mengue, accuse le Minatd d’avoir déjà détourné plus
de 80 millions de Fcfa dans le cadre de la répartition des centimes additionnels
communaux (Cac) depuis le début de l’année 2008. Il menace même de saisir la
Justice. En fait, les collectivités décentralisées qui abritent les entreprises
faisant un chiffre d’affaires de plus d’un milliard de Fcfa doivent bénéficier
d’une retenue différée des centimes additionnels qui doivent être répartis entre
toutes les communes du Cameroun. Dans cette logique, seules 15 communes sur les
400 du Cameroun jouissent de ce statut. La commune de Niété est la seule du Sud
bénéficiant de cette redevance.
Depuis bientôt plus de 5 ans, cette redevance constitue à 90 % le budget de la
commune de Niété qui abrite la société Hévécam dont le chiffre d’affaires varie
entre 20 et 30 milliards de Fcfa par an. Cette année 2008, la commune de Niété
ne reçoit pas les Cac depuis le début des payements. “ Notre dossier a été
retenu parce que nous faisons cela depuis des années et il n’y avait aucun vice
de procédure. Malgré cela, notre éligibilité à la retenue différée n’a pas été
prise en compte ”, déclare le maire Jean Jaurès Mengue. En 2007, la commune
de Niété a reçu 131 millions Fcfa de Cac. Cette année 2008, elle n’a perçue que
16 millions de Fcfa, et attend le paiement du 4e trimestre. Sans la retenue
différée. “ Cette année, nous devions toucher plus des 131 millions Fcfa ou
du moins se maintenir à ce chiffre parce que le taux est passé de 3 à 5%. En
faisant l’addition, nous constatons que c’est près de 100 millions qui vont être
distraits ”, accuse le maire.
Un doigt est pointé sur le directeur des collectivités
décentralisées accusé de détournement et de corruption. “ Pour déposer le
dossier de la retenue différée, le directeur nous a demandé 500.000 Fcfa que
nous avons donnés. C’était cela ou rien. Et il a dit que sur les 34 millions
Fcfa qui devaient tomber chaque trimestre, il devait avoir un million. Ce que le
maire a refusé et il a préféré détourner cet argent qui nourrit plus de 36.000
âmes ”, révèle un conseiller municipal qui veut briser le silence qui
prévaut dans ce milieu.
Pour rentrer dans ses droits, la commune de Niété saisit une fois de plus le
Minatd. Le directeur des collectivités répond que Niété n’a pas été élue. Puis
après, l’explication change. Cette fois Niété est accusée de n’avoir pas déposé
un dossier. Après la présentation du récépissé de dépôt de dossier par l’équipe
communale, Owono Owono Jérôme, le directeur des collectivités décentralisées, se
rétracte et déclare dans une correspondance adressée à la mairie que “ la
commune d’arrondissement de Niété perçoit sa retenue additionnelle directement à
la société Hévécam ”.
Ce qui ne serait pas possible selon un responsable de Hévécam qui estime que “
toutes les grandes entreprises qui font des grands chiffres d’affaires reversent
leurs impôts et taxes directement à la direction des grandes entreprises au
ministère des Finances. ” Pour régulariser la situation, la commune saisit
une fois de plus le Minadt. Il leur est demandé cette fois-ci de se rapprocher
de la direction des grandes entreprises. Là-bas, le chef de la division avoue
son incompréhension à cette situation qui devrait “ être réglée par le Minatd
”. Des sources bien introduites au Minatd font état de ce que la retenue de la
commune d’Hévécam est bel et bien prélevée. Et les transactions attestent que
ces sommes sont reversées à Niété. “ Dans le cas présent, la division des
affaires juridiques du Minatd doit enquêter sur cette affaire qui ne peut s’agir
que de détournements de deniers publics ”,
précise la source.
Joint au téléphone vendredi dernier, le directeur des collectivités au Minatd a
indiqué qu’il n’a plus rien à voir dans cette affaire déjà réglée. Sans plus.
Face à ce ping-pong, des patriarches de Niété disent avoir saisi le chef de
l’Etat pour que la situation soit débloquée. Mais en attendant, les projets de
cette commune sont bloqués, la mairie fonctionne au ralenti, les salaires sont
impayés depuis trois mois et les professeurs vacataires recrutés par la commune
de Niété n’ont plus touché depuis la rentrée scolaire.
Source : Le Messager
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