Gyan Asamoah, inconsolable après l'élimination du Ghana en quarts de finale
Événement le plus médiatisé du monde, la coupe du monde de football se place devant le Superbowl, les élections présidentielles américaines, les MTV Awards ou n'importe quel autre événement.
Rendez-vous au sommet du football, cette coupe qui fait rêver tout footballeur qui sacrifierait beaucoup pour jouer un simple match est aussi conidérée comme ayant le pouvoir de réunir les peuples, gommer l'espace d'une période les différences entre les uns et les autres pour l'amour d'un sport collectif.
Pourtant, cette coupe du monde a malheureusement confirmé la tendance négative que le football moderne semble prendre depuis quelques années : starmania à l'extrême, crises d'égo, presse poubelle et surtout, l'apologie de l'antijeu.
La Fifa semblait pourtant avoir marqué le coup en 2006, faisant de Materrazzi un exemple de ce qu'on semblait ne plus vouloir voir sur un terrain : des joueurs vicieux usant et abusant de la provocation et de l'antijeu au nez et à la barbe des caméras. Aujourd'hui, il semblerait simplement que Materrazzi avait été puni à cause de l'impact médiatique de l'affaire et surtout la côte très élevée d'un Zidane qui avait tiré sa dernière salve en tant que joueur.
Aujourd'hui, les règles et le fonctionnement du football sont tels que les joueurs savent pouvoir en toute impunité ou presque imposer leur loi. Van Bommel aura face au Brésil été fidèle à lui-même : des coups en douce à longueur de temps qui auront sans doute fermement agacé De Melo et ses coéquipiers. Lors de la précédente coupe du monde, il avait d'ailleurs commis un véritable attentat sur Cristiano Ronaldo qui avait paru commandité tant il était dangereux et inutile. Le Portugais était sorti en larmes quelques minutes plus tard. Van Bommel est aujourd'hui capitaine du Bayern Munich et titulaire indisutable aux Pays-Bas.
On se souvient aussi de la double main de Thierry Henry, des simulations quasiment loufoques de Kader Keita ou de Sergio Busquets qui ont au mieux fait piaffer de dépit les observateurs, et au pire simplement été passées sous silence. On se rappelle aussi de Lui Fabiano, auteur de deux mains sur son but face à la Côte d'Ivoire nier avec toute la sincérité du monde avec un arbitre quasiment mort de rires. Les Eléphants ont perdu 1 à 3 et la coupe du monde a continué son chemin.
La Fifa avait l'occasion de frapper un grand coup au lendemain de Ghana – Uruguay, où le geste d'antijeu sans doute le plus formidable et le plus décisif de la coupe du monde a eu lieu. Tous les ingrédients étaient en effet réunis pour tenter quelque chose : dans une coupe du monde vivement critiquée pour l'antijeu, les erreurs d'arbitrage et autres, pour la première coupe du monde en Afrique, la main de Suarez a simplement éliminé le Ghana et a privé le continent organisateur d'une première demi-finale, le caractère grossier de la double parade pouvaient laisser penser qu'il y aurait un geste fort.
Certains ont suggéré de revoir le règlement pour suivre les exemples du rugby ou du basketball qui permettent à l'arbitre de valider des points même si le ballon n'a pas pénétré l'espace décisif – goaltending au basketball, essai de pénalité au rugby. D'autres ont planché pour une sanction exemplaire qui aurait dissuadé les joueurs de tenter de tels gestes à l'avenir, ou du moins aurait fait passer un message clair : le football ne tolère pas l'antijeu.
Mais malheureusement, rien n'a été fait de ce côté là. Suarez, qui n'a pas caché sa joie sur le terrain après le pénalty raté de Gyan, et dans les médias - félicité au passage par son coéquipier et capitaine Diego Forlan - revendiqué son geste qui selon lui valait le coup, n'a été suspendu qu'un match. Véritable héros en Uruguay et certainement en Amérique du Sud, Suarez est devenu le sauveur et Gyan Asamoah le boulet. Adiyiah, qui aurait du marquer le but de la qualification, a plutôt raté un pénalty aux tirs aux buts.
Sur Canal+ comme dans de nombreuses chaînes, on a commencé en passant la main comme étant un « réflexe » qu'aurait eu n'importe quel joueur dans la même situation, on a évoqué un sacrifice là où il y a eu antijeu et tricherie.
Ce n'est en effet pas de Suarez qu'il faut attendre un revirement, des excuses ou même un mot de réconfort envers les Ghanéens qui auraient du être en demi-finales, car l'Uruguayen ne pense avoir rien fait de mal ; c'était à la Fifa de taper du poing sur la table et de recadrer les choses, comme pour un enfant qui a commis un acte dont il n'est pas conscience de la gravité. Les joueurs de l'équipe de France, sûrs d'eux et du boycott de l'entraînement ont changé de fusil d'épaule quand ils ont réalisé la gravité et les conséquences de leur actes.
Pour Suarez et tous les footballeurs du genre, si les conséquences ne sont qu'un match de suspension comme pour n'importe quel carton rouge, mais surtout la joie, la liesse et les félicitations des médias, comment espérer bannir ce type de geste des terrains ?
Aujourd'hui, comme pour le racisme, il semble malheureusement clair que le football légitime ce qui n'a pas lieu d'y être, et que les joueurs n'hésiteront pas dans le futur à récidiver, mettant le fair-play et les valeurs du football de côté pour jouer la gagne à tout prix.
|
